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Actualités

La rue et la liberté d’expression

«J’en appelle à César», avait dit saint Paul au gouverneur romain. «Si nos demandes ne sont pas satisfaites, nous en appellerons à la rue», déclarait, il y a quelques jours, un ténor de l’opposition chiite («sa nahtakimou ilal chareh’» textuellement). De tels propos semblent invraisemblables dans la bouche d’un responsable politique. Se prend-il pour saint Paul et la rue pour César? Mais voilà que le général Aoun dit à peu près la même chose (voir L’Orient-Le Jour p. 2 du 11-12 novembre): «Soit des progrès sont accomplis,... soit les positions restent inconciliables,... et l’alternative sera, dans ce cas, la descente dans la rue.» Jusqu’ici, la majorité reconnaît comme un dogme la liberté de manifester, qui est étroitement liée à la liberté d’expression. D’accord, à condition de préciser: «manifester» pour quelle cause? Si nous prenons la France comme exemple, où les grèves assorties de manifestations ne sont pas rares, la classe ouvrière manifeste dans l’intérêt de ses membres contre une privatisation, ou le rythme du travail, ou un niveau considéré insuffisant des rémunérations, etc. Mais on ne conçoit pas une manifestation pour dire aux gens du pouvoir: «Je veux tant de sièges parmi vous», ou bien «Je veux tel pouvoir politique, sinon on réglera le différend par le recours à la rue». Que des «politiquement responsables» tiennent des propos surprenants, cela peut arriver. Mais qu’un chef prestigieux de parti, qui a été lui-même chef de gouvernement pendant plus d’une année, dise quelque chose d’équivalent, cela ne peut que navrer, surtout quand des appels de détresse émanent de l’unanimité des organismes économiques avertissant d’une catastrophe à nos aguets. N’a-t-il pas lu une page entière de journal consacrée, en caractères géants, à réitérer cet ultime appel? Une autre question : pourquoi un Parlement a-t-il été inventé, si ce n’est pour servir de lieu de discussion entre partis politiques? Enfin, si l’on réclame un «tiers de blocage», peut-on savoir ce qu’on cherche à bloquer, du moment que l’Assemblée est là pour discuter et «exprimer» son opinion par voie de vote? On éprouve de la honte à voir les milieux internationaux être témoins de ces luttes sordides, tandis que nous nous attendons à ce que les «pays donateurs» nous aident à nous remettre d’aplomb pour retrouver une situation vivable après tant d’épreuves. Albert SARA
«J’en appelle à César», avait dit saint Paul au gouverneur romain. «Si nos demandes ne sont pas satisfaites, nous en appellerons à la rue», déclarait, il y a quelques jours, un ténor de l’opposition chiite («sa nahtakimou ilal chareh’» textuellement). De tels propos semblent invraisemblables dans la bouche d’un responsable politique. Se prend-il pour saint Paul et la...