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Actualités - ANALYSE

analyse Au cours de sa rencontre avec Assad, Hariri aurait demandé un délai de 48 heures Pro et antireconduction confrontent leurs scénarios et le suspense épuise le pays

«The game is over. » Cette fois, ce n’est pas George W. Bush qui le dirait en s’adressant à Saddam Hussein, mais tous ceux, au Liban, qui prétendent être proches des cercles du pouvoir. Selon eux, il n’y aurait plus de doute, et les Syriens auraient pris leur décision en faveur d’une réélection du président Émile Lahoud. Ce qui semble certain en tout cas, c’est que les rebondissements se multiplient dans le feuilleton de la présidentielle et qu’ils plongent le pays dans un climat de fébrilité et de tension qu’il n’avait plus connu depuis longtemps. Des sources qui se disent bien informées précisent ainsi que si les autorités syriennes n’avaient pas pris leur décision, elles n’auraient pas demandé à rencontrer les présidents de la Chambre et du Conseil. Mais cela ne signifie pas qu’elles souhaitent l’imposer aux diverses parties, laissant à chacune d’elles la liberté de choix, selon ses intérêts ou ses convictions. À ce sujet, on croit savoir qu’au cours de ses entretiens, hier, avec les deux responsables libanais, le président syrien, Bachar el-Assad, aurait exposé les raisons pour lesquelles il pencherait personnellement pour la réélection d’Émile Lahoud. Avec Nabih Berry, le retour à « l’entente cordiale » L’entretien avec Nabih Berry, le premier depuis cinq mois, aurait été l’occasion d’effacer le froid qui avait entaché les relations du régime syrien avec celui qui était considéré comme un allié privilégié. Nabih Berry avait déjà donné plusieurs signaux en direction de Damas et, lors de l’entretien avec Assad, hier, qui a abordé aussi la situation en Irak et à Najaf en particulier, il a probablement pu comprendre la position de la Syrie et ses considérations stratégiques. Avec le président du Conseil, le contact était plus ardu. Le froid s’est installé depuis longtemps entre Rafic Hariri et le régime syrien, et le contentieux porte sur de nombreux dossiers. La rencontre, impossible à éviter dans les circonstances actuelles vu le rôle quasi incontournable du Premier ministre dans le scénario de l’élection présidentielle, a donc été réduite au minimum et le président Assad n’a reçu Hariri que pendant dix-huit minutes, selon les malades de la précision. Le temps nécessaire au chef de l’État syrien pour expliquer à son interlocuteur vers quel scénario vont ses préférences. Selon des sources bien informées, Hariri aurait répondu qu’il serait prêt pour les raisons stratégiques invoquées par le responsable syrien et si effectivement la majorité des ministres approuve la démarche à accepter de signer le décret de l’ouverture d’une session parlementaire extraordinaire, visant à permettre la tenue d’une séance plénière pour examiner un amendement de la Constitution en faveur de la réélection d’Émile Lahoud. Il souhaiterait toutefois ne pas tenir un Conseil des ministres dans ce but et se contenterait de signer le décret, à son bureau. Par contre, toujours selon les mêmes sources, il aurait exprimé ses réserves sur l’amendement en précisant qu’il pourrait ne pas voter dans ce sens, lors de la séance consacrée à cette procédure. Mais les sources précisent que Hariri n’aurait pas donné d’avis définitif, demandant deux jours de réflexion avant de se prononcer et pour tenter de convaincre ses alliés, notamment Walid Joumblatt. Le président syrien lui aurait souhaité bonne chance et l’entretien aurait été levé aussi rapidement qu’il aurait été mené. Des précisions importantes au menu de l’escale à Anjar Au retour, Hariri a fait une courte escale à Anjar, au siège du responsable des SR syriens au Liban, le général Rustom Ghazalé. Selon les informations recueillies, ce dernier aurait été un peu plus loin dans les explications, précisant au Premier ministre que, dans les circonstances actuelles, combattre Lahoud équivaudrait à combattre la Syrie et que celle-ci n’accepterait pas une interférence étrangère, américaine ou autre, dans le dossier libanais. Les milieux proches de Hariri n’ont pas voulu donner d’informations sur ces entretiens et sur la décision finale du Premier ministre, mais l’atmosphère générale serait à plus de compréhension de la position syrienne de la part de Hariri, qui, d’ailleurs, s’est rendu de Anjar à Clemenceau, au domicile de Walid Joumblatt, pour le mettre au courant des derniers développements. Le contentieux entre Joumblatt et la Syrie Pour le président du troisième bloc parlementaire, le leader du PSP, la situation est encore plus délicate. Des sources prosyriennes expliquent qu’après avoir été le premier à adopter une position mitigée à l’égard d’un éventuel amendement de la Constitution, allant même jusqu’à évoquer dans un discours public « le régime ancien et nouveau », il a, dans une de ses volte-face dont il a le secret, totalement modifié son attitude, augmentant sans cesse la dose de ses critiques, au point de se ranger aux côtés de ceux qui mènent une campagne féroce contre Lahoud. Entre lui et les autorités syriennes, il y aurait eu, ces dernières semaines, une série de malentendus et de quiproquos, qui ont alimenté la tension. Et quelques jours avant son rendez-vous prévu avec le président syrien, il a adopté des positions encore plus violentes, appelant à l’émergence d’une minorité parlementaire de blocage, poussant les dirigeants syriens à reporter son rendez-vous. De même, et sans doute pour les mêmes raisons, son dîner à Baabda, qui aurait dû avoir lieu hier soir, a été annulé, pour bien montrer que les autorités concernées n’apprécient pas son attitude. Les mêmes sources ajoutent toutefois que le problème de Walid Joumblatt reste soluble, l’homme étant après tout un allié fidèle de la Syrie qui est plus ou moins habituée à sa versatilité et à son langage, tout en lui reconnaissant de grandes qualités. D’ailleurs, selon les mêmes sources, des contacts sont entrepris depuis hier soir pour tenter de faire changer d’avis le leader du PSP, et certains de ses proches sont mis à contribution pour éviter toute escalade verbale. Un de ses ministres se serait même rendu à Anjar dans ce but. En attendant la fin du délai demandé par Rafic Hariri au président syrien et l’issue des contacts entrepris avec Walid bey dans les milieux parlementaires, le pointage va bon train. Munis de leur liste, les députés comptent et recomptent les voix en faveur du camp des reconductionnistes et de celui des antireconduction. Selon les estimations des loyalistes, l’amendement de la Constitution serait assuré d’obtenir entre cent trois voix et cent huit voix sur cent vingt-huit. Un avis que ne partagent pas les antireconduction, qui misent sur un revirement de dernière minute de plusieurs députés, s’ils voient que la bataille peut être menée. Mais les partisans de la reconduction estiment qu’un tel scénario est impossible, la grande majorité des députés refusant d’entrer en confrontation avec Lahoud, car elle sait pertinemment qu’après avoir appuyé le président sortant avec tant de détermination, les Syriens ne pourraient pas le lâcher. Car cela signifierait aussi qu’ils cèdent à des pressions internes et signeraient ainsi la fin de leur grande influence au Liban. Des pronostics, des analyses, il y en a donc des tonnes ces temps-ci, dans tous les sens et selon tous les désirs, alourdissant encore plus un climat déjà suffisamment pesant. Heureusement, le suspense ne devrait pas se prolonger au-delà de quelques jours. Quelle que soit l’issue de cette bataille qui aurait pu être évitée, elle ne pourra pas, cette fois, se terminer à la libanaise, sans vainqueurs ni vaincus. Scarlett HADDAD


«The game is over. » Cette fois, ce n’est pas George W. Bush qui le dirait en s’adressant à Saddam Hussein, mais tous ceux, au Liban, qui prétendent être proches des cercles du pouvoir. Selon eux, il n’y aurait plus de doute, et les Syriens auraient pris leur décision en faveur d’une réélection du président Émile Lahoud. Ce qui semble certain en tout cas, c’est...