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La démocratie, associée à l’injustice, engendre l’extrémisme religieux

Les « causes perdues » engendrent le sentiment d’injustice et ce sentiment-là ouvre la voie au désespoir et le désespoir aux actions violentes et criminelles. Cela est d’autant plus vrai que la cause est politique et qu’il existe cette impression que tous les moyens démocratiques ont été épuisés. Plus encore que la mystification, la sacralisation de la « cause » autorise le sacrifice. Dans notre monde où la justice est bafouée par ceux-là mêmes qui prétendent la rendre, ne nous étonnons pas des répercussions dévastatrices au Moyen-Orient certes, mais aussi aux USA et en Europe. Nous avons là les ingrédients indispensables pour fabriquer, de toutes pièces, de véritables bombes humaines. C’est justement par l’outil démocratique le plus puissant, des élections législatives palestiniennes, que la victoire du Hamas a été obtenue. Béchir Gemayel, en d’autres temps, avait averti, d’une manière prémonitoire, que si la composante confessionnelle du conflit libanais ne se réglait pas d’une manière définitive, elle s’exporterait à une partie, ou à toute la région du Moyen-Orient, voire à l’Europe. Il avait vu juste. Quelque vingt années plus tard, les guerres de religion, ou qualifiées comme telles depuis lors, se sont multipliées et ont concerné l’ensemble du Moyen-Orient, l’Europe de l’Est et la Tchétchénie. L’extrémisme religieux vient comme une réponse à un système politique qui a, pour la première fois, épargné à l’Europe et aux USA un conflit majeur, et ce depuis plus de soixante ans. Ce temps de paix ne s’est pas fait sans une multitude de « petits » conflits à travers le monde, alimentés par les super-Grands, ayant pour fonction de diminuer la pression qui pèse sur eux, chaque fois que le niveau dépassait un certain seuil de tolérance. La guerre économique explique la quasi-totalité des conflits contemporains, menés par les super-Grands pour sauvegarder leurs intérêts. Les belligérants n’ont pas du tout le même conflit d’intérêt, étant donné qu’ils se sentent dépossédés de leurs biens au nom d’un système qui se veut pacifique et équitable mais qui, en réalité, véhicule la haine, le conflit et l’injustice. Il sème par conséquent les germes d’un nouveau conflit qui n’a plus rien d’économique, mais a l’apparence d’un extrémisme religieux comme celui du Hamas. Il n’est pas étonnant de voir ce parti politico-militaire remporter une victoire étant donné le manque d’enthousiasme de la part de la superpuissance à définitivement régler, équitablement, le conflit israélo-palestinien. Il est navrant de constater, qu’aux yeux des USA, seule puissance capable de régler le problème, le conflit arabo-israélien ne représente aucun intérêt pour eux, sinon – et cela est évident depuis le temps qu’il dure – ils y auraient mis le paquet. Plutôt que de nous étonner de la manière dont cela s’est produit, interrogeons-nous, à la lumière de ce que nous venons d’écrire, sur les causes plausibles d’un tel résultat. La riposte logique de la nation la plus puissante du monde victime de la violence est : la violence. C’est celle qui a été appliquée par les USA à la suite des attentats du 11/09/2001. Attaque de l’Afghanistan, « berceau du terrorisme antiaméricain », puis de l’Irak, mais pour des raisons différentes. Répondre à la violence par la violence est exactement ce qui est recherché par les assassins. Faire venir l’ennemi sur le terrain où il sera le plus vulnérable et où, pensent-ils, il perdra la face puisqu’ils s’affronteront à armes inégales sur un terrain qui n’est pas un champ de bataille. D’un côté, une armée structurée, préparée à une guerre classique ; de l’autre, des groupuscules armés, recourant au terrorisme. Pour les Américains, l’attaque qui a visé le World Trade Center est incompréhensible puisque la cible est un ensemble de civils et de bureaux, bien loin des intérêts militaires auxquels pourrait s’attaquer un ennemi des USA. Pour les belligérants, c’est le symbole même du nouveau colonialisme américain, qui ne dit pas son nom, qui est visé. D’abord, faute de moyens militaires efficaces pour affronter directement cette superpuissance américaine. Ensuite, parce que l’armée répond, in fine, à des impératifs formulés par des ordres de son président qui ne le fera que pour servir des intérêts économiques ; et donc, symboliquement, il est plus efficace de frapper l’ennemi là où ça fait le plus mal, c’est-à-dire justement son économie et son opinion publique. L’Europe, faute de mieux, empruntant le même chemin, dans la conception et la mise en route de sa politique étrangère, se voit prise en tenaille dans cette même logique dans un conflit qu’elle n’a pas forcément voulu. Le terrorisme a déjà frappé l’Espagne, le Royaume-Uni et tout laisse à croire que d’autres pays européens pourraient l’être aussi. La justification politique , et je dirais religieuse, de quelque attaque que ce soit et de quelque terrorisme que ce soit à l’encontre de l’Occident ne peut se concevoir en omettant de tenir compte de l’injustice criante que représente le non-règlement du problème du peuple palestinien. Il est probable que cela ne sera pas suffisant aux yeux de l’ensemble du monde arabe et musulman. Mais ce sera un signe du désir occidental de réparer cette énorme injustice historique qui a consisté à ignorer jusqu’à présent l’existence de ce peuple exproprié au profit d’un autre peuple victime, lui, de crimes contre l’humanité perpétrés par des Européens, non musulmans, et sur la terre d’Europe. Voici une « cause perdue » qu’il serait judicieux et vital de retrouver au plus vite, car elle en a engendré d’autres qui n’ont plus rien à voir avec elle (islamisme radical sunnite et chiite) mais dont elle représente le prétexte idéologique de choix à des agressions meurtrières et suicidaires. Quelles sont les répercussions de la victoire du Hamas sur l’évolution des négociations de paix avec Israël et sur la poursuite du plan américain de démocratisation du Moyen-Orient en général, dont le Liban ? Est-ce que le Hamas est capable de discuter, de négocier ou est-ce que l’unique langage qu’il emploie est celui des armes et des opérations-suicide ? La balle est aussi chez ses interlocuteurs ; c’est aussi à eux de faire des propositions acceptables. Sinon le chaos est le seul avenir envisageable. Le Liban sera-t-il, encore une fois, le terrain d’essai ou l’exutoire de la politique américaine dans la région ou un autre pays prendra-t-il la relève ? Prenons garde au Liban de ne pas défendre des idéaux qui ne sont pas les nôtres, à moins que la religion, et surtout son interprétation, ne vienne mettre son grain de sel dans une mayonnaise qui est en train de prendre et qui ne servira assurément pas un Liban idéalement indépendant, libre et démocratique. Dr Riad JREIGE Montpellier - FRANCE
Les « causes perdues » engendrent le sentiment d’injustice et ce sentiment-là ouvre la voie au désespoir et le désespoir aux actions violentes et criminelles. Cela est d’autant plus vrai que la cause est politique et qu’il existe cette impression que tous les moyens démocratiques ont été épuisés.
Plus encore que la mystification, la sacralisation de la « cause »...