Rechercher
Rechercher

Actualités - REPORTAGE

DÉVELOPPEMENT - Agriculteurs et apiculteurs bénéficient du projet exécuté par l’Institut pour la coopération universitaire de Rome Coup de pouce de l’Union européenne à la réhabilitation agricole du Liban-Sud (Photos)

Sans l’initiative de quelques ONG étrangères, les villages auparavant occupés par Israël auraient été délaissés et livrés à leur triste sort. Près d’un an après la libération, ces localités ont ainsi bénéficié de l’aide de l’Institut pour la coopération universitaire (ICU) de Rome. Cette ONG italienne a exécuté un projet de soutien à la réhabilitation agricole du Liban-Sud dans les cazas de Marjeyoun, Hasbaya et Bint-Jbeil. Un projet qui profite à des centaines d’agriculteurs et d’apiculteurs de la région. Initié en juin 2001, le projet prendra fin le mois courant. D’une valeur de 2800000 euros, il est financé conjointement par l’Union européenne (deux millions d’euros) et le ministère libanais de l’Agriculture (800000 euros), qui en est d’ailleurs le bénéficiaire local final. Il s’agit d’un projet en plusieurs volets. «Dans un premier temps, nous avons organisé des cours de formation agricole théoriques et pratiques à l’intention de seize personnes, nommées par le ministère de l’Agriculture dans les trois cazas, explique M. Claudio Errighi, directeur du projet au Liban-Sud. Nous y avons également construit trois centres de services agricoles à Markaba (Marjeyoun), Aïnata (Bint-Jbeil) et Hasbaya. Pour ce faire, le ministère de l’Agriculture a mis à notre disposition un terrain de 2000 m2 dans chaque caza.» Chacun de ces centres est équipé d’un pressoir d’olives et d’une ligne de production pour la mise en bouteille, d’un atelier pour le conditionnement du miel et de la cire, de machines agricoles (tracteurs, pulvérisateurs, charrues…) et d’intrants agricoles (engrais et pesticides). «Ces centres de services ont pour but d’aider les coopératives agricoles à baisser le coût de production, à améliorer la qualité de leurs produits et à les commercialiser, poursuit M. Errighi. Dans cette optique, nous avons ouvert, dans les locaux de la Chambre de commerce et d’industrie de Saïda, un bureau d’aide aux coopératives. Son objectif est de mettre ces groupes en contact avec des commerçants locaux et étrangers. Le bureau a déjà facilité l’exportation de l’huile d’olive extravierge en Angleterre et dans d’autres pays européens et sud-américains.» «Les centres offrent également aux agriculteurs, à des prix réduits, les services de mécanisation agricole, ajoute M. Errighi. Ils pourront ainsi louer des tracteurs ou d’autres machines nécessaires pour leur travail. D’ailleurs, nous essayons de les familiariser avec la récolte mécanique des olives, susceptible de leur faire économiser l’argent. Les agriculteurs peuvent de même bénéficier, à des prix réduits, de tous les autres services offerts par le centre : pression de l’huile d’olive (650 LL par litre d’huile, le prix courant dans la région étant de 1000 LL), la mise en bouteille, l’achat de pesticides et d’engrais dont l’impact sur l’environnement est minime. Même les apiculteurs peuvent profiter des services des centres qui assurent l’extraction de la cire d’abeille et la mise en carafe du miel.» Rien ne se perd, tout se transforme La cire d’abeille, que les apiculteurs avaient l’habitude de jeter, est stérilisée dans ces centres et transformée en plaques, revendues à 1500 LL le kilo. «Sur le marché local, le kilo des plaques de cire coûte en moyenne 15000 LL, constate M. Hussein Hoteit, ingénieur agronome à l’ICU. Placées dans les ruches pour faciliter aux abeilles la fabrication du miel, ces plaques permettent ainsi d’économiser quelque huit kilos de miel nécessaires pour leur préparation. La cire qui ne sert plus pour la confection des plaques est transformée, par la suite, en bougies de différentes formes ou en icônes à l’effigie de la Madone.» «Le pressoir du centre de Markaba bénéficie d’un système à deux phases, insiste M. Hoteit. Il permet ainsi de produire une huile de qualité supérieure et de respecter l’environnement. Le seul sous-déchet produit par ce système est la matière humide que nous transformons en compost organique. Celui-ci est réutilisé pour la fertilisation des terrains agricoles.» Et de remarquer que plusieurs ONG et associations agricoles louent les services des centres pour la pression et la mise en bouteille de leur huile. M. Hoteit explique, dans ce cadre, que chaque centre possède un label différent qui sera apposé sur les bouteilles d’huile ou les pots de miel. Si les olives sont pressées et l’huile mise en bouteille dans «nos centres», un deuxième label, garantissant la bonne qualité du produit, sera collé sur la bouteille. Orientation technique Dans le cadre du projet, l’ICU a de plus réhabilité et équipé trois bureaux de vulgarisation agricole, relevant du ministère de l’Agriculture, dans les trois cazas. Situés dans les villages de Bint-Jbeil, de Marjeyoun et de Hasbaya, ces bureaux fournissent les informations nécessaires concernant la culture des arbres fruitiers, l’élevage des vaches laitières, les maladies qui frappent les abeilles, les arbres fruitiers et la façon d’y remédier, la technique à adopter pour améliorer la qualité de l’huile d’olive extravierge, les meilleures techniques pour planter les figues de barbarie, élaguer les oliviers, les valeurs nutritionnelles de l’huile d’olive, etc. Des brochures sont distribuées à cet effet. «Les bureaux de vulgarisation agricole organisent des sessions de formation, signale M. Errighi. Quelque 174 sessions ont eu lieu jusqu’à présent dans les domaines de l’agro-industrie, l’apiculture, la production animale, la nouvelle culture (origano, culture biologique, etc.) et l’arboriculture. Le nombre des participants s’est élevé à 3074 personnes. De plus, ces bureaux ont effectué 869 visites d’assistance technique à l’intention des agriculteurs et des coopératives, et des dizaines de champs démonstratifs sur les nouvelles cultures et les nouvelles techniques agricoles.» Production d’huiles essentielles L’ICU a par ailleurs réhabilité l’école technique agricole de Khiam où sont effectués les tests de qualité sur l’huile d’olive et le miel, ainsi qu’une pépinière, relevant du ministère de l’Agriculture, dans le village de Rmeich. «Le but est de fournir aux apiculteurs des plantes mellifères pour la production du miel, et aux bergers des plantes pastorales pour nourrir leurs troupeaux, raconte M. Errighi. La pépinière offre aussi des plantes forestières pour reboiser les terrains dégradés, et des plantes médicinales et aromatiques pour l’extraction des huiles essentielles. La pénurie d’eau demeure l’un des problèmes majeurs du Liban-Sud. Nous avons donc essayé de promouvoir auprès des agriculteurs la culture des plantes médicinales. Celles-ci poussent, sans eau, dans tout type de terrain. Comme il est impossible de commercialiser les fruits de ces plantes, nous avons installé ici, à la pépinière même, un distillateur pour en extraire les huiles essentielles, d’autant plus qu’il existe un grand marché américain pour ces produits. L’huile d’origan, à titre d’exemple, est très prisée. Elle est, en fait, réputée pour être un antioxydant naturel, bénéfique pour lutter contre le cholestérol.» Près de 60000 plantes sont ainsi données gratuitement chaque année aux agriculteurs. Ces derniers paient uniquement un timbre d’une valeur de 1000 LL, exigé par le ministère des Finances. «Nous avons équipé la pépinière d’une station agrométéorologique, la seule au Liban-Sud qui puisse mesurer le taux de pluviométrie, précise M. Errighi. De même, nous avons reboisé, en collaboration avec les municipalités des trois cazas, trente hectares (300000 m2) de terrains avec des arbres forestiers (pins pignons), des arbres pastoraux (acacia cyanophyla) et des arbres mellifères (rubinia pseudo acacia).» Des projets régionaux Une fois le projet terminé, il sera géré par un comité mixte public et privé formé de représentants du ministère de l’Agriculture et des coopératives. «Les personnes que nous avons formées sont très motivées, signale M. Errighi. Je pense que la bonne continuité du projet sera garantie.» Envisagez-vous d’autres projets pour le Liban ? « Oui, répond M. Errighi. Nous avons jeté les bases d’un grand projet régional pour la gestion de l’eau entre le Liban et la Jordanie qui sera réalisé avec l’Office des eaux du Litani. Nous avons un autre projet environnemental que nous avons soumis à l’Union européenne. Il sera réalisé entre le Liban et la Syrie, avec la collaboration de l’Institut de recherches agricoles (Icarda) d’Alep. Le projet vise à mettre en valeur les terrains abandonnés et à les protéger contre la désertification. Si l’Union européenne accepte de le financer, il sera entamé au cours du deuxième trimestre de 2005.» Nada MERHI Raconter l’expérience positive du Liban Le projet de soutien à la réhabilitation agricole du Liban-Sud n’est pas l’unique projet réalisé par l’ICU au Liban. Déjà en 1994, l’ONG italienne a mené un projet semblable au Chouf. D’une valeur de cinq millions d’euros, il a été exécuté en collaboration avec le ministère des Déplacés et grâce à un financement de l’Union européenne. Il visait à aider les agriculteurs de la Montagne à revenir dans leurs villages. Un centre de services agricoles a ainsi été créé à Deir el-Qamar. «Dans une continuité de ces projets de soutien, nous envisageons la mise en place d’un programme de crédits agricoles, explique Nicolò della Chiesa, de l’ICU de Rome, en visite récemment au Liban. Ce programme sera exécuté en collaboration avec la Banca di Roma. Les crédits ne dépasseront pas la somme de 5000 dollars. Ils seront remboursés sur une période de deux à trois ans.» Nicolò della Chiesa a visité le Liban en compagnie de Rossella Miranda, également de l’ICU de Rome. Le but de cette visite? «L’ICU effectue, dans le cadre de ses activités, des programmes d’informations sur des pays non européens à l’intention des sociétés européennes, explique Mme Miranda. Nous avons ainsi tourné un documentaire sur ce pays, caractérisé par la cohabitation confessionnelle. Nous voulons relater les aspects positifs de cette expérience.» Le documentaire insistera donc sur les projets réalisés par l’ICU au Liban et présentera le pays des points de vue social et politique. «Le documentaire fera l’objet d’événements publics à Rome et de séminaires organisés dans les écoles à l’intention des classes secondaires, note Mme Miranda. Notre objectif est de prouver qu’il est possible de parler de paix au Moyen-Orient et au Liban malgré tous les problèmes que rencontre le pays au quotidien. Nous essayons de comprendre les fondements de l’équilibre au Liban.» Et de rappeler: « Il y a deux ans, nous avons réalisé un reportage photographique sur le Liban, dans lequel nous avons soulevé des questions relatives à la cohabitation, à la paix et à l’équilibre confessionnel. Nous nous sommes alors adressés à des hommes politiques et à des journalistes, comme nous nous sommes entretenus avec les personnes qui ont collaboré avec l’ICU, dans le cadre du projet de soutien à la réhabilitation agricole du Liban-Sud.» Quelles ont été vos impressions? «Les personnes ordinaires vivent au jour le jour et ne pensent pas vraiment aux différences, répond Mme Miranda. Nous avons remarqué aussi que le confessionnalisme est très répandu au Liban. Par ailleurs, nous avons apprécié l’ouverture du Liban vers l’Occident, tout en s’attachant à ses spécificités. En Europe, nous pensons que le multiconfessionnalisme entrave le dialogue. Ici, nous avons constaté qu’il peut être entretenu.»
Sans l’initiative de quelques ONG étrangères, les villages auparavant occupés par Israël auraient été délaissés et livrés à leur triste sort. Près d’un an après la libération, ces localités ont ainsi bénéficié de l’aide de l’Institut pour la coopération universitaire (ICU) de Rome. Cette ONG italienne a exécuté un projet de soutien à la réhabilitation...