Rechercher
Rechercher

Actualités

Comme à chaque fois, le scandale des naturalisés marque les opérations de vote Dans le metn, un face-à-face relativement calme entre les pro-Murr et l’opposition, avec des zones troubles

Le calme a prévalu hier sur le littoral du Metn, en dépit de quelques incidents notables. Une chose est sûre : malgré la confrontation, dans la plupart des localités, entre les listes du pouvoir parrainées par l’ancien ministre de l’Intérieur Michel Murr et les listes de l’opposition, conduites le plus souvent par l’axe Forces libanaises (FL)-Courant patriotique libre (CPL-aouniste), le climat est loin d’être aussi tendu que lors de la dernière partielle du Metn, en 2002. Sur le littoral du Metn, pour ces élections municipales de 2004, une image désagréable, asymétrique se détache du lot : celle de ces bédouins naturalisés, originaires de Faour, conduits par centaines (des dizaines de vans ont été mobilisés à l’occasion) jusqu’aux bureaux de vote par les listes pro-Michel Murr puis, après coup, récompensés. Récit de cette longue journée électorale. Dbayeh, 10h. L’armée et les FSI sont déployées en force, comme partout ailleurs. La localité est très calme, mais il y règne dès les premiers instants une confusion, qui se dissipe rapidement. Explications : à l’origine, les candidats ont le choix entre quatre listes. La première est présidée par le président du conseil municipal sortant, Kabalan Achkar, et appuyée par le Parti syrien national social (PSNS). La seconde est emmenée par le vice-président sortant, Sélim Massoud, et bénéficie de la bénédiction de Michel Murr et de l’appui du parti Tachnag – la machine électorale Tachnag s’est d’ailleurs mobilisée en masse partout sur le littoral du Metn pour appuyer les listes pro-Michel Murr. La troisième, une liste d’opposition, regroupe des candidats aounistes, des indépendants et bénéficie de l’appui du Parti national libéral. Une quatrième liste – virtuelle, celle-là, puisqu’elle n’est pas distribuée hors des bureaux de vote – est formée autour de Milad Massoud, candidat du Mouvement réformiste kataëb. Mais à l’intérieur des bureaux de vote, il en est tout autrement. La liste distribuée par les scrutateurs de Sélim Massoud change d’aspect : elle est le résultat d’une sorte de fusion entre les opposants kataëb pro-Gemayel de Milad Massoud et la liste pro-Murr de Sélim Massoud. Aussi bien pour les scrutateurs de Kabalan Achkar que pour les scrutateurs aounistes, il ne fait pas de doute : il existe pratiquement « une alliance Michel Murr-Amine Gemayel » qui ne dit pas encore son nom, dont l’objectif, précisent certains scrutateurs sur place, « vise à faire réussir autant que possible de candidats d’obédience kataëb ». Le panachage, disent-il, dominera les élections de Dbayeh. Dans les rangs aounistes, on apprécie bien peu ce qui est en train de se dérouler. Antélias, 11h. La localité passe pour être un fief de Michel Murr. Mais les électeurs interrogés à l’intérieur de l’un des bureaux de vote apprécient peu la formule. Là aussi, trois listes se font face. La première est conduite par Élie Farhat Abou Jaoudé, président sortant du conseil municipal, et bénéficie de l’appui de Michel Murr et du Tachnag. La deuxième est une liste incomplète, qui refuse de politiser les élections, et qui compte dans ses rangs Marie-Thérèse Khalil Rahbani. Présidée par Bassam Abou Fadel, elle est appuyée par les Rahbani, dont elle se réclame. La troisième est une liste d’opposition, appuyée en principe par le Mouvement réformiste kataëb et le CPL. Mais le CPL ne cache pas sa gêne. Ici aussi, comme à Dbayeh, la confusion est de mise, et les représentants aounistes refusent de prendre position devant la presse. Leur attitude prouve pourtant qu’ils ne se désintéressent pas de la bataille. Selon certains analystes, il se pourrait très bien que le courant aouniste reporte ses voix sur la liste de Bassam Abou Fadel. Sous la pluie, le candidat pro-Murr, Élie Abou Jaoudé, se dit confiant, les taux de participation sont très élevés. Dans un autre bureau de vote près du patriarcat arménien, réservé aux électeurs de cette communauté, le Tachnag fait sa loi. Jal el-Dib, 12h. Dans cette localité aussi, historiquement tour à tour aux mains du PSNS, des Kataëb, de Michel Aoun puis de Michel Murr, le conflit entre le pouvoir et l’opposition est ancestral, même si c’est d’abord et surtout affaire de familles. Surtout les Abou Jaoudé. D’ailleurs, les deux listes qui s’affrontent opposent les têtes de liste Édouard Abou Jaoudé (pro-Michel Murr) à Tony Abou Jaoudé et Antoine Zard (CPL-FL-PNL). L’opposition et tout particulièrement les aounistes sont présents en force, avec des chansons partisanes à l’appui. Ils font cause commune avec les FL. Aucun problème à signaler. Une querelle surviendra plus tard dans l’après-midi. Zalka-Amaret Chalhoub, 13h. Le QG de Michel Murr sur le littoral. Deux listes croisent le fer : l’une est appuyée par M. Murr (elle est présidée par Michel Assaf Murr) et l’autre par les aounistes (comprenant notamment Nabil Abou Jaoudé). Des incidents viennent de se dérouler entre les partisans de M. Murr et les scrutateurs aounistes, qui font état de pressions. Selon eux, les listes opposantes sont déchirées aux entrées des bureaux de vote. En début de journée, l’isoloir n’a pas été utilisé. Jdeideh ou le Hermel ? Jdeideh-Bauchrieh el-Sed, 13h45. L’on se croirait dans un patelin du Hermel. Les bédouins sont partout, des sandwichs à la main. Ils se jettent sur ce qu’on leur offre comme nourriture. Des dizaines de vans, sur lesquels sont affichés les portraits de Michel Murr, ont été mobilisés pour les conduire aux bureaux de vote. Ils ne savent pas pour qui ils viennent voter, mais ils s’attendent tous à être bien traités. Devant son bureau électoral, l’un des membres de la liste loyaliste présidée par Antoine Jebara négocie au téléphone pour que les naturalisés soient bien traités et « rémunérés sur-le-champ ». Il négocie même le prix. L’un deux, en colère, s’écrie : « Vous nous amenez de très loin pour que nous votions pour vous. Au moins, traitez-nous avec décence. » Dans les bureaux de vote, c’est pareil. Un vieux bédouin, la canne à la main, est conduit par une autre personne, qui lui sert de « guide », au cas où il viendrait à se tromper. Les deux vont ensemble derrière l’isoloir, et puis direction l’urne. Du côté de l’opposition, divisée à Jdeideh entre Mouvement réformiste kataëb (qui appuie la deuxième liste de Boulos Kanaan) et CPL-PNL-FL, Auguste Bakhos et Ibrahim Kanaan (qui appuient la troisième liste formée notamment de Rachid Nassour et Georges Yazbeck), on déplore des incidents. Devant une école arménienne à Sed el-Bauchrieh, quatre aounistes ont été interpellés par l’armée durant quelques minutes, à l’issue d’un incident avec le Tachnag. Les aounistes déplorent « le comportement antidémocratique » du parti arménien, « qui a recours à tout genre d’intimidations ». « Collusion » Gemayel-Murr Les portraits de Samir Geagea et ceux de Michel Aoun sont brandis côte à côte. Rachid Nassour, candidat sur la liste des différents courants de l’opposition, dénonce une collusion entre les Kataëb pro-Gemayel et Michel Murr. Selon lui, une liste « pro-Gemayel » circule, et « elle serait le fruit d’une fusion entre les listes de Boulos Kanaan et d’Antoine Jebara ». Cette liste comprendrait : Adel Élia, Nasr Rayess, Camille Wakim, Raymond Aoun, Tony Chehwane, Ghazi Abou Khalil, Pierre Atallah, Antoine Jebara et Ibrahim Sakr. Nul, sur place, ne peut confirmer cette version des faits. Dans son bureau à Jdeideh, l’avocat Ibrahim Kanaan évoque l’importance de ces élections : « Il ne s’agit pas de gagner, puisque la grande bataille devrait être la décentralisation administrative. De toute façon, sans cette loi, toutes les municipalités seront dès demain sous le contrôle du ministère de l’Intérieur. L’objectif est de redistribuer les cartes au niveau de l’opposition. » Dekwaneh et Sin el-Fil, entre 15h et 16h. À Dekwaneh, les courants de l’opposition, réunis, sont présents en force sur le terrain. Ils appuient une liste incomplète (présidée par Joseph Bou Abboud) face à la liste pro-Michel Murr, dirigée par le président sortant, Antoine Nicolas Chakhtoura. Samy Gemayel, qui visite les différentes régions, déplore « la politisation de la lutte dans certaines localités où la bataille n’oppose pas le pouvoir à l’opposition ». Pour lui, la bataille importante n’est pas celle des municipales, mais celle de la présidentielle, durant laquelle l’opposition devra transmettre un message clair. Enfin, à Sin el-Fil, la liste regroupant toute l’opposition, emmenée par Nabil Kahalé, paraît solide face à la liste de l’ancien PNL radié du parti en 2002, et pro-Michel Murr, Sami Chaoul. Au Metn, comme partout ailleurs, le facteur familial a sans doute faussé les données politiques. L’essentiel reste cette image de Michel Murr, lors de sa conférence de presse, hier. L’ancien ministre de l’Intérieur est sorti de sa réserve pour affirmer qu’il « contrôlera 90 % des municipales de la région dès dimanche soir ». À elle seule, cette image conforte les opposants, qui, quels que soient les résultats, sont convaincus qu’ils ont fait leur devoir. Michel HAJJI GEORGIOU
Le calme a prévalu hier sur le littoral du Metn, en dépit de quelques incidents notables. Une chose est sûre : malgré la confrontation, dans la plupart des localités, entre les listes du pouvoir parrainées par l’ancien ministre de l’Intérieur Michel Murr et les listes de l’opposition, conduites le plus souvent par l’axe Forces libanaises (FL)-Courant patriotique libre...