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TOURISME - Gousses d’ail et lampes ornées de croix, un commerce de souvenirs se met déjà en place La Croatie ressuscite son Dracula pour le plaisir de ses visiteurs

Lorsque la brume matinale embrasse Kringa, petit village d’Istrie, dans le nord-ouest de la Croatie, des jeunes attablés au « Bar du vampire » racontent avec passion la légende d’un Dracula local récemment ressuscité pour attirer des touristes. Assis sur une chaise en velours rouge, dans une pièce dont les murs sont décorés de gousses d’ail et de lampes ornées de croix, Mladen Rajko explique comment le projet « Jure Grando, le vampire de Kringa »,qui aurait sévi dans ce village au XVIIe siècle, a été lancé. La Croatie a accueilli en 2005 quelque dix millions de touristes, soit plus du double de sa population. Au cœur des terres, Kringa se trouve à quelques dizaines de kilomètres de la magnifique côte adriatique qui attire l’écrasante majorité des visiteurs. « Nous voulons mettre en valeur cette légende, pour laquelle existent des documents d’époque, afin d’améliorer notre offre touristique », explique M. Rajko, chef de la municipalité voisine de Tinjan. Le premier document sur Jure Grando a été écrit par son contemporain Janez Vajkard Valvasor (1641-1693), auteur de récits de voyage et historien slovène. Dans son œuvre La gloire du duché de Carniola (Die Ehre des Heryzogthums Crain) publiée en 1689 en Allemagne, Valvasor indique que Grando terrorisait encore les villageois et notamment sa veuve, seize ans après son enterrement. La nuit, il errait dans le village, frappait aux portes des maisons, après quoi des gens mouraient. Le démon rendait régulièrement visite à sa veuve en l’obligeant à accomplir ses « devoirs » conjugaux. Cette épouvante dura jusqu’à un jour de 1672 où neuf villageois téméraires décidaient de mettre fin à ce cousin de Dracula, personnage créé par l’écrivain irlandais Bram Stoker en s’inspirant du prince sanguinaire roumain du XVe siècle, Vlad Tepes l’Empaleur. En ouvrant la tombe, ils retrouvent le corps intact au visage souriant de Grando. Après une première tentative échouée de percer son cœur avec un piquet, ils lui tranchent la tête pour mettre fin à la terreur. « À cette époque-là, Grando avait déjà toutes les caractéristiques de vampires qui apparaîtront dans la littérature 150 ans après. Il est cynique, défie les autorités civiles et religieuses et il est sexuellement actif », explique Boris Peric, écrivain croate très au fait de cette légende. « L’histoire a été reprise par de nombreux théologiens et chroniqueurs. L’écrivain allemand Herman Hesse l’a publiée dans son anthologie du début du XXe siècle », ajoute M. Peric. Le « Bar du vampire » de Kringa organisera en août un festival littéraire pour y réunir des écrivains de littérature d’horreur. À cette occasion, une plaque avec les noms des neuf villageois courageux qui ont chassé le démon sera dévoilée. L’événement s’ouvrira par des dons de sang. Mais dans le petit village, l’opposition de la communauté conservatrice de quelque 300 habitants et celle de l’Église catholique se font sentir. M. Rajko et le propriétaire du bar, Robert Hrvatin, affirment que l’Église garde le secret de l’endroit où Grando est enterré. En regrettant le silence des prêtres sur ce détail, ils proposent en revanche aux touristes de visiter la ruine réputée être la maison natale de Grando. Un commerce de souvenirs – des bougies à l’odeur d’ail, une eau de vie « Grandina » et un vin rouge « Jure Grando » – se met déjà en place Pour les sceptiques, le côté démoniaque de Jure Grando aurait été inventé par sa veuve qui voulait cacher ainsi son amant.
Lorsque la brume matinale embrasse Kringa, petit village d’Istrie, dans le nord-ouest de la Croatie, des jeunes attablés au « Bar du vampire » racontent avec passion la légende d’un Dracula local récemment ressuscité pour attirer des touristes.
Assis sur une chaise en velours rouge, dans une pièce dont les murs sont décorés de gousses d’ail et de lampes ornées de...