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Actualités - interview

Interview - La République tchèque a de tout temps fait partie de l’Europe, affirme son président Vaclav Klaus : Chaque pays européen doit avoir sa propre politique étrangère

En visite au Liban au surlendemain de l’accession de son pays à l’Union européenne, le président de la République tchèque, Vaclav Klaus, affirme que la politique étrangère de son pays ne doit pas nécessairement s’aligner sur celle des autres membres de l’Union, soulignant qu’il s’oppose à l’idée d’avoir une seule et même voix au plan international. La présence de la République tchèque en Irak est symbolique, estime M. Klaus, qui reste par ailleurs convaincu que le partenariat euro-méditerranéen ne sera pas remis en question avec l’accession de 10 nouveaux membres à l’Union. Ces derniers, dit-il, sont beaucoup plus « sensibles » aux problèmes des pays en transition que les anciens membres de l’UE. Les réponses du chef de l’État tchèque aux questions de « L’Orient-Le Jour » et du « Nahar ». Q. : - La République tchèque vient de rejoindre l’Union européenne et elle continue de soutenir la politique de Washington en Irak. Comment pouvez-vous expliquer cette position et pensez-vous redéfinir votre politique étrangère après votre accession à l’UE, sachant que vous êtes également membre de l’Otan ? R. : - Je ne pense pas qu’il existe actuellement une politique étrangère commune au sein de l’Union. Il y a énormément de discussions sur la nécessité d’avoir une politique étrangère unifiée. Je fais d’ailleurs partie des responsables politiques qui sont opposés à l’idée d’avoir une seule et même voix au plan international. Il y a des différences substantielles entre les 25 pays membres et par conséquent, je préfère que notre pays ait sa propre politique étrangère. Pour ce qui est de notre position en Irak, il faut savoir que nous ne sommes pas impliqués militairement dans ce pays. Nous avons envoyé un hôpital militaire et nous aidons à former les policiers irakiens, sans plus. Nous n’avons jamais envoyé de soldats. Notre position est claire par rapport à l’Irak et à ce que nous faisons là-bas. Je ne vois pas le besoin de proclamer une nouvelle politique étrangère ni de définir une nouvelle orientation à ce niveau. D’ailleurs, il n’y a aucun rapport entre notre appartenance à l’Union et notre position par rapport à l’Irak. Il en est de même pour les autres pays européens qui ont des positions très divergentes sur ce problème, notamment parmi d’anciens membres. Q. : - Est-ce que l’entrée des 10 nouveaux membres signifie la « fin de l’Europe » comme l’affirmait récemment un journal américain ? R. : - Évitons de parler de « l’élargissement ou de la fin de l’Europe », qui est une erreur (sémantique). Nous n’avons pas accédé à l’Europe il y a deux jours seulement. Nous avons toujours fait partie de ce continent géographiquement, culturellement et du point de vue des valeurs que nous partageons avec nos voisins européens, et ce même durant les temps les plus noirs du communisme. Prague est aussi européenne que l’Espagne et l’Italie. La République tchèque ne fait pas partie de l’Est. Pendant quatre décennies, notre pays a été dans la sphère d’influence de l’URSS et nous faisions donc partie de cet empire. Mais nous n’avons aucune relation avec les cultures et traditions de l’ensemble soviétique. Nous venons d’accéder à l’Union européenne et non à l’Europe. La question se pose donc en termes de capacité des institutions européennes à être fonctionnelles et efficaces, avec un nombre de plus en plus croissant de membres et non au plan de l’existence de l’Europe en tant que telle. Q. : - Quand pensez-vous pouvoir rejoindre la zone euro ? R. : - Ce sujet n’est pas actuellement à l’ordre du jour en République tchèque. C’est un processus qui pourrait prendre plusieurs années et je suis incapable de dire s’il aura lieu en janvier 2009, 2010, ou même en 2011. En ce qui nous concerne, ce serait une erreur du point de vue économique de rejoindre la zone euro maintenant, parce que cela nous coûterait très cher et nous n’avons pas intérêt à perdre pour l’instant notre indépendance monétaire et financière. Nous ne sommes donc pas pressés. Q. : - L’Europe des 25 pourra-t-elle affecter d’une manière ou d’une autre le partenariat euro-méditerranéen, sachant que l’élargissement vers les pays de l’Est qui ont besoin d’aide, risque de se faire aux dépens des pays du sud de la Méditerranée ? R. : - Le débat actuel au sein de l’Union ne porte pas sur une aide (économique) à apporter aux 10 nouveaux membres. C’est une rhétorique employée par quelques hommes politiques, mais qui ne reflète pas la réalité de l’Union. Cela dit, je ne vois aucune raison pour qu’il y ait un changement dans la politique de l’Union vis-à-vis du Proche-Orient. J’irai même plus loin en disant que les 10 nouveaux membres de l’UE peuvent mieux comprendre les pays en développement que les anciens membres de l’Union parce qu’ils ont dû faire face durant les dernières décennies à des difficultés sur le plan social, politique et économique. Par conséquent, ils ont une sensibilité particulière par rapport aux problèmes des pays en transition. Q. : - Votre pays (la Tchécoslovaquie à l’époque) était le principal pourvoyeur des pays arabes en armes, notamment de la Syrie. Par la suite, vous avez abandonné ce commerce sur l’insistance des Américains qui étaient soumis à la pression israélienne. Au Liban, nous ne connaissons de votre pays que le cristal et les armes. R. : - Je ne voudrais ni défendre ni justifier l’exportation d’armes à partir de la Tchécoslovaquie communiste. Je peux simplement dire que l’arrêt de ce type d’exportation après la « Révolution de velours » n’était pas dû à une pression américaine mais plutôt à un débat domestique. Elle est le fruit d’une conviction profonde qu’il y avait là un problème éthique. D’ailleurs, la production d’armes est devenue aujourd’hui complètement incompatible avec notre politique, d’où un changement structurel important dans notre industrie. Q. : - Qu’attendez-vous de votre visite au Liban et quels sont les domaines dans lesquels le Liban et la République tchèque peuvent éventuellement collaborer ? R. : - Nous cherchons à être activement présents dans ce pays, et prouver, au lendemain même de notre accès à l’Union européenne, que nous refusons d’être confinés à la seule Europe. Nous cherchons à opérer une ouverture vers les autres pays du monde, dont le Liban. Nous avons prévu des accords entre les Chambres de commerce et d’industrie des deux pays ainsi que dans les domaines de la culture, des sciences et de l’éducation. Nous espérons également encourager les relations économiques, notamment le tourisme, et tout simplement gagner un nouvel ami. Propos recueillis par Jeanine JALKH
En visite au Liban au surlendemain de l’accession de son pays à l’Union européenne, le président de la République tchèque, Vaclav Klaus, affirme que la politique étrangère de son pays ne doit pas nécessairement s’aligner sur celle des autres membres de l’Union, soulignant qu’il s’oppose à l’idée d’avoir une seule et même voix au plan international. La...