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Actualités - OPINION

Le chef de l’État se sent renforcé par le double soutien du régime d’Assad et du Hezbollah La Syrie exige que Lahoud soit informé de l’ordre du jour de la visite de Siniora à Damas

Un constat attribué au patriarche Sfeir : le président Lahoud a lié son sort aux Syriens. Ils lui rendent amplement la monnaie de sa pièce. On sait qu’ils soutiennent son maintien à son poste par alliés interposés. Sous prétexte de préserver le prestige de la première magistrature, ils exigent maintenant qu’il soit informé de l’ordre du jour de la visite que le président Siniora doit effectuer à Damas. Si jamais on lui fixe rendez-vous, car la voisine ne cesse d’atermoyer en faisant attendre l’intéressé. Siniora aimerait bien pourtant que les choses soient tirées au clair avant le prochain rendez-vous du dialogue, le 28. On sait en effet, et tout le monde en convient désormais, que sans la Syrie, le nœud de la présidence ne pourra pas être dénoué. L’affaire a trop duré. C’est pourquoi, lors de la dernière rencontre des Quatorze, Samir Geagea a demandé et obtenu que l’on tranche (positivement ou négativement, selon le rapport de Berry) avant la fin du mois en cours. Cette même séance a été en partie perdue par les explications, les reproches mutuels entre les interlocuteurs, suite au double esclandre de Khartoum et du Conseil des ministres mort-né. Puis il a fallu que chacun y mette du sien, et de l’eau dans son vin, pour un rafistolage de détente. Après quoi, il n’était logiquement pas possible, faute de temps, de traiter pour de bon le sujet à l’ordre du jour, la présidence. Il y a eu des suggestions, certes, mais sans aborder la question des noms ni des conditions de base pour la succession. Le président Berry a donc proposé le report au 28. En principe parce qu’il y a les fêtes et que lui-même doit voyager. Mais en réalité, pour qu’une fois de plus, les protagonistes aient le temps de développer des tractations, des négociations en coulisses, afin de faire avancer le dossier. Ou de tirer un constat d’impasse totale. Auquel cas, l’on verrait si la séance du 28 devrait ou non être consacrée au dernier thème restant, l’armement du Hezbollah. Ce qui serait peut-être considéré comme inutile. Car en définitive, les deux volets sont en quelque sorte liés par ce que l’on appelle pudiquement le contour régional. Par la volonté syrienne, en réalité. La vraie question, c’est encore Berry qui l’a posée sur l’antenne de la BBC : ce n’est pas d’abréger le mandat du président Lahoud qu’il s’agit, a-t-il dit, mais de savoir si le chef de l’État va démissionner ou non. Le président de la Chambre répète pour sa part que dans cette affaire, il se range derrière le patriarche Sfeir. De leur côté, des professionnels estiment que Lahoud ne céderait qu’en cas d’accord soutenu extérieurement. Et, surtout, avalisé par la Syrie. Lahoud mise sur le soutien syrien À l’heure présente, Lahoud, selon ces sources, se sent raffermi par l’appui arabe reçu face à Siniora au sommet de Khartoum. Il pense également avoir marqué des points contre la majorité lors de l’algarade en Conseil des ministres et par la suite. Mais il mise principalement sur le soutien syrien. D’autant qu’il s’est gagné une sympathie maximale de la part du Hezbollah pour la défense qu’il en a prise. Du coup, le veto des prosyriens contre tout postulant émanant des rangs du 14 Mars se fait encore plus net. Ce dernier camp reconnaît, d’ailleurs, qu’il y a blocage et qu’il faut revoir la stratégie de déboulonnement. Ses piliers indiquent ainsi tous que si le dialogue devait avorter sur la présidence, ils reprendraient leurs billes et leur liberté d’action. Car le pays socio-économique ne peut supporter, selon eux, plus d’un an et demi de statu quo de crise. Le fruit est loin d’être mûr. Lors du dernier débat, Élie Skaff a proposé que l’on passe au crible les noms des candidats. En précisant que pour sa part, naturellement, il est pour Michel Aoun. Boutros Harb lui a répondu qu’il existe des candidats sur le lieu même ainsi que dehors. Mais qu’avant de discuter des noms, il faut en bonne logique s’entendre sur les critères de sélection comme sur le mécanisme de la procédure à suivre pour l’élection. Les aounistes constatent de leur côté que l’on a évité d’entrer au cœur du problème et d’aborder les détails. C’est pourquoi le général Aoun s’est déclaré comme candidat d’entente, après les derniers développements. Mais, en principe, il doit lui aussi patienter. Car le président Lahoud s’accroche plus que jamais. Fort, répétons-le, du soutien d’une Syrie qui ne souhaite pas de changement à la tête de l’État libanais (et pour cause). Reste la partie arabe. L’Arabie saoudite doit en principe dépêcher le chef de sa diplomatie, l’émir Saoud al-Fayçal, à Damas. Non pas tant pour la présidence libanaise que pour l’amélioration des rapports libano-syriens, la situation régionale étant des plus délicates, nécessitant de stabiliser au moins les fronts politiques. Le royaume wahhabite peut, en effet, penser que le régime syrien lui est redevable ainsi qu’à l’Égypte. On sait en effet que ce sont ces deux pays qui sont intervenus auprès des Américains pour qu’ils réduisent la pression sur ce régime et conviennent qu’il ne faut pas tenter de le faire sauter. Si la Syrie acceptait de composer et d’entamer la normalisation de ses relations avec le Liban, il en découlerait maintes conséquences sur le plan local. Y compris au niveau de la présidence. Damas jouerait encore plus volontiers le jeu s’il était assuré d’avoir son mot à dire (ne serait-ce qu’un droit de veto) dans l’élection libanaise. Pour le moment, les prosyriens indiquent que, loyal, le régime syrien demande non seulement à ce que le successeur ait ses faveurs, mais également l’approbation du président Lahoud. D’où, qu’on le veuille ou non, des critères d’exclusion des forces vraiment indépendantistes. À partir de là, on parle d’un panier de cinq noms plausibles, disons centristes. Liste remise au patriarche Sfeir pour qu’il donne son avis, selon l’un des participants au dialogue. Mais le prélat a préféré ne pas se mêler des noms, répétant qu’il se contente de livrer des qualifications. Il demande aux professionnels de trancher, en les appelant à l’entente, loin de tout slogan de vainqueur et de vaincu. Pour faire prévaloir un esprit de coexistence, donc de consensus. Pendant la pause, diverses forces politiques vont s’efforcer de persuader le président Lahoud de rendre de lui-même son tablier. Il n’est en effet pas possible, constitutionnellement, de le révoquer. Et le recours à la rue reste fortement déconseillé par les sages, le patriarche Sfeir en tête. Ces forces pensent, à juste titre, que pour faire levier, il faut d’abord améliorer les relations avec la Syrie. Elles misent à ce propos sur la visite du président Siniora à Damas. Mais elles comptent également, sans doute, sur des développements importants qui pourraient avoir lieu régionalement et internationalement d’ici au 28, dont les effets éventuels des initiatives arabes, égyptiennes et saoudiennes plus précisément. Développements qui faciliteraient la solution d’un problème libanais qui, d’ailleurs, retient l’attention des cercles extérieurs. Plusieurs pôles du cru ont du reste l’intention de mécher l’extérieur dans les prochains jours. En tout cas, redisons-le, sans l’approbation syrienne, il serait très difficile de changer le régime au Liban dans l’immédiat. Philippe ABI-AKL
Un constat attribué au patriarche Sfeir : le président Lahoud a lié son sort aux Syriens. Ils lui rendent amplement la monnaie de sa pièce. On sait qu’ils soutiennent son maintien à son poste par alliés interposés. Sous prétexte de préserver le prestige de la première magistrature, ils exigent maintenant qu’il soit informé de l’ordre du jour de la visite que le...