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Actualités - OPINION

ÉCLaIRAGE Face à l’opération de charme du pouvoir, l’intransigeante et salutaire surdité de l’opposition

Hier, midi. À l’hôtel Commodore, les ministres, députés et hommes politiques prosyriens de première, deuxième et troisième catégorie ont eu l’intelligence, ou le bon sens, de réfléchir par deux fois avant que de réitérer contre Walid Joumblatt leurs fallacieuses, leurs drôlissimes et leurs désormais bien connues (et totalement prévisibles) accusations de traîtrise qui ne dupent plus personne. Ou bien leur a-t-il été suggéré d’amorcer une nécessaire, une vitale désescalade ; de multiplier sans ambiguïté des signes de bonne volonté, parce que le Liban et la Syrie sont observés au microscope à laser par la communauté internationale et attendus au tournant. Ils se sont donc abstenus de tirer à boulets rouges, comme cela avait été répété, sur un homme qu’ils accusent, en fait, de représenter, avec bien d’autres, et contrairement à la plupart d’entre eux, la grosse majorité des Libanais. Quoi qu’il en soit, c’est le respectable doyen de la Chambre, Kabalan Issa el-Khoury, qui a donné le ton, par Élie Ferzli interposé, à cause d’une méchante quinte de toux. Son discours, qui a été adopté en tant que communiqué final, s’est fait l’écho des mains tendues et retendues, tout récemment, par Émile Lahoud et Nabih Berry en direction d’une opposition nationale qu’ils estiment, sans doute, pathologiquement cyclothymique, et pensent qu’elle est capable de légitimer, en adhérant à un gouvernement d’« entente nationale », un état, une réalité, qu’elle a combattus et qu’elle continue de combattre, constitutionnellement et démocratiquement. Mais la volonté de calmer le jeu ne semble pas s’être arrêtée hier au Commodore. Les couloirs du régime bruissent ainsi de signes. La rencontre Berry-Hariri de mercredi aurait été particulièrement franche, et le Premier ministre aurait tout dit au président de la Chambre, même les erreurs que ce dernier, selon lui, a commises. Le maître de Koraytem aurait d’ailleurs fait la veille un crochet par Damas, où, dit-on, il a exposé une nouvelle fois tous ses griefs ; où, dit-on aussi, il lui a été indiqué que la page allait être tournée, et qu’il fallait qu’il en parle avec Nabih Berry. On évoque ainsi une démission de l’actuel cabinet le 4 octobre, et l’annonce du gouvernement le 10 du même mois. Un gouvernement de 30 ministres également, majoritairement technocrates, et qui auraient reçu l’exclusif aval des deux pôles de l’Exécutif et du tuteur syrien, sans clientélisme aucun. On murmure enfin que les mesures prises contre les partisans de Walid Joumblatt seraient sensiblement adoucies. Pourquoi tout cela ? Pourquoi tous ces signes extérieurs de richesse qui ressemblent à autant de miroirs aux alouettes ? Parce que le bras de fer entre la Syrie et la communauté internationale est à son climax, d’autant qu’il n’y a plus qu’une petite semaine avant la publication du rapport Annan sur le suivi de la 1559. Ces œillades et cette opération de drague tous azimuts seront-elles entendues ? Samir Frangié a été très clair : « Nous sommes entrés dans une période de transition entre l’amendement constitutionnel et la réalisation d’un nouveau règlement à trois niveaux : interlibanais, fondé sur le projet que nous élaborons ; libano-syrien, fondé sur le retrait de l’armée syrienne et l’établissement de relations diplomatiques entre le Liban et la Syrie ; et entre le Liban, la Syrie et la communauté internationale. La question (de la participation de l’opposition au) gouvernement n’est pas importante. Elle sera la traduction de ce changement historique si les choses évoluent. » Il s’est exprimé après un entretien avec le patriarche maronite, qui, après avoir appelé à l’établissement de relations diplomatiques entre Beyrouth et Damas, a évoqué la nécessité d’un gouvernement d’union nationale pour sortir le pays de la crise qu’il traverse actuellement. Une phrase que le pouvoir a récupérée et interprétée bien hâtivement, oubliant visiblement l’impressionnante sagesse du patriarche, son acuité politique, et tous les « oui mais... » pas encore dits à propos de cet éventuel cabinet. Oubliant aussi que l’opposition en faveur des libertés, de la Constitution et du système démocratique libanais est désormais supraconfessionnelle et supracommunautaire. Et qu’elle compte dans ses rangs, aux côtés d’hommes et de femmes dont le courage et la constance ne sont plus à prouver, un véritable et impressionnant fils à papa qui aurait préféré « être éboueur à New York que zaïm national au Liban ». En multipliant hier ses « non » de principe, Walid Joumblatt a fini de démontrer, malgré les médiations répétées de Rafic Hariri et de Hassan Nasrallah, qu’entre le pouvoir reconduit (dans son ensemble) et l’opposition, la surdité a été érigée par cette dernière en principe politique. En gage de crédibilité et d’intransigeance. À moins, peut-être, que ce pouvoir ne remplace, enfin, les paroles par des actes. Ziyad MAKHOUL
Hier, midi. À l’hôtel Commodore, les ministres, députés et hommes politiques prosyriens de première, deuxième et troisième catégorie ont eu l’intelligence, ou le bon sens, de réfléchir par deux fois avant que de réitérer contre Walid Joumblatt leurs fallacieuses, leurs drôlissimes et leurs désormais bien connues (et totalement prévisibles) accusations de traîtrise...