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Actualités - CHRONOLOGIE

Opposition Joumblatt : Aucune cohabitation, quelle qu’elle soit, avec Émile Lahoud

«En définitive, je préférerai être éboueur à New York plutôt que leader national au Liban. » C’est par cette formule pleine de verve – une volonté de dire qu’il aura vraiment tout fait, tout essayé – que le chef du PSP, Walid Joumblatt, a clôturé hier un entretien mémorable sur la LBCI, non sans avoir multiplié les références intellectuelles, les messages politiques dans toutes les directions, et, surtout, les accusations graves et autres allusions virulentes impliquant tous les symboles du régime, qu’il a tournés un par un en dérision : Adnan Addoum, Moustapha Hamdane, Élias Murr, Karim Pakradouni... Il n’a pas hésité à qualifier la garde présidentielle de « Brigades de défense », estimant que c’était « à ces personnes qu’il fallait imputer la responsabilité du tabassage des étudiants le 9 août 2001 devant le Palais de justice ». « Mais nous savons quel est le sort des Brigades de défense », a-t-il indiqué. Il a, dans le même cadre, exprimé des doutes sérieux vis-à-vis du simili-attentat manqué de l’ambassade d’Italie, auquel il a « du mal à croire, et qui est un montage ». Joumblatt a réexprimé hier toutes les constantes de son discours politique, martelant à plusieurs reprises qu’« aucune cohabitation, quelle qu’elle soit, n’est et ne sera possible avec Émile Lahoud », rappelant qu’il s’était déjà opposé à « l’élection du militaire Émile Lahoud » à la présidence en 1998. Et que la rupture ne pouvait plus qu’être inévitable et définitive depuis le vote du code de procédure pénale en août 2001 à la Chambre. Le chef du PSP a insisté sur le fait qu’il n’entrera pas au gouvernement pour « légitimer un pouvoir anticonstitutionnel et illégitime ». « D’ailleurs, demain commence la période constitutionnelle pour l’élection d’un président », a-t-il lancé, avec un air de défi, en réponse au chef des Kataëb. Soulignant, au passage, qu’il accuse « le pouvoir stupide » d’avoir impliqué Beyrouth et Damas dans la crise internationalisée de la prorogation. « Tout ce que j’essaye de faire actuellement, c’est de donner des solutions pour sortir le Liban et la Syrie de l’impasse, pour éviter les pressions internationales, pour qu’on ne dise pas, à l’extérieur, que le Liban est un pays satellite et qu’il y a une tutelle syrienne sur le pays », a-t-il dit, se référant en permanence à Taëf. « C’est la classe politique libanaise qui a provoqué l’ingérence sécuritaire syrienne à tous les niveaux. C’est nous qui avons conduit les officiers de l’armée syrienne à intervenir. Or les relations bilatérales ne doivent pas passer uniquement par le fil sécuritaire. Cette ingérence est honteuse pour nous deux », a-t-il dit. Avant de poursuivre : « Ces ingérences des services syriens résultent du fait qu’à Baabda il y a un président qui ne reconnaît pas Taëf. Il n’est pas normal que Rustom Ghazalé soit obligé de mener des médiations pour qu’on laisse Hariri élaborer l’ordre du jour du Conseil des ministres ! » Le chef du PSP a également dénoncé la « mafia commune » entre les deux pays et « les gangs » qui gouvernent au Liban, évoquant « l’affaire de la banque al-Madina, du Casino ou du fuel », et même « l’existence d’une boîte noire chez Riad Salamé à la BDL. Salamé à qui l’on aurait promis de devenir bientôt ministre des Finances ». Joumblatt a par ailleurs rappelé « les sacrifices consentis par la Syrie au Liban », précisant très clairement qu’il ne recherche aucun antagonisme avec la Syrie, mais refusant de répondre aux accusations de trahison lancées par certains « gamins » qui remettent en cause son appartenance arabe. « Quoi qu’il en soit, je suis prêt à évoquer cette question avec le président Bachar el-Assad, et, s’il le faut, à être jugé à Damas. » Une manière de dire qu’il ne traitera qu’avec Damas de cette affaire, et qu’il ne répondra pas aux critiques des prosyriens. Rien de bien neuf en gros, si ce n’est le parti pris clair et apparemment irrévocable du leader druze pour un Liban « pluriel, indépendant, démocrate et arabe », aussi loin que possible du modèle de l’État sécuritaire et du règne des services de renseignements. Il a répété dans ce cadre son attachement à sa formule du Bristol : « Si je sors du Liban pluriel, je suis fini. » Le Liban pluriel, qui est « une valeur ajoutée à la Syrie », a-t-il martelé. « Qu’ils respectent notre système, nous respectons le leur », a-t-il dit au niveau des relations libano-syriennes, citant le testament de Kamal bey, qu’il a dû « oublier durant la guerre pour prendre les armes ». Mais « je ne tuerai pas Kamal Joumblatt une deuxième fois ». Et de répondre dans le même ordre d’idées, à un citoyen syrien qui, par téléphone, prétendait que « ces positions servaient les intérêts de l’opposition chrétienne acquise au projet impérialiste et sioniste » : « Je ne vous permettrai pas de vous en prendre à une grande partie de l’opposition libanaise. Le Liban est un pays pluraliste, arabe et démocrate, et il doit le rester. Il y a des gens au Liban qui n’aiment pas la Syrie, ils sont libres. Il y a des gens qui aiment la Syrie, et ils sont tout aussi libres. Allez demander chez vous en Syrie qui a mis au point le piège de la prorogation. » Il a surtout rappelé que, désormais, ses amis politiques étaient les opposants du Bristol, « qui ne me suivent pas, mais avec qui je me retrouve, pas nécessairement sur tout », mais avec lesquels il tente de trouver une plate-forme commune. Walid Joumblatt ira donc jusqu’au bout de son opposition à ce régime. « Je ne vais pas finir comme certains, achetés par les carrières et le Casino », a-t-il ajouté. M.H.G.
«En définitive, je préférerai être éboueur à New York plutôt que leader national au Liban. » C’est par cette formule pleine de verve – une volonté de dire qu’il aura vraiment tout fait, tout essayé – que le chef du PSP, Walid Joumblatt, a clôturé hier un entretien mémorable sur la LBCI, non sans avoir multiplié les références intellectuelles, les messages...