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Actualités - REPORTAGE

« Allahland » a remplacé « Fatehland » à la frontière

Sans occulter ou oublier les facteurs « traditionnels » internes ou externes, qui ont conduit à la guerre, Élias Atallah estime que la fougue estudiantine a précipité le pays vers les événements que l’on sait. Et pour cause, il existe en toile de fond un clash entre le traditionnalisme et la modernité, et le réformisme, symbolisés par la jeunesse et la classe politique : « La classe politique a eu peur de la vague de modernité qui déferlait sur le pays. Les élections de l’UL étaient aussi importantes que les législatives. Les étudiants ont même joué un rôle important dans le renversement du gouvernement Salam. » « L’expérience au sein des universités était démocratique. Il n’y avait quasiment pas de clash entre la droite et la gauche. L’alternance était démocratique. Même nos programmes respectifs nétaient pas très différents. Et puis on est tombé dans la guerre. » « Le manque de conscience des problèmes politiques au niveau estudiantin a joué un rôle certain dans le début de la guerre. Le facteur étranger est venu se greffer sur la fin, s’infiltrer avec, en filigrane, le facteur palestinien. Nous avons commencé à lire dans les journaux des articles sur les Tigres du PNL et la lutte armée palestinienne. Nous vivions trop dans notre monde, dans les cercles estudiantins, pour nous rendre compte de ce qui se passait », dit-il. Élias Atallah aborde longuement le dossier de la guerre, dans tous ses aspects, répartissant les responsabilités, expliquant minutieusement les causes et les conséquences. La guerre est pour lui le prolongement direct de son expérience estudiantine. Il défend au passage Kamal Joumblatt et ses options nationales : « Il a été très clair dans sa définition de l’arabité. Il a réussi à joindre l’art et le politique. Il n’était pas pragmatique, ni obsédé par le pouvoir. Il a réellement essayé d’éviter la guerre, proposant des compromis, établissant le dialogue avec Béchir et avec Camille Chamoun. Il a tenté de brider le chaos palestinien. Sa perte a fait perdre à la gauche beaucoup de son identité. » « Ce n’est pas Joumblatt qui a conclu les accords du Caire. Ces accords ont été le fruit de la crainte du régime libanais de payer le prix du confli israélo-arabe. Au lieu de protéger ses frontières, il a conclu un compromis avec les régimes arabes. Il aurait dû envoyer l’armée à la frontière pour la protéger. Et la même expérience se répète. Il y avait “Fatehland”, et maintenant c’est au tour de “Allahland”. Et tout est la faute du régime, qui n’a rien appris depuis. Le but étant d’éviter de mêler l’armée à tout cela. Joumblatt rejetait une scission au sein de l’armée, tout comme il a rejeté la domination syrienne sur le Liban », dit-il. « L’État libanais est entré dans le conflit israélo-arabe clandestinement. En évitant de se mêler au conflit, il a fait entrer le Liban dans la guerre civile », affirme-t-il. « Il aurait pu jouer son rôle sans passer par la Syrie, ce qui est arrivé, ni par les Palestiniens, à qui il a laissé le contrôle de la frontière en vertu des accords du Caire », dit-il. « Si je pouvais revenir dans le passé, j’aurais tenté de déployer tous mes efforts pour trouver un consensus avec l’autre camp et éviter la guerre. Nous n’avons pas suffisamment essayé. J’aurais également tenté de garder le pouvoir de décision dans notre relation avec les Palestiniens. La révolution palestinienne s’est progressivement imposée à nous. » C’est ainsi que Élias Atallah fait son autocritique, en permanence – mais sans se départir de ses principes –, seule manière pour lui d’aboutir à une réconciliation nationale générale.
Sans occulter ou oublier les facteurs « traditionnels » internes ou externes, qui ont conduit à la guerre, Élias Atallah estime que la fougue estudiantine a précipité le pays vers les événements que l’on sait. Et pour cause, il existe en toile de fond un clash entre le traditionnalisme et la modernité, et le réformisme, symbolisés par la jeunesse et la classe politique :...