SMS Ghassan Moukheiber : Une commission « justice, vérité et réconciliation » pour clore le dossier des disparus

Cette rubrique vise à donner la parole à une personnalité active sur le plan politique, social ou culturel. Cette personnalité adressera spontanément un message court – une sorte de SMS – aux jeunes. Cette semaine, la parole va à Ghassan Moukheiber, député du Metn : Tous les Libanais ont récemment vu et partagé la douleur des familles des martyrs de l’armée, dont les restes ont finalement retrouvé le sol familial du repos éternel, de même qu’ils ont partagé la douleur digne et retenue de Marie Seurat, qui avait rejoint dans sa quête de vérité ses consœurs libanaises, lesquelles attendent encore et prient toujours. Ces dernières n’ont pas encore pu faire leur deuil. La mère d’un jeune disparu, kidnappé pendant la guerre, m’implorait un jour, les larmes gonflant ses paupières : « Nous voulons une tombe où pleurer nos fils ! » Une autre, dont le fils est disparu en Syrie, me réclamait également la vérité concernant son fils lors de l’exhumation de la fosse commune de Anjar : « Chaque os qui était exposé aux regards me faisait frémir … Ce pourrait être celui de mon fils. » Nous ne pouvons plus rester insensibles aux larmes et à la douleur des familles des 17 000 disparus au Liban et en Syrie depuis 1975. Il faut nous trouver une solution ! Je dis « nous » et non « leur » car cette affaire humanitaire et juste – qui a failli sombrer dans l’amnésie générale où l’avait plongée la politique criminelle des seigneurs de la guerre et leur loi d’amnistie inique –, cette affaire nous concerne tous et ne peut se régler par l’indifférence ou par l’oubli. La question des disparitions forcées n’est pas un exercice de polémique politicienne ni une réflexion intellectuelle pure sur la mémoire de la guerre. C’est un devoir national que nous devons prendre à cœur nous tous, citoyens et politiciens. La voie à suivre est claire : la mise en place d’une commission « justice, vérité et réconciliation », comme celle de l’Afrique du Sud et du Maroc, qui jouirait des pleins pouvoirs, ainsi qu’une commission internationale pour les disparus en Syrie. L’objectif : rendre nos disparus à la vie ou à la terre familiale, apaiser la douleur des parents et assainir la mémoire torturée (et tordue) pour édifier un avenir fondé sur la paix. Nous ne devons pas enterrer notre mémoire ni la craindre. Il faut y faire face, dignement et intelligemment, afin que les guerres et leur lot de crimes ne se répètent plus jamais.