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Actualités - OPINION

ÉCLaIRAGE Pas de volonté d’application de la 1559 dans un délai raisonnable Le Liban officiel, porte-parole de la Syrie face aux Américains

La 1559 cible bien plus la Syrie que le Liban, malheureusement considéré comme quantité assez négligeable. À cause, en grande partie, de son suivisme. De ce fait, c’est pratiquement un rôle de porte-parole des décideurs que le pouvoir local assume, quand il s’agit de répondre aux Occidentaux. Ce dont Damas s’abstient. L’on a ainsi vu, et entendu, Nabih Berry en Belgique et Omar Karamé, à Damas même, répliquer aux admonestations US, inlassablement répercutées par l’ambassadeur Feltman. En rejetant sur le plan concret, le seul qui compte, la résolution du Conseil de sécurité de l’Onu. Pourquoi ce bénévolat libanais au service de la Syrie ? Parce que, affirme Berry, « nous avons besoin d’elle, et pas elle de nous. Nos relations sont régies par le traité de fraternité. L’armée syrienne nous aide à maintenir l’ordre sans contrepartie. » Il se demande, en toute candeur, « qui peut donc tenir le front du Sud, où se trouvent les camps palestiniens ». Pour soutenir ensuite que « c’est comme si, à travers la 1559, on demandait à l’État de se battre contre le Hezbollah et d’affronter le peuple palestinien. Et que le Liban se brouille avec son unique voisin, la Syrie. En somme, c’est comme si on voulait ramener le Liban aux débuts de l’année 1975 ». Karamé, de son côté, a soutenu, au sortir d’un entretien avec le président Assad, que la Syrie « est un facteur de stabilité dans la région. Le traité de fraternité, de coopération et de coordination rassemble nos deux pays et en fait une seule unité face à tous les complots et à tous les conspirateurs ». Il a ajouté qu’il existe « une opinion libanaise divisé au sujet de la 1559 ». Clivage qui serait tranché, selon lui, par les prochaines législatives « qui décideront de ce que veut vraiment le peuple libanais ». La Syrie et les dirigeants libanais, épaulés par la commission parlementaire des Affaires étrangères, mènent donc une campagne qui doit être couronnée, le 30, par une massive mobilisation de la rue. Par le biais des formations appartenant à la ligne dite nationale. La bataille actuelle du jumelage prolonge celle de la présidentielle et en épouse les formes. On trie les Libanais selon qu’ils sont considérés comme proches ou éloignés de la Syrie. Avec elle ou contre elle. Ce principe, appliqué pour la prorogation du mandat du président Lahoud, l’est de nouveau pour le rejet de la 1559. Si on ne dénonce pas cette résolution, on est contre la Syrie. Un diplomate occidental s’étonne de cette dérive de classification. Il rappelle, en effet, que la 1559 n’a été demandée par aucune partie libanaise Qu’elle émane d’une volonté commune franco-américaine, avalisée par le Conseil de sécurité. De ce fait, la question d’une majorité ou d’une minorité libanaise favorable ou défavorable à la résolution n’a absolument aucune espèce d’importance. Aucun effet sur l’applicabilité du texte, qui reste entière. Contrairement, par exemple, à l’accord du 17 mai : initialement approuvé par la majorité parlementaire, il est resté quand même lettre morte. De même, antérieurement, pour la convention dite du Caire, torpillée par l’une des parties signataires. Quant aux accords de Taëf, rejetés par une partie déterminée, ils avaient été à l’origine d’affrontements au sein d’une même communauté. Ce qui ne les a pas empêchés, à la fois, de prendre corps et d’être tronqués, trahis. De ces exemples, il ressort que l’élément de faisabilité se discute, quand il s’agit d’accords. Mais quand ce sont des résolutions du Conseil de sécurité qui sont en jeu, elles ne meurent jamais et même si leur exécution peut se trouver retardée pendant de longues années, elles gardent force de loi. Et dans la plupart des cas, quand il y a urgence humanitaire par exemple, elles sont immédiatement suivies d’effet. Ainsi, pour le Darfour, le Conseil de sécurité n’a pas attendu de négocier avec le pouvoir soudanais pour lui intimer ses injonctions. Malgré la vive opposition de Khartoum, qui lui aussi a parlé d’ingérence dans ses affaires intérieures, l’Onu est intervenue. Pour cet observateur étranger, il est évident que la 1559 n’est pas faite pour croupir éternellement sur une étagère. À son avis, les objections des autorités libanaises et syriennes ou les manifestations de masse n’y feront rien : l’ordonnance sera mise à exécution, tôt ou tard. Par les moyens les plus sobres, les plus économiques, les moins violents, de préférence. Mais, éventuellement, d’une manière très ferme. Il ajoute que le Conseil verra s’il faut ou non négocier les mécanismes avec le couple Syrie-Liban. S’il y a lieu, ou non, de patienter jusqu’à l’ouverture, ou la conclusion, de pourparlers de paix, comme le demandent Damas et Beyrouth. Qui prétendent qu’une fois le Golan et Chebaa récupérés, une fois la 242 et la 338 appliquées, la présence de l’armée syrienne au Liban, l’autonomie des camps palestiniens et l’action militaire du Hezbollah n’auraient plus lieu d’être. Mais, poursuit le diplomate, si le Conseil de sécurité avait admis l’idée d’associer les points précités à l’ensemble du dossier régional, il n’aurait pas promulgué la 1559. Il peut, aussi, refuser de négocier un compromis quelconque. Et déciderait, sans coup férir, de mesures économiques, politiques, diplomatiques ou, éventuellement, sécuritaires. En tout cas, quand le Conseil de sécurité vole au secours d’une population opprimée, d’un pays dépossédé de sa souveraineté, il ne demande l’autorisation de personne. Émile KHOURY
La 1559 cible bien plus la Syrie que le Liban, malheureusement considéré comme quantité assez négligeable. À cause, en grande partie, de son suivisme. De ce fait, c’est pratiquement un rôle de porte-parole des décideurs que le pouvoir local assume, quand il s’agit de répondre aux Occidentaux. Ce dont Damas s’abstient. L’on a ainsi vu, et entendu, Nabih Berry en Belgique...