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Spéculations effrénées sur les motivations d’Assad

Les salons politiques bruissent de rumeurs et de spéculations sur cette initiative inattendue que sont les concertations auxquelles procède le chef de l’État syrien en vue de la présidentielle libanaise. S’agit-il d’un simple sondage d’opinions ? Ou d’une procédure semblable aux consultations parlementaires contraignantes effectuées avant la désignation d’un chef de gouvernement ? Les avis exprimés seront-ils pris en compte ? Une seule chose devient assez claire. Quand il avait invité les Libanais à s’exprimer, ce n’était pas pour leur laisser le choix ou carte blanche. Mais pour forger sa propre décision en base des points de vue recueillis. La libanisation évoquée à ce propos montre donc ses limites. En tout cas, avant le rendez-vous de Damas, 45 députés, soit plus que le tiers de blocage, ont fait savoir qu’ils sont catégoriquement opposés à l’amendement de l’article 49 C (Constitution). Qu’ils veulent une élection en règle, dans le respect de la loi fondamentale comme du principe démocratique de l’alternance. Quinze autres ont indiqué être du même avis, mais en privé. Car ils attendent, de leur propre aveu, les directives de la Syrie. En face, 25 députés se rangent aux côtés des lahoudistes. Le reste, 43 députés, se cantonne dans le mutisme. Ces attentistes peuvent faire pencher la balance dans un sens ou dans l’autre. Presque certainement à la lumière des options syriennes. Sur lesquelles, répétons-le, les spéculations battent leur plein. Si le président Assad se contente d’écouter, sans émettre d’avis, donc sans influencer ses auditeurs, il devrait réaliser que normalement l’amendement de l’article 49 n’est pas réalisable. Puisqu’il existe pour le contrer un tiers parlementaire de blocage. Mais dans ce groupe, il faut le souligner, beaucoup sont perméables aux suggestions syriennes. Et pourraient à tout moment changer leur fusil d’épaule, si on le leur demande. De plus, parmi les pôles consultés, certains laisseraient courtoisement au président Assad le soin de se prononcer à leur place. Comme d’autres l’avaient fait avec le président Lahoud, lors de son avènement, pour la désignation d’un Premier ministre. Il reste à savoir si l’on va tenir compte de l’opinion publique. La majorité des Libanais est pour l’élection d’un nouveau président de la République. C’est d’ailleurs une tradition, car jamais la population ne s’est montrée favorable à la reconduction, le long des nombreuses tentatives effectuées dans l’histoire. À leur décharge, il convient de souligner que la plupart des personnalités que le président Assad a rencontrées jusqu’à présent l’ont mis en garde contre les effets négatifs d’un amendement de la Constitution en vue de la reconduction. En soulignant que la révision ne doit pas se faire à des fins particulières, mais seulement quand l’intérêt national bien compris y trouve son compte. Mais, prudence oblige, la plupart de ces pôles ont également indiqué qu’ils seraient compréhensifs. Au cas où le président syrien, en base de données régionales ou internationales dont il dispose, estimerait que l’amendement est souhaitable. Les intéressés pensent se défausser de la responsabilité sur le président syrien. Ils n’exprimeraient pas leurs convictions, en adoptant l’amendement, mais le feraient par complaisance, pour ne pas dire sous la contrainte. Dès lors, certains se demandent pourquoi le chef de l’État syrien voudrait assumer la responsabilité de la reconduction contre la volonté manifeste de la majorité des Libanais. Et contre la volonté de la communauté internationale, Occident en tête. Pourquoi, ajoutent-ils, voudrait-il prendre le risque d’un prix élevé à payer. Alors qu’il ne manque pas de solutions aussi avantageuses, sinon plus. En effet, beaucoup de candidats potentiels bénéficient de qualités ou de qualifications qui leur valent sans aucun doute la confiance de la Syrie. Il serait d’ailleurs étonnant, et même un peu outrageant pour la Syrie, qu’elle n’ait au Liban, parmi les présidentiables maronites, personne d’autre que le président Lahoud sur qui elle puisse compter. Malgré les impressions qui ont filtré à travers diverses prises de position successives aux consultations de Damas, l’un des pôles confirme que pour le fond, toutes les options restent ouvertes. C’est-à-dire que ni la reconduction ni l’élection d’un nouveau chef de l’État n’ont encore été décidées. On en saura cependant un peu plus, peut-être, quand le président Assad aura vu les présidents Berry et Hariri. S’il discute avec eux de l’ouverture d’une session extraordinaire de la Chambre, cela voudrait dire que l’on envisage l’amendement. Mais dans ce cas précis, il n’est pas exclu que le président Hariri prie le chef de l’État syrien de l’exempter d’une telle mission. Et l’informe qu’il compte démissionner. Il n’est pas exclu que le président Hariri accepte quand même la session extraordinaire, en misant sur un tiers parlementaire de blocage. Certes, le pari paraît risqué a priori. Mais dans le fond, le défaut de quorum pourrait être favorisé en sous-main. Parce que de la sorte, la Syrie aurait montré au régime en place qu’elle a tout fait en faveur de la reconduction, mais n’a pas réussi. Il ne pourrait pas lui en vouloir. Et l’on passerait à l’élection d’un nouveau président. Qui aurait sans doute la bénédiction du président Lahoud, c’est-à-dire qui lui serait plutôt proche politiquement. Émile KHOURY
Les salons politiques bruissent de rumeurs et de spéculations sur cette initiative inattendue que sont les concertations auxquelles procède le chef de l’État syrien en vue de la présidentielle libanaise. S’agit-il d’un simple sondage d’opinions ? Ou d’une procédure semblable aux consultations parlementaires contraignantes effectuées avant la désignation d’un chef de...