Pour l’opposition, la manifestation a réussi... à démontrer l’échec du pouvoir

La manifestation prosyrienne et anti-1559 a continué hier de susciter des réactions dans les milieux loyalistes et opposants. Le député Salah Honein a estimé que la manifestation était « réussie »... avant d’ajouter, laconiquement : « Elle a réussi à manifester l’échec du pouvoir à assumer ses responsabilités. » « Le message était clair : si vous n’êtes pas pour la Syrie, vous êtres pour Israël, alors que la Syrie est prête à négocier avec Israël sans conditions préalables. La souveraineté libanaise n’a pas été évoquée dans cette équation. Ou bien n’est-il possible d’affronter Israël qu’en rentrant dans la grande prison, systématique, répressive, monochrome, celle du régime unique et de l’opinion unique ? » a-t-il affirmé. Selon M. Honein, le pouvoir a donc « failli à défendre la souveraineté, l’indépendance et la liberté du Liban, qui sont les premiers mots de la Constitution ». « Il s’est avéré que cette manifestation est celle de la volonté syrienne sur le territoire libanais », a-t-il souligné. Pour le député de Baabda, le pouvoir a aussi échoué « parce qu’il n’a pas su traiter d’une manière responsable avec la légalité internationale ». « Le gouvernement s’engage à respecter la légalité internationale dans sa déclaration ministérielle, avant de s’y opposer dans la rue, en prenant soin de parrainer » le rassemblement, a-t-il noté. « Le gouvernement a déployé ses efforts pour limiter le nombre de protestataires enthousiastes lors de la dernière manifestation estudiantine, organisée pour soutenir la souveraineté et l’indépendance réelle du Liban. Il s’est employé hier à augmenter le nombre de manifestants, même si ces derniers n’étaient pas libanais (...) », a-t-il également rappelé. Un point également soulevé par le député Pierre Gemayel. Ce dernier, qui effectue actuellement une tournée au Canada, a estimé qu’« à chaque fois que des voix s’élèvent pour des revendications nationales, le pouvoir a recours à la riposte, dans une tentative désespérée de montrer que les Libanais sont divisés et de justifier la perpétuation du fait accompli imposé au Liban depuis des années ». « La manifestation préfabriquée n’est que l’un des nombreux aspects de l’arrogance stérile qui ne pèse pas lourd dans la balance de la légalité internationale et des capitales de décision », a-t-il indiqué. Le chef du Parti national libéral, Dory Chamoun, a lui aussi considéré que le rassemblement avait été un « échec » et que « la 1559 sera appliquée malgré cette manifestation formée en grande partie de non-Libanais ». « Un certain nombre de Libanais appliquent les décisions syriennes, mais, en réalité, ils ne représentent pas grand monde », a-t-il souligné, estimant que l’événement avait donné une image négative du Liban, celle d’un pays qui s’oppose au droit international. Le Bureau central de coordination nationale (BCCN) a estimé, pour sa part, que l’événement s’inscrit dans le cadre des manœuvres syriennes habituelles pour accroître la tension politique au Liban et susciter les troubles confessionnels pour agiter le spectre de la guerre civile dès que ses intérêts sont menacés et que le retrait syrien est à l’ordre du jour. Quant au député Nehmetallah Abinasr, il a fustigé le principe de la loi du nombre, qui porte atteinte au pacte libanais. Dans les milieux du pouvoir, le ministre de la Justice, Adnane Addoum a estimé que la manifestation avait été « un succès, dans la mesure où elle a exprimé l’opinion du peuple libanais contre la 1559 et les ingérences externes dans les affaires libanaises ». Enfin, le Conseil supérieur chiite a salué « l’attitude civilisée exprimée par les citoyens libanais de leur opinion anti-1559 » et le « rassemblement national massif autour de la Résistance et des relations stratégiques avec la Syrie ». Le CSC a estimé que le rassemblement était exclusivement dirigé contre l’extérieur et les ingérences dans les affaires libanaises.