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Actualités - CHRONOLOGIE

Sethrida : La victoire pour toute l’opposition (Photo)

Bécharré, « le village des derniers irréductibles », dit Joe Sarkis, l’ancien conseiller municipal FL à Beyrouth. À 23h00, le candidat de la liste soutenue par les trois députés Gebrane Tok, Kabalan Issa el-Khoury et Nader Succar, le très FL Anthony Geagea, reconnaissait la victoire de la liste parrainée par Sethrida Geagea. Un mot ? « Mabrouk », a-t-il dit, interrogé au téléphone par L’Orient-Le Jour. « Demain est un autre jour », a-t-il ajouté. Ce dimanche a été particulièrement chaud à Bécharré. Et il n’y avait pas que le soleil. Les électeurs se sont précipités dans les bureaux de vote où, dans certains, le taux de participation s’élevait jusqu’à 70 %, et l’enthousiasme des Bécharriotes était visible dans chaque ruelle de la localité. « Tous les Bécharriotes sont pro-Samir Geagea et ne souhaitent qu’une chose : sa libération. Mais notre leader est au-dessus de la bataille. Sethrida voulait un référendum, mais nous, on aurait souhaité un accord, qu’on choisisse la meilleure équipe au service de Bécharré, sans tous ces tiraillements. C’est ce que le “hakim” aurait adoré », dit un électeur bécharriote, militant Forces libanaises, et qui a voté, avec un sens de la discipline qui n’a rien à envier à un hezbollahi, pour toute la liste emmenée par Saïd Tok et parrainée par Sethrida Geagea. Tout en avouant qu’il a de sérieuses réserves concernant quelques noms, « de fameuses girouettes », dit-il. Mais comment faire passer un message politique qui est le vôtre en privilégiant le consensus et le développement ? « On aurait pu le faire passer autrement. Bécharré est tellement privée de tout. » Même son de cloche chez un ingénieur beyrouthin qui vote à Bécharré. « On aurait voulu une liste d’union. La libération de Samir Geagea fait l’unanimité, je pense que les FL auraient dû faire une liste de 14 candidats, en laissant quatre sièges vides pour les hommes des députés ; il faut faire progresser ce village en montrant que les électeurs sont particulièrement proches des FL », dit-il. « Il y a une volonté certaine d’engager un sérieux bras de fer, d’établir le décompte des voix des FL contre celles des députés », ajoute-t-il. Il évoque le combat d’une majorité de Bécharriotes entre leur cœur et leur raison, et presse la victoire du cœur, « même si les FL craignaient beaucoup de pressions de la part de Gebrane Tok », indique cet électeur, qui évoque un panachage important, « les gens ne sont pas des moutons ». Sauf que la discipline des FL convaincus est impressionnante. Et le taux de participation, à 15h30, culminait à 65 %. Les bénévoles (180 scrutateurs et 200 volontaires itinérants) de la liste de Sethrida Geagea évoquent de nombreux problèmes, notamment des émigrés qui auraient voté avec des cartes falsifiées dans différents centres du village, et donnent des noms : Sandy Mikhaïl Tok, Amira Najla Tok, Saïdé Nasr Roumanos, Philippe Mansour Tok, Youssef Habbal Tok, Nader Charbel Succar, Gebrane Boutros Romanos. Ils évoquent « des dissensions énormes, politiques et de développement (Sérail, hôpital, autoroute), entre Gebrane Tok et Kabalan Issa el-Khoury, que seuls les Syriens arrivent à réconcilier. Ces deux députés regardent les FL souffrir depuis dix ans sans broncher ». Joe Sarkis estime que la véritable entente « se retrouve dans la liste présidée par Saïd Tok ». Il assure que ce qui frappe à Bécharré, « c’est qu’on se retrempe dans une dose massive de moral au très beau fixe. Cela fait du bien après le désenchantement de Beyrouth : je vais repartir d’ici ressourcé », dit-il. 17h03. « Toute la liste semble avoir passé, avec un gros écart. » Sethrida Geagea est dans les salons de l’hôtel Palace, le QG des FL. Elle est en blanc de la tête aux pieds. C’est comme une icône, resplendissante, qui a réussi à imposer l’absolu respect des militants. Même ses détracteurs attendent qu’elle soit loin pour critiquer ses options, son entourage. Pendant plus d’une vingtaine de minutes, les sympathisants de tous les âges se succèdent devant elle, l’encouragent, l’embrassent, lui sourient, lui présentent leurs enfants... Interrogée par L’Orient-Le Jour, elle rend hommage au travail des délégués FL, évoque des problèmes, des fraudes, à Hay el-Saydé dans la matinée. « Nous avons pris contact avec la commission des plaintes du ministère de l’Intérieur, qui a réagi positivement, et tout cela s’est terminé. » Vos militants ont parlé d’achats de voix. « Je n’ai rien vu. » Pourquoi ne pas avoir établi une liste de 14 candidats FL en laissant quatre sièges vides aux deux députés ? « Nous avons foi dans les moyens démocratiques, le principe de l’entente dynamite la démocratie. Avec ce genre de liste, nous aurions imposé notre volonté ; or, ce que nous voulons, c’est que les Bécharriotes choisissent par eux-mêmes. Vous savez, il faut s’engager si l’on veut se dire PNL, Hezbollah ou FL », dit-elle, consciente du poids des mots, mais avec le sourire. Vous refusez le clientélisme. Pourtant, la liste que vous parrainez est un condensé des familles bécharriotes. « Certes, mais ça, c’est une coutume. Eux, ils imposent, le voilà le clientélisme. Notre victoire est celle de tous les Bécharriotes. On va commencer un travail de développement ouvert à tous », dit-elle. « On va prouver que politique et développement vont de pair. On ne peut pas développer une localité, la faire évoluer, si on n’est pas dignes, fidèles à ses engagements. » Vous allez prouver à ceux qui n’y croyaient pas que le cœur et la raison vont se retrouver ? « En politique, il n’y a pas d’affectif. Il y a des intérêts communs. Je ne sais pas si je suis capable de séparer entre mes sentiments – je suis la femme de Samir Geagea – et ma foi d’acier en la cause pour laquelle il est en prison depuis dix ans. C’est sa raison qu’il faut maîtriser avant son cœur, souvent, très souvent. Si j’avais voulu laisser primer mon affection, j’aurais commencé par mon oncle, Gebrane Tok. » C’est une victoire qui va mettre un peu de baume au cœur de Kornet Chehwane ? « C’est une victoire pour tout Bécharré, mais aussi pour toute l’opposition. Quelle qu’elle soit », conclut-elle avec un sourire entendu. Et soulagé. La tête de liste choisie par les trois députés s’appelle Anthony Geagea. Pour ce FL convaincu, la bataille a été particulièrement civilisée, et particulièrement enthousiaste. Pourquoi ne pas avoir adhéré à la liste FL ? « Ils ne m’ont pas choisi. » Et s’ils l’avaient fait ? « Tout est matière à discussion. Mais Bécharré a besoin de développement, pas de politique, ni de portes fermées. Moi, j’ai essayé les deux formules, j’ai fait partie des deux conseils municipaux. En 1998, les FL étaient seuls et nous n’avions rien pu faire. En 2002, on a pu travailler. Ce slogan Samir Geagea est trop lourd pour Bécharré, et je ne comprends d’ailleurs pas pourquoi seule Bécharré en a hérité. Je ne comprends pas cette recherche à tout prix de la victoire, qui a pour seul but de faire une évaluation de Kornet Chehwane. Samir Geagea a toujours rêvé d’une ville sublime de beauté, d’une ville où toutes les familles ne font qu’une », insiste-t-il. Précisant qu’aucune des deux listes, vu les candidats qu’elles comportent, ne représente les FL « comme il faut ». Du ressentiment ? « On m’a appelé Judas, Tarzan, qui saute de liane en liane. Mais ce n’est pas important. L’important, c’est qu’on se réveille demain en sachant qu’il y a de grosses lacunes dans la ligne politique FL, qu’il faut mettre cartes sur table et rectifier le tir. Cette secousse, finalement, peut servir pour que les gens voient plus clair. » Signalons que dans le caza de Bécharré, les FL ont remporté un peu plus de la moitié des municipalités, et souvent en menant au pouvoir local l’ensemble de la liste qu’elles soutenaient.
Bécharré, « le village des derniers irréductibles », dit Joe Sarkis, l’ancien conseiller municipal FL à Beyrouth. À 23h00, le candidat de la liste soutenue par les trois députés Gebrane Tok, Kabalan Issa el-Khoury et Nader Succar, le très FL Anthony Geagea, reconnaissait la victoire de la liste parrainée par Sethrida Geagea. Un mot ? « Mabrouk », a-t-il dit, interrogé...