Rechercher
Rechercher

Actualités - REPORTAGE

Ce qu’ils en pensent - Sit-in des médecins

Pour la première fois, les médecins ont décidé d’agir. Sur l’impulsion du nouveau président de l’Ordre, le Dr Mario Aoun, un sit-in de trois heures est prévu aujourd’hui à Bayt al-Tabib (Maison du médecin), à Tehwita. Il s’agit essentiellement de protester contre les agissements de la CNSS et d’essayer d’améliorer les conditions de travail des médecins, considérés par une grande partie de la population comme des privilégiés, alors que, selon le conseil de l’Ordre, ils seraient plutôt victimes de l’absence d’une politique de santé claire au niveau de l’État. D’ailleurs, le président de l’Ordre des médecins a refusé de prendre part à la réunion qui était prévue hier avec les représentants de la CNSS. Il s’agissait pour lui d’adresser, d’abord, un message fort aux instances concernées avant d’entamer tout dialogue... Nous lui avons demandé d’expliquer sa démarche. Mario Aoun, président de l’Ordre des médecins Q : Le médecin ayant d’abord une mission humanitaire a-t-il le droit de faire la grève et de participer à des sit-in ? R : « Il ne faut pas se cacher derrière le fait que la médecine est un métier humanitaire pour oublier que ceux qui la pratiquent ont des revendications. Ce genre d’arguments ne porte plus. De plus, les médecins n’ont pas de patrons. Ils doivent plutôt avoir des partenaires, dont la CNSS. En organisant un sit-in (et non pas une grève), nous avons voulu faire bouger les choses et rectifier la relation entre les médecins et le partenaire qu’est la CNSS. Il s’agit donc d’un simple avertissement. Par la suite, le 16, nous serons prêts à discuter d’une manière sérieuse et rationnelle. Mais à mon sens, il fallait d’abord passer par cette action pour pouvoir ouvrir un dialogue utile. » Q : Votre problème est-il uniquement avec la CNSS ? R : « Nous avons aussi des problèmes avec les compagnies d’assurances, les hôpitaux et le ministère de la Santé. Ce qu’il faut, c’est élaborer une politique globale de santé ou revoir celle qui est actuellement en vigueur et qui ne correspond plus aux besoins actuels. En fait, aujourd’hui, nul n’est content. Ni les assurés, ni les assureurs, ni les hôpitaux, ni la CNSS qui ne cesse de se plaindre de son déficit dû à ce que lui doit l’État. Notre action sera donc bénéfique aux malades et à toutes les parties concernées. Il est temps de briser le cercle vicieux. D’autant que, jusqu’à présent, toutes les tentatives de dialogue ont échoué et n’ont été qu’une perte de temps. Nous avons donc voulu nous attaquer au contentieux avec la CNSS, qui assure un million et demi de citoyens en nous disant qu’une fois ce dossier réglé, le reste sera plus facile. » Q : Selon vous, combien de médecins doivent-ils participer au sit-in pour que celui-ci soit une réussite ? R : « Sur les 9 100 médecins inscrits à l’Ordre, beaucoup exercent dans les régions. Personnellement, je m’attends pourtant à une vague déferlante de médecins pour participer au sit-in d’aujourd’hui, de 9h à 12h. Si 2 000 médecins viennent à Bayt al-Tabib, je crois que nous aurons amplement atteint nos objectifs. Nous aurons adressé un message fort et clair à qui veut l’entendre. Les médecins souffrent et vivent une situation dégradante. Il est temps que cela change, et ceux qui ont voté pour moi aux dernières élections du conseil de l’Ordre avaient justement opté pour le changement et contre une politique stagnante. » Q : Justement, vous aviez promis d’ouvrir des dossiers épineux, notamment celui de Bayt al-Tabib... R : « Donnez-moi un peu de temps. La commission chargée de l’enquête sur ce dossier doit rendre son rapport le 10 octobre. On verra alors ce qu’il en sera. Mais je vous assure que je tiens toujours mes promesses. Même si je préfère avancer pas à pas. » Amine Haddad, chef du service d’ORL à l’Hôtel-Dieu Q : Comptez-vous participer au sit in d’aujourd’hui et pensez-vous que cette action est justifiée ? R : « Je vais sûrement participer au sit-in d’aujourd’hui. Je pense que c’est une démarche qui peut, dans l’absolu, être jugée peu digne d’un Ordre des médecins, mais comme le dialogue entre les intervenants de santé, les médecins d’une part et la CNSS d’autre part, n’est pas sain, elle devient justifiée. Je dirais même que dans un pays où tout est politisé, le sit-in des médecins est peut-être leur seul recours. » Q : Pourtant une réunion avait été proposée par la CNSS hier et c’est l’Ordre qui l’a refusée... R : « Peut-on m’expliquer comment la réunion a été justement proposée à la veille du sit-in alors que la crise dure depuis des années ? Je crois que l’explication est simple : la proposition est venue lorsqu’on a vu l’étendue de l’adhésion des médecins à l’action du conseil de l’Ordre. C’est peut-être le seul trait d’union entre les médecins, mais il est efficace. » Q : Le malade ne risque-t-il pas de faire les frais d’une telle action de la part des médecins ? R : « Je ne le crois pas car, à mon avis, le malade paye déjà les frais de la situation actuelle, à cause justement de la mauvaise gestion de la CNSS. Celle-ci est un géant paralysé et improductif qui n’est pas à la hauteur des besoins du pays. Elle prend des mesures humiliantes pour les malades et pour les médecins, parce qu’elle ne peut pas mettre de l’ordre et gérer ses propres prestations. Demandez à un malade comment il parvient à faire ses formalités auprès de la CNSS. Quand on pense aussi que toutes les grandes entreprises ont un employé à plein temps chargé uniquement des formalités auprès de la CNSS, on a une idée de la complexité de ces formalités. En menant cette action, les médecins veulent faire bouger les choses et modifier une situation mauvaise pour eux et pour les malades. À cause de son incapacité à faire le tri et à classer les médecins tout en sanctionnant ceux qui ne font pas bien leur travail, la CNSS multiplie les mesures humiliantes pour tout le monde et s’enfonce dans l’inefficacité. Il est temps que cela change. » Scarlett HADDAD


Pour la première fois, les médecins ont décidé d’agir. Sur l’impulsion du nouveau président de l’Ordre, le Dr Mario Aoun, un sit-in de trois heures est prévu aujourd’hui à Bayt al-Tabib (Maison du médecin), à Tehwita. Il s’agit essentiellement de protester contre les agissements de la CNSS et d’essayer d’améliorer les conditions de travail des médecins,...