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Actualités - ANALYSE

ÉCLAIRAGE Enlisement du processus des réformes en Égypte

Après avoir promis des réformes de taille sous la pression des États-Unis, le gouvernement égyptien a durci sa politique, profitant de la préoccupation de Washington par des dossiers plus pressants, estiment des analystes. Le régime a lancé fin mars une campagne d’arrestations dans les rangs des Frères musulmans, la principale force de l’opposition avec 88 députés sur 454, qui refusent la prorogation de l’état d’urgence. Imposé depuis 1981, après l’assassinat du président Anouar Sadate, l’état d’urgence devrait être reconduit fin mai par le Parlement dominé par le parti au pouvoir, pour une période de trois ans, malgré les appels des associations civiles et de l’opposition pour sa levée. Le gouvernement a décidé par ailleurs de traduire devant une commission de discipline deux juges ayant dénoncé des fraudes électorales lors des scrutins présidentiel et législatif, fin 2005. Il affiche en outre sa frilosité quant à l’adoption d’une loi interdisant l’emprisonnement des journalistes pour délit de presse, pourtant en négociation depuis plus de deux ans. « Il y a une régression dans le processus des réformes. En plus des mesures punitives prises à l’égard des juges réformistes, il y a une tergiversation évidente dans la préparation des projets de loi promis par le président (Hosni) Moubarak lors de sa campagne électorale », estime Nabil Abdel Fattah, du Centre al-Ahram pour les études stratégiques. Selon lui, la prorogation de l’état d’urgence est « un coup porté aux promesses de réformes et fait craindre sa pérennisation, alors qu’il est temporaire par nature ». Pendant sa campagne pour la présidentielle de septembre 2005, M. Moubarak avait promis de lever l’état d’urgence et de présenter des projets de loi, notamment sur la réforme du pouvoir judiciaire, de la garde à vue et des délits de presse. Depuis sa réélection pour un cinquième mandat de six ans, ces promesses sont pourtant au point mort. Récemment, il a affirmé dans une interview à la chaîne al-Arabiya que l’état d’urgence ne serait levé qu’à l’adoption d’une loi antiterroriste dont la rédaction nécessite près de deux ans. Les juges appellent depuis plusieurs mois à la fin de la tutelle du ministère de la Justice, affirmant qu’une justice indépendante défendrait les droits politiques des citoyens et mettrait fin à la fraude électorale. Pourtant, le début de l’année 2005 avait vu un espoir de réformes en Égypte : le mouvement d’opposition Kefaya avait multiplié les manifestations dans la rue, officiellement interdites, et surtout M. Moubarak avait ouvert la course à la présidentielle à d’autres candidats. Mais en décembre, l’opposant Ayman Nour, principal rival de M. Moubarak lors de la présidentielle, a été condamné à cinq ans de prison pour falsification de documents officiels. Puis deux mois plus tard, le régime a reporté de deux ans les élections municipales, provoquant la désapprobation de Washington. « La marche arrière du train des réformes est due à la levée de pression des États-Unis, qui sont occupés par d’autres dossiers régionaux, notamment ceux de l’Iran et de l’Irak », indique M. Abdel Fattah. « Les régimes arabes réalisent que Washington est dans le pétrin et sentent donc qu’ils peuvent maintenir le statu quo, du moins pendant un moment encore », poursuit-il.
Après avoir promis des réformes de taille sous la pression des États-Unis, le gouvernement égyptien a durci sa politique, profitant de la préoccupation de Washington par des dossiers plus pressants, estiment des analystes. Le régime a lancé fin mars une campagne d’arrestations dans les rangs des Frères musulmans, la principale force de l’opposition avec 88 députés sur...