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Actualités - REPORTAGE

Alors qu’aux USA la Cour suprême valide la loi sur le « suicide médicalement assisté » dans l’État de l’Oregon Le débat sur l’euthanasie remis sur le tapis en Grande-Bretagne

Alors que les partisans de l’euthanasie célèbrent leur victoire remportée il y a une semaine devant la Cour suprême aux États-Unis, une loi de l’État de l’Oregon autorisant le « suicide médicalement assisté » ayant été validée, le débat sur la mort assistée est de nouveau lancé en Grande-Bretagne. Dans ce pays, huit patients par jour ont été aidés à mourir par leurs médecins, en 2004, selon une étude indépendante, la première du genre, réalisée par l’université anglaise de Brunel et publiée dans le journal médical « Palliative Medecine. » Toujours illégale au Royaume-Uni et passible de quatorze ans de prison, l’euthanasie a été pratiquée sur 2 865 patients, a montré l’enquête dont les résultats découlent du questionnaire de 857 généralistes et médecins spécialisés interrogés sous couvert de l’anonymat. Parmi ces décès assistés, 936 faisaient suite à une demande explicite du malade, alors que dans les cas restants, la demande n’a jamais été formulée. Selon le Pr Clive Seale, qui a dirigé l’enquête, il s’agit de patients qui ont par le passé émis le souhait d’être euthanasiés mais qui ont perdu la capacité de donner des instructions spécifiques, après être tombés dans le coma à titre d’exemple. « Le taux (de décès par euthanasie) au Royaume-Uni est significativement plus bas que dans d’autres pays où cette étude a été menée », a-t-il déclaré. Cela montre que « les médecins britanniques ont moins envie de violer la loi et de s’engager dans de tels actes que ceux d’autres pays ». Le Pr Seale a noté que 14 % des médecins ayant participé à l’étude se disent peu satisfaits par l’actuelle législation, contre 82 %, qui en sont satisfaits. Il y a quatre ans, le pays avait été déchiré par le cas de Diane Pretty, une quadragénaire paralysée par une maladie incurable, morte dans la souffrance parce que la justice lui avait refusé le droit de se faire aider par son mari pour mourir. Depuis, la British Medical Association a décidé, à l’issue d’un vote l’an dernier, d’abandonner son opposition à un changement de la loi et d’observer une position de neutralité. Un projet de loi est actuellement à l’étude au Parlement. Il propose d’autoriser dans certains cas les médecins à prescrire des doses mortelles de produits que les patients prendraient eux-mêmes. Mais les partisans de l’euthanasie se heurtent à des fortes oppositions, avec notamment les chefs des Églises anglicane et catholique qui se sont prononcés contre sa légalisation, mais aussi d’associations qui militent contre cette pratique. Pour Deborah Annetts, de la Voluntary Euthanasia Society, l’étude du professeur Seale prouve au contraire qu’il faut légiférer. « Certains médecins violent la loi et aident délibérément des patients à mourir, a-t-elle plaidé. Certains d’entre eux agissent avec compassion, selon le souhait de leurs patients, mais d’autres agissent clairement sans leur consentement. Ceci est fait en secret et démenti en public. » Et de conclure : « Nous avons désespérément besoin de placer le patient au centre de ces décisions et de nous assurer que les médecins agissent avec des garde-fous adéquats pour protéger les patients autant qu’eux-mêmes. » De nouvelles perspectives Par ailleurs, les partisans de l’euthanasie aux États-Unis ont remporté mardi passé une victoire devant la Cour suprême, qui a validé une loi de l’État de l’Oregon, la seule autorisant le « suicide médicalement assisté », dont d’autres États pourraient s’inspirer. Par six voix contre trois, la cour a ainsi mis fin à la guerre menée depuis 1997 par les républicains et des groupes religieux contre la loi « Mourir dans la dignité » de cet État progressiste du nord-ouest américain. Dans son arrêt, la plus haute instance judiciaire américaine juge que le ministre de la Justice ne peut s’appuyer sur le droit fédéral pour interdire à des médecins de prescrire des doses mortelles de médicaments à des patients. « C’est réellement un arrêt très important, confirmant les droits des patients en phase terminale de contrôler leurs soins de fin de vie », a déclaré à l’AFP Robert Kenneth, porte-parole de l’association Mourir dans la dignité. La Cour suprême ne se prononce pas sur le droit de l’ensemble des Américains à avoir recours à l’euthanasie. Mais en validant la loi de l’Oregon, elle ouvre la voie à l’adoption de l’euthanasie par d’autres États américains. Selon ses partisans, la Californie (ouest) et le Vermont (nord-est) pourraient adopter prochainement des textes similaires. L’arrêt de 28 pages souligne l’illégalité d’une directive de novembre 2001, du ministre de la Justice d’alors, John Ashcroft, considérant que la prescription de « substances réglementées » aux fins d’euthanasie ne relève pas d’une « pratique médicale légitime ». « Cette affaire ne concerne pas strictement le droit de mourir (...) mais la possibilité ou non pour le gouvernement d’interférer dans les pratiques médicales, au nom de la loi (fédérale) sur les substances réglementées, a expliqué M. Kenneth. L’arrêt est rédigé de manière très restrictive, il n’évoque aucun droit constitutionnel à mourir. » Entre 1998, date des premiers « suicides assistés » en Oregon, et 2004, 208 patients ont eu recours à cette procédure. La loi « Mourir dans la dignité » encadre strictement l’euthanasie, en exigeant notamment que deux médecins concluent que l’espérance de vie du patient atteint d’une maladie incurable soit inférieure à six mois, que celui-ci a bien demandé cette procédure et que son choix est éclairé. Les services de santé de cet État estiment en outre qu’il ne s’agit pas à proprement parler d’« euthanasie » mais bien de « suicide assisté » car les substances létales sont ingérées par le patient et non injectées par les médecins eux-mêmes. L’arrêt de la Cour suprême est la première décision de poids concernant une question sociétale depuis la nomination en septembre de son nouveau président, le conservateur John Roberts, par George W. Bush. Le juge Roberts a voté contre cet arrêt, rédigé par le modéré Anthony Kennedy, ainsi que les deux autres membres les plus conservateurs de la cour, Clarence Thomas et Antonin Scalia. Le débat sur l’euthanasie aux États-Unis avait pris une tournure déchirante en mars 2005, autour du droit ou non de mourir de Terri Schiavo, dont les parents avaient lutté contre le débranchement de ses tubes d’alimentation, alors que son époux y était favorable. La mobilisation des mouvements chrétiens et conservateurs avait été telle que le Congrès avait voté une loi spéciale, permettant à la famille de soumettre le cas à la justice fédérale, qui avait finalement rejeté le recours des parents. « Nous sommes déçus, a déclaré le porte-parole de la Maison-Blanche, Scott McClellan, sur l’arrêt de mardi passé. Le président reste pleinement engagé à promouvoir une culture de la vie, fondée sur la valorisation de la vie à tous les niveaux. »

Alors que les partisans de l’euthanasie célèbrent leur victoire remportée il y a une semaine devant la Cour suprême aux États-Unis, une loi de l’État de l’Oregon autorisant le « suicide médicalement assisté » ayant été validée, le débat sur la mort assistée est de nouveau lancé en Grande-Bretagne. Dans ce pays, huit patients par jour ont été aidés à mourir...