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Actualités - CHRONOLOGIE

EXPOSITION - Jusqu’au 22 octobre, au Goethe-Institut «Ré Soupault – photographies de 1934 à 1952»: redécouverte d’une belle œuvre (photo)

Le Goethe-Institut (Manara) présente, jusqu’au 22 octobre, un accrochage de photographies des années 1934 à 1952 signées Ré Soupault (1901-1998). En noir et blanc, des photos de reportages et d’autres tirées de son album personnel se mélangent sur les cimaises, à l’instar de sa vie et de son œuvre inextricablement liés. Épouse de Philippe Soupault, l’un des fondateurs du mouvement surréaliste parisien (il a écrit avec Breton Les champs magnétiques), Ré Soupault, de son vrai nom Erna Niemeyer, fut l’une des premières étudiantes, de 1921 à 1925, de la Bauhaus de Weimar. Dans cette école d’architecture et d’art fondée en 1919 par Walter Gropius, le corps enseignant était constitué de l’élite artistique de l’époque: Georg Muche, Wassily Kandinsky, Paul Klee, pour ne citer que quelques-uns, étaient ses professeurs. C’est cependant Johannes Itten qui marquera le plus l’élève Niemeyer, inscrite en spécialisation à l’atelier de tissage. «Johannes Itten m’a appris à voir», dira-t-elle plus tard. L’influence de son concept de l’art, idéaliste et éloigné de tout matérialisme, imprégnera les photos de Ré Soupault d’un fort impact sociologique et politique. Ses études bouclées, elle commence par travailler durant un an avec le cinéaste d’avant-garde Viking Eggeling et se marie avec le peintre et cinéaste Hans Richter, avec qui elle ne vécut que très peu de temps. Puis elle entame une carrière de journaliste de mode, avant de s’installer à Paris, en plein cœur de Montparnasse, où elle dirige, de 1929 à 1933, son propre atelier de mode. 1933 fut une année décisive dans son existence: elle rencontre Philippe Soupault, pour qui elle abandonne son studio de mode afin de le suivre au gré de ses déplacements de reporter. C’est par hasard et grâce à ce dernier qu’elle devint photographe et, plus tard, journaliste. En fait, elle commence à photographier pour des raisons pratiques. Journaliste à L’Excelsior et au Petit parisien, Philippe Soupault était souvent accompagné, lors de ses reportages et de ses voyages, par des photographes de presse dont les photos de routine ne le satisfaisaient pas. Sans compter que leur présence dérangeait le couple. Ré décide de prendre alors en charge elle-même l’illustration des articles de son compagnon. Elle achète un appareil photo en 1934 et se lance dans le métier. Bauhaus et surréalisme De New York aux Baléares, en passant par la Scandinavie, l’Espagne, la Tunisie..., elle sillonna avec son mari, caméra au poing, les quatre coins de la planète. Son style, imprégné des deux mouvements artistiques les plus influents de son temps, à savoir le Bauhaus allemand et le surréalisme français, privilégie le portrait et le fait humain et social à l’événementiel. À mi-chemin entre la photo souvenir et le photojournalisme, les clichés de cet artiste, malgré le calme apparent qu’ils dégagent, sont d’une grande intensité d’expression et délivrent souvent de forts messages politiques et sociaux. Dans la série de photos présentées au Goethe-Institut de Beyrouth, le sujet central s’appuie souvent sur la relation entre l’individu et la masse. Mis à part quelques paysages, les photographies de Ré Soupault se focalisent, d’une part, sur des masses humaines en mouvement et, d’autre part, sur de petites sensations individuelles, comme les musiciens de rue en pardessus et «borsalino», ou un mariage saisit sur le vif. Le «quartier réservé» de Tunis Mais ce sont sans doute les clichés pris dans le «quartier réservé» de Tunis qui sont les plus intéressants. Autant par leur sujet que par leur traitement esthétique: certains évoquent des peintures classiques. Ré, qui a vécu quelques années à Tunis, a pu, avec l’autorisation spéciale du cheikh de la médina, pénétrer dans ce ghetto où vivent des femmes rejetées par leurs maris ou chassées par leurs familles. Elles n’ont plus aucun droit et, devenues des êtres au niveau social le plus bas, elles sont obligées de gagner leur vie en mendiant ou en se prostituant. Avec une incroyable sensibilité, la photographe a su capter leur sentiment d’emprisonnement (femme derrière des barreaux de fenêtre) et ces contradictoires désirs de séduction et sensation de détresse, qui transparaissent dans la beauté ravagée de leur visage et leurs attitudes recroquevillées.... De très belles images tirées d’une œuvre photographique dense, mais qui ne fût reconnue qu’en 1988, lorsque trois volumes de ses photos furent édités et commentés dans la presse française et allemande. Une notoriété tardive qui s’explique sans doute par la modestie et le réel désintéressement de cette femme qui évolua pourtant toute sa vie parmi un cercle d’amis, artistes et photographes célèbres, comme Fernand Léger, Max Ernst, André Kertész, ou Man Ray... Zéna ZALZAL
Le Goethe-Institut (Manara) présente, jusqu’au 22 octobre, un accrochage de photographies des années 1934 à 1952 signées Ré Soupault (1901-1998).
En noir et blanc, des photos de reportages et d’autres tirées de son album personnel se mélangent sur les cimaises, à l’instar de sa vie et de son œuvre inextricablement liés.
Épouse de Philippe Soupault, l’un des...