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Actualités - OPINION

Les Libanais sont-ils condamnés à toujours choisir entre deux maux le moindre ?

Les Libanais sont régulièrement placés devant l’alternative malheureuse d’avoir à choisir entre deux maux le moindre, se plaint cette instance religieuse. En 1969, lors de l’Accord du Caire, les Libanais qui s’y opposaient ont été placés devant le choix de l’accepter ou d’exposer le pays à une guerre libano-palestinienne. La discorde fut quant même au rendez-vous, car les Palestiniens armés violèrent l’accord, sans le moindre respect, ne serait-ce que formel, pour la souveraineté libanaise. À la signature de l’accord de Taëf, qui réduisit substantiellement les prérogatives de la présidence de la République, les Libanais eurent à choisir entre cet accord et la poursuite de la guerre. Résultat : le canon s’arrêta effectivement, mais l’accord fut appliqué sélectivement, sans que soit réalisée l’entente nationale, véritable objectif de l’accord. Lorsque l’échéance du retrait des forces syriennes du Liban fut là, les Libanais qui s’en félicitaient furent placés devant un choix dramatique : renoncer à réclamer ce départ, ou faire face à l’effondrement de la paix civile. C’est ainsi que la sécurité et la stabilité du Liban furent obtenues aux prix de la souveraineté, de l’indépendance et de la liberté du pays. Est-il vrai toutefois que seul le maintien des forces syriennes au Liban peut nous assurer la stabilité ? Et comment se fait-il qu’en vingt-cinq années de présence syrienne au Liban, les forces de sécurité libanaises n’aient pas réussi à devenir autonomes, de sorte qu’elles n’aient plus besoin de l’appoint des forces syriennes pour accomplir leur tâche ? L’accord de Taëf est pourtant clair sur ce point : « L’État libanais a pour objectif d’étendre son autorité sur la totalité du territoire libanais par le biais de ses forces propres représentées d’abord par les Forces de sécurité intérieure. Partant des rapports fraternels qui lient la Syrie et le Liban, les forces syriennes constitueront une force d’appui aux forces légales libanaises (...) durant une période limitée de deux ans au maximum qui commence avec l’approbation du document d’entente nationale (l’accord de Taëf), l’élection du président de la République, la formation d’un gouvernement d’entente nationale et la réalisation des réformes politiques prévues par les voies constitutionnelles. » Voici 14 ans que l’accord de Taëf a reçu force constitutionnelle et que le Liban demeure tributaire des forces syriennes pour le maintien de la sécurité dans certaines parties du pays. La question qu’il est légitime de poser, face à une situation aussi anormale dont nul ne sait comment ni quand elle se terminera, est la suivante : à qui donc profite la présence des forces armées syriennes et qui insiste pour son maintien ? Et à qui profiterait son départ ? L’exigence d’un départ des forces syriennes du Liban ou l’exigence de leur maintien sont-elles les reflets d’un souci légitime à l’égard de la souveraineté et de l’indépendance du Liban ? On est malheureusement forcé de constater qu’il n’en est rien et que des intérêts personnels et l’attachement à des gains politiques animent des personnalités appartenant aux deux groupes en question. C’est ainsi que lors de l’entrée des forces syriennes au Liban, en 1976, une partie des Libanais a accueilli cette décision et une autre s’y est opposée par les armes, estimant que cette intervention syrienne était à l’avantage d’un camp et au détriment d’un autre. Depuis 1992, les rôles se sont inversés, et les Libanais sont divisés en deux camps, l’un estimant que la présence syrienne au Liban est indispensable à la paix civile, l’autre que cette présence leur est défavorable, notamment lors des élections législatives, des présidentielles, de la formation des gouvernements et de l’attribution de portefeuilles ministériels. Il est donc facile d’en conclure que si la Syrie avait vraiment tenu à rester neutre, ou à être à égale distance de tous, les Libanais ne se seraient pas divisés si profondément sur sa présence et son rôle militaire au Liban. Il est évident, de ce fait, que ce n’est pas leur souci de la souveraineté qui anime ceux qui réclament le maintien au Liban des forces syriennes, pas plus que ceux qui en réclament le départ ne sont inspirés par le souci des intérêts supérieurs du Liban et de la Syrie. On est presque dans une situation identique à celle qui prévalait au Liban durant le mandat français. À l’époque, ceux qui trouvaient leur intérêt dans le maintien du mandat en réclamaient le maintien et ceux que ce mandat desservait en réclamaient la fin et le retrait des forces françaises du Liban. C’est à se demander si le jour viendra où tous les Libanais, indépendamment de leurs orientations confessionnelles ou politiques, seront d’accord pour placer l’intérêt supérieur du Liban au-dessus de toute autre considération et adopteront comme mot d’ordre celui de « Liban d’abord », comme les ont devancés certains autres pays arabes tout aussi stables que la Syrie et le Liban. Émile KHOURY
Les Libanais sont régulièrement placés devant l’alternative malheureuse d’avoir à choisir entre deux maux le moindre, se plaint cette instance religieuse. En 1969, lors de l’Accord du Caire, les Libanais qui s’y opposaient ont été placés devant le choix de l’accepter ou d’exposer le pays à une guerre libano-palestinienne.
La discorde fut quant même au rendez-vous,...