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Actualités - REPORTAGE

Ce qu’ils en pensent - LE COMMUNIQUÉ « CENSURÉ » DES MUFTIS

D’une maladresse – involontaire ou non – rare, l’affaire du paragraphe retiré in extremis du communiqué conjoint élaboré par le mufti Kabbani et le vice-président du Conseil supérieur chiite a provoqué une vague de réactions dans la presse. Elle arrive en tout cas à point nommé pour ajouter de l’eau au moulin des anti-prorogation ou renouvellement. Qui a donc exercé des pressions sur les dignitaires religieux musulmans pour les pousser à retirer le paragraphe recommandant le respect la Constitution en ce qui concerne l’élection du chef d’État ? Ce n’est pas auprès du vice-président du conseil chiite, cheikh Abdel Amir Kabalan, qu’on aura une réponse à cette question. Car, pour lui, il n’y a pas eu de pressions. Cheikh Abdel Amir Kabalan, vice-président du Conseil supérieur chiite Q : Qui a exercé des pressions pour que vous retiriez du communiqué final le paragraphe concernant la présidentielle ? R : « Personne, absolument personne. D’ailleurs, si on avait exercé des pressions sur moi, cela m’aurait poussé à faire le contraire de ce qui m’est demandé. Vous savez que je ne crains personne et que je dis toujours ce que je pense. » Q : Pourquoi, dans ce cas, avoir retiré le fameux paragraphe ? R : « Nous avons agi de notre propre initiative, parce que cette affaire nous a semblé trop délicate, avec une coloration confessionnelle. Et, après tout, l’amendement de la Constitution et l’élection présidentielle sont du ressort des députés. C’est à eux que revient la responsabilité du choix. Ils peuvent agir selon ce que leur dictent leur conscience et l’intérêt national. Nous autres, nous avons préféré éviter de nous mêler de cette affaire, puisque d’autres en ont la charge. C’est donc aux députés de se prononcer. Nous ne sommes contre personne, ni contre le président Lahoud ni contre les autres. Tous sont des frères maronites et l’affaire les concerne en premier lieu. D’ailleurs, je crois que dès leur naissance, on plonge les nouveau-nés maronites dans une bassine présidentielle en leur faisant miroiter cette possibilité. C’est donc un sujet qui les concerne en premier lieu. Nous appuierons toute personne qui sera choisie par les députés. Et, à nos yeux, c’est l’intérêt du pays qui prime. » Q : C’est quasiment un renversement de situation : les dignitaires religieux musulmans qui refusent de se mêler de politique et les religieux chrétiens qui prennent position. Comment expliquez-vous ce phénomène ? R : «Comment pouvez-vous dire une telle chose ? Le patriarche maronite, Mgr Sfeir, est un recours religieux et politique chez les maronites. Ils n’en ont d’ailleurs pas d’autres. Et tout ce qu’il dit dans ce domaine est adopté par toute la classe politique. C’est lui qui fixe les plafonds et la ligne à adopter. » Q : Mais depuis quand les dignitaires religieux musulmans refusent de se prononcer sur des sujets politiques ? R : « Nous sommes des personnalités mues par les considérations nationales et l’intérêt du pays. Nous sommes aussi des hommes libres et nous choisissons nous-mêmes les thèmes dont nous voulons parler. Nous préférons donc faire de la politique au service de la religion et du pays et mettre aussi la religion au service du pays pour assainir la politique et l’élever. Dans ce cas précis, nous avons pensé qu’il s’agissait d’une affaire qui doit concerner les députés et ils sont capables de faire le choix qui convient au pays. Il n’était donc pas nécessaire que nous donnions une opinion plus détaillée sur la question. » Q : Une dernière question sur ce qui se passe au sein de la communauté chiite. Des réunions et des contre-réunions, pour quelle raison ? R : « Toutes ces réunions sont le signe du dynamisme de la communauté. Les forces vives bougent dans le but d’améliorer leur participation à la vie du pays et sa cohésion interne. Il n’y a pas eu de réunion et de contre-réunion. À Tyr, il s’agissait d’une rencontre sociale et à Nabatiyé, les élites se sont réunies pour se trouver un rôle. En ce qui concerne le Conseil supérieur chiite, il est au service de tous les chiites et travaille pour le Liban. » Marguerite Farhat, employée de banque Q : D’après vous, y a-t-il eu des pressions pour que les dignitaires religieux musulmans retirent le paragraphe sur la présidentielle ? R : « J’en suis quasiment sûre. Et c’est bien dommage. Car c’est l’une des rares fois que les Libanais, toutes confessions confondues, semblaient d’accord sur une question aussi fondamentale que la présidentielle. C’est justement cette unité que l’on a voulu briser en exerçant des pressions sur les dignitaires religieux musulmans. À mon avis, cela a été d’une grande maladresse, car le résultat est contraire à celui escompté par ceux qui ont voulu le retrait du paragraphe. En tout cas, les dignitaires religieux musulmans ont raté une bonne occasion de prendre une position qui rapproche les communautés et qui leur permet d’être sur la même longueur d’onde que le patriarche maronite. C’est en tout cas une affaire bien complexe... » Scarlett HADDAD


D’une maladresse – involontaire ou non – rare, l’affaire du paragraphe retiré in extremis du communiqué conjoint élaboré par le mufti Kabbani et le vice-président du Conseil supérieur chiite a provoqué une vague de réactions dans la presse. Elle arrive en tout cas à point nommé pour ajouter de l’eau au moulin des anti-prorogation ou renouvellement. Qui a donc...