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Actualités - ANALYSE

ÉCLaIRAGE La désignation de Omar Karamé obéit à des considérations internes Vers un gouvernement de choc pour relever les défis et affronter une situation internationale complexe

La situation a beau être complexe et difficile, elle a le mérite d’être claire. Désormais, pour le camp loyaliste en tout cas, les cartes sont à découvert et les options bien définies. Des sources proches du pouvoir affirment aujourd’hui que tout a été tenté pour trouver une formule de coopération avec le président du Conseil sortant, Rafic Hariri. Une collaboration a été tentée pendant sa « période de gloire », après sa victoire aux élections législatives de 2000, une autre quand il a été moins puissant, lors de la formation de l’actuel gouvernement démissionnaire, et une troisième lorsqu’il était plus ou moins affaibli, notamment après les élections municipales. Mais dans tous les cas de figure, selon les mêmes sources loyalistes, il n’a jamais été possible d’établir une coopération réelle et profonde avec lui. Même récemment, après avoir accepté de voter en faveur de l’amendement constitutionnel qui a ouvert la voie à la prorogation du mandat d’Émile Lahoud, il a continué à vouloir négocier la formation d’un gouvernement qui lui serait favorable et tous les ministrables qu’il a proposés étaient proches de lui. Nul n’a été dupe, ainsi, des démentis répétés portant sur le fait que les entretiens des divers responsables ces derniers jours ne portaient pas sur la nature du futur gouvernement. M. Hariri aurait même effectué plusieurs allers-retours Beyrouth-Damas, en secret, pour solliciter une intervention des autorités syriennes dans ce but. Et à chaque fois, affirment les mêmes sources, le scénario était le même : Hariri était reçu une dizaine de minutes avec une réponse invariable : « Pourquoi venez-vous nous voir ? Nous ne pouvons pas nous mêler de la formation du gouvernement. Et de toute façon, vous savez très bien ce que nous souhaiterions. » Une fin de non-recevoir C’est sans doute cette fin de non-recevoir, au propre et au figuré, qui a poussé M. Hariri à quitter la scène gouvernementale, laissant le président de la République mais aussi le président de la Chambre et les députés assumer seuls la responsabilité de la suite des événements. Dans ce contexte de crise, et alors que le monde entier a les yeux braqués sur le Liban, les milieux loyalistes estiment qu’il est important d’avoir une équipe homogène et combative, en mesure d’affronter les défis à venir et prête à subir les attaques d’une opposition remontée à bloc et qui ne semble pas décidée à faire des cadeaux. Car si la déclaration présidentielle émanant du Conseil de sécurité est considérée comme plus clémente que prévu, elle n’en reste pas moins une épée de Damoclès au-dessus du Liban et de la Syrie. Pour toutes ces raisons, soulignent les milieux proches du régime, il est donc indispensable que le futur gouvernement soit crédible et suffisamment solide pour ne pas s’effondrer si les vents hostiles soufflent à nouveau. Pour les forces politiques en présence, le choix de l’ancien Premier ministre Omar Karamé s’est ainsi imposé. D’abord parce que cette famille à la longue histoire politique est bien implantée à Tripoli et a conservé, en toutes circonstances, une certaine popularité chez les habitants du Nord. Sans oublier le fait qu’il jouit lui-même de l’appui d’un grand nombre de Tripolitains, malgré ses nombreuses périodes de traversée du désert, et qu’il a fait ses preuves dans sa capacité d’affronter les périodes de crise. De plus, la plupart des blocs parlementaires estiment qu’il est préférable à l’heure actuelle de désigner un Premier ministre non originaire de Beyrouth (ou de Saïda) pour éviter que les habitants de ces régions ne se braquent et se sentent solidaires de M. Hariri. Avec M. Omar Karamé, leader populaire du Liban-Nord, le choc est ainsi amorti, estiment les sources loyalistes. Karamé, un problème pour Frangié et Mikati Mais il est certain que M. Karamé pose un problème à certaines figures du Nord, comme le ministre de la Santé, Sleimane Frangié, et le ministre des Transports Négib Mikati. Certains analystes considèrent même que la déclaration de M. Frangié dans laquelle il réclame le portefeuille de l’Intérieur pour accepter d’intégrer le nouveau gouvernement est une manœuvre destinée à lui permettre de se retirer élégamment. C’est comme si le ministre Frangié avait flairé, avant tous les autres, la suite des événements et qu’il avait choisi de prendre ses distances pour des raisons qui lui sont propres et qui touchent à la situation au Nord. De même, pour M. Mikati, Omar Karamé est un rival évident, puisqu’ils ont tous les deux le même fief et doivent se partager la même assise populaire. Mais ceux, dans les cercles proches du régime, qui sont impliqués dans la formation du nouveau gouvernement estiment qu’aussi bien Sleimane Frangié que Négib Mikati finiront par accepter de faire partie du gouvernement, les considérations nationales étant plus importantes à leurs yeux que les calculs électoraux. Et dans cette phase où la confrontation semble inévitable, au moins sur le plan international, toutes les forces concernées doivent être mises à contribution. Les sources loyalistes laissent entendre que l’annonce de la formation du gouvernement ne serait plus qu’une question de jours, deux au maximum. Car les consultations déjà entreprises auraient permis d’avoir une idée assez précise de l’équipe en gestation, qui devrait regrouper, outre certaines figures qui font partie des constantes, des personnalités crédibles proches de la plupart des forces politiques, affirment les milieux précités qui soulignent que « ce qui est sûr, c’est que le chef de l’État est pressé d’entamer la préparation des dossiers qu’il évoque souvent devant ses visiteurs ». La liste des priorités est longue, mais Lahoud semble déterminé à donner une place privilégiée aux questions sociales et à la crise économique, puisqu’après tout, c’est ce qui touche le plus le citoyen et selon lui, il est temps de s’en soucier, après s’être longuement occupé des questions politiques. Ce qu’il souhaite donc, concluent les sources loyalistes, c’est pouvoir « travailler en équipe avec le nouveau gouvernement dans l’intérêt des citoyens et du pays en général ». Mais pour les milieux proches du régime, les défis restent immenses, et rien n’indique que la communauté internationale est prête à plus de bienveillance envers le Liban. Scarlett HADDAD
La situation a beau être complexe et difficile, elle a le mérite d’être claire. Désormais, pour le camp loyaliste en tout cas, les cartes sont à découvert et les options bien définies. Des sources proches du pouvoir affirment aujourd’hui que tout a été tenté pour trouver une formule de coopération avec le président du Conseil sortant, Rafic Hariri. Une collaboration a...