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CORRESPONDANCE - Mère du théâtre expérimental américain La Mama: «Après Baalbeck, nous ne pouvions plus jouer comme avant…»

WASHINGTON- Irène MOSALLI «Après Baalbeck, nous ne pensions plus pouvoir jouer ailleurs que dans un espace vaste et inspirant. Cela a changé nos vies, cela a tout changé en nous et cela a changé nos idées sur la manière de faire réellement du théâtre.» Celle qui s’exprimait ainsi, il y a quelques jours, dans le quotidien New York Times, n’est autre qu’un des grands noms des planches américaines d’avant-garde, Ellen Stewart (surnommée «la Mama»), que le Liban avait eu la chance de découvrir au moment où elle était à la tête de l’explosion du théâtre de Broadway. Cela se passait en 1972. Cette année-là, la troupe de «la Mama» avait présenté dans le cadre du Festival de Baalbeck un inoubliable spectacle, bâti autour de la tragédie grecque Médée. Cette pièce de théâtre avait débuté à l’intérieur du temple de Bacchus et s’était achevée par une procession à travers tout le temple de Baalbeck. Procession menée par les acteurs qui jouaient leurs rôles respectifs et à laquelle le public avait été invité à prendre part pour suivre le déroulement final. Et le public avait répondu comme un seul homme à cette interaction scénographique tant il avait été fasciné par l’intensité et la beauté de l’interprétation, qui tablait sur les intonations et les modulations des voix, jouant sur la sonorité de mots grecs et latins constituant le texte. Le public libanais acteur de «Médée» Aujourd’hui, «la Mama» décrit ainsi ce moment qui a fait date dans les annales du Festival de Baalbeck pour avoir fait du public libanais un acteur de Médée. «Les femmes, dit-elle, ont retroussé leurs robes longues, ont ôté leurs chaussures et les ont passées à leur mari. Ces derniers ont noué leur jaquette autour de la taille et, haletant, tout le monde a suivi le cortège, comme dans une bacchanale.» Elle dit aussi: «Le Liban est un pays spécial. Avant la guerre, il était considéré comme le Paris de l’Orient. Les femmes venaient au Festival de Baalbek en tenue de grand soir et les hommes en smoking.» Puis elle évoque la légende de l’oiseau blanc, identifiée à l’esprit de Bacchus qui aurait vécu dans ses ruines. Ellen Stewart, qui a fait les beaux jours du théâtre expérimental américain qu’elle a associé à diverses autres cultures et qu’elle a essaimé de par le monde, continue dans cette voie malgré ses 80 ans. Pour le moment, elle s’apprête à se rendre en Albanie pour collaborer à monter une pièce avec les étudiants de l’Académie des arts de Tirana. Autres destinations pour des ateliers: Manille,Taïwan et Venise. De retour aux USA, elle présentera une nouvelle production d’Hercule. Rappelons que ses planches ont été parmi les premières, à New York, à accueillir des œuvres aussi complexes que celles de Sam Shepard, Harold Pinter, Lanford Wilson, Eugène Ionesco, Philip Glass, Robert Wilson et autres Jerzy Grotowsky. Et Big Apple le lui rend bien lui octroyant plusieurs grandes distinctions. Récemment, le maire de New York, Michael Bloomberg, lui a remis la clé de l’immeuble abritant les différents départements de son école depuis 1974: à comprendre qu’il en fait la propriétaire de ce lieu, devenu légendaire.
WASHINGTON- Irène MOSALLI

«Après Baalbeck, nous ne pensions plus pouvoir jouer ailleurs que dans un espace vaste et inspirant. Cela a changé nos vies, cela a tout changé en nous et cela a changé nos idées sur la manière de faire réellement du théâtre.»
Celle qui s’exprimait ainsi, il y a quelques jours, dans le quotidien New York Times, n’est autre qu’un des...