Vie politique - Sonnette d’alarme à l’Est Résurgence des inquiétudes sur la viabilité même de Kornet Chehwane

Pour certains pôles de Kornet Chehwane, les résultats des municipales incitent à une profonde réflexion, assortie d’une bonne dose d’autocritique. Ils proposent donc qu’une réunion leur soit consacrée dans les meilleurs délais. Aux fins de prévenir la répétition des dérives lors des échéances électorales ultérieures. Le fait est que là où l’opposition a su rester unifiée, elle l’a emporté. Et que, dans le même ordre d’idées, elle a perdu là où elle s’est montrée divisée. Au niveau des municipales, estiment ces cadres, le général Michel Aoun a placé la barre trop haut. En refusant obstinément toute alliance avec des candidats relevant du pouvoir. En pratique, ajoutent-ils, cela a empêché la constitution de listes fortes à noyau opposant, prenant en compte les spécificités, familiales ou autres, des agglomérations, villes, bourgades ou villages. Mais pour les professionnels, il devient par trop clair qu’à chaque épreuve électorale, Kornet Chehwane manifeste un manque flagrant de cohésion. Une fois de plus, ce n’est pas la première, la question de sa survie se pose. Et pour certains, ce n’est même qu’une affaire de temps. Un observateur averti note, à ce propos, que la Rencontre, comme son nom même l’indique, n’est ni un parti ni un front véritable. Mais un assemblage de formations et de personnalités. Dont le regroupement dégage une solide assise populaire quand il entreprend d’agir pour servir les principes qui fondent les constantes nationales. Par contre, et tout naturellement, quand les pôles adoptent des positions distinctes par rapport à des questions déterminées, c’est la faiblesse assurée, car il n’y a tout bonnement plus de Rencontre. La preuve par neuf en est apportée par les municipales. Selon ce politicien, Kornet Chehwane doit se ressaisir immédiatement. Parce qu’on est aux portes d’une échéance capitale, la présidentielle. Un tournant crucial pour les fondements idéologiques comme la souveraineté, l’indépendance et le pouvoir de décision libanaise autonome. Sans compter le grave problème de la récession économique. Si les divergences, les conflits qui ont pris corps à l’occasion des municipales devaient se répéter, la Rencontre irait à la bataille en ordre dispersé. Ainsi disloquée de fait, ses membres auraient à assumer une lourde responsabilité vis-à-vis de la frange populaire qu’ils défendent. Et qui subirait de nouveaux préjudices, bien plus considérables que ceux causés par les municipales. En se retrouvant, en fait, sans catalyseur. Or, poursuit cette personnalité, a priori la présidentielle présente encore plus de risques de déchirements au sein de Kornet Chehwane que toute autre échéance. Tout d’abord, ses membres peuvent se dissiper sur le choix d’un candidat unique, meilleur moyen de défendre les couleurs de l’Est. La solution, dans ce domaine précis, serait d’établir une liste et de prévoter. Mais, bien entendu, une telle règle de jeu ne peut être établie, et suivie, que si Bkerké met son poids dans la balance. Ensuite, dans le même contexte, il est à craindre que les rivalités des présidentiables appartenant au groupe, ou proches de lui, ne conduisent ceux qui auraient été écartés à se rabattre, par dépit, sur la reconduction (du mandat Lahoud) qu’ils appuieraient à fond. Un ralliement dont les reconductionnistes tireraient le meilleur profit, en le présentant comme un argument d’adhésion de la partie chrétienne aux yeux des grands électeurs régionaux ou internationaux. En tout état de cause, souligne cette personnalité, si Kornet Chehwane ne parvient pas à faire élire le présidentiable de son choix, il y a fort à gager que cela serait le début de son effritement. Comme cela s’était passé avec le Helf tripartite quand il n’avait pas réussi à faire passer son candidat propre à la présidentielle de 1970. La dissolution de la Rencontre pourrait donc survenir avant même les législatives de l’an prochain. Qui sonnerait la déroute de l’opposition, c’est-à-dire des espoirs d’un changement positif dans ce pays. Émile KHOURY