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Actualités - REPORTAGE

GUIDE DES MÉTIERS - Les secrets de la réussite : multiplier les stages, commencer par le bas de l’échelle…et être passionné Des débouchés à la pelle dans l’hôtellerie et la restauration (photos)

Hôtellerie, restauration, accueil, tourisme, clubs de loisirs, organisation de foires ou d’événements... que de débouchés au Liban et dans toute la région pour les formations dites d’hospitalité, en cette période de boom touristique. À titre d’exemple, le Liban a franchi en 2003 la barre du million de visiteurs, dont la grande majorité provient des pays arabes. Un chiffre qui est en passe de s’améliorer, les marchés européen, américain et asiatique étant encore peu exploités. Se préparant à recevoir davantage de touristes, le secteur hôtelier, qui emploie actuellement quelque 14 000 personnes, envisage de s’équiper de 3 000 chambres d’hôtel supplémentaires d’ici à 5 années et d’embaucher quelque 4 500 employés. Quant aux restaurants qui emploient près de 60 000 personnes, leur nombre ne cesse d’augmenter, de même que leurs besoins en personnel efficace. Pour répondre aux besoins d’un secteur en plein essor, des cursus se développent et s’organisent progressivement à travers le pays, quoique un peu tardivement, dans non moins d’une douzaine d’universités et une cinquantaine d’écoles professionnelles. Du côté des universités francophones, tourisme et gestion hôtelière représentent deux filières indépendantes. Mais le management hôtelier et touristique se profile, à la manière des grandes écoles internationales. Quant aux universités anglo-saxonnes, elles englobent les deux concepts au sein d’une même formation, délivrant des licences en Tourism and Hospitality Management, (tourisme et gestion de l’hospitalité ). Une évidence s’impose cependant : si la pratique du français est un atout de taille, l’anglais est indiscutablement la langue de la profession. Au Liban, pour percer, mieux vaut être au moins trilingue. Au départ, purement théoriques, les études universitaires comportent désormais divers aspects pratiques, afin de mieux répondre aux besoins du marché. Çà et là, les universités redoublent d’efforts et déploient les grands moyens, mettant en place des laboratoires au sein même de leurs campus : cuisines ultrasophistiquées, restaurants, chambres, salles de bains, buanderies et réceptions d’hôtel permettent désormais aux étudiants de s’essayer sur place à la tâche, dès la première année d’études. Quant à la connaissance du patrimoine libanais et le développement de l’écotourisme, ils font partie intégrante de la formation. Mais ces mesures demeurent insuffisantes, au gré des professionnels. Et pour cause, l’excellence qu’ils recherchent tant fait défaut non seulement au niveau de la formation, mais aussi à celui des qualités personnelles des nouvelles recrues. Manque d’éducation, de classe, de compétences, de savoir-faire, de professionnalisme, de langues étrangères, mais aussi et surtout de passion... Les critiques pleuvent, impitoyables; les métiers du tourisme et de l’hospitalité sont si exigeants. Certes, les jeunes Libanais ne se retrouvent pas pour autant au chômage. Bien au contraire, au terme de leurs études, ou même durant leur formation, de multiples horizons s’ouvrent à eux dans l’ensemble des métiers de l’hospitalité. Car les besoins sont effectifs, au Liban ou dans les pays arabes, non seulement au niveau de la main-d’œuvre, mais aussi dans les postes de cadres moyens et supérieurs. Il est d’ailleurs courant de voir des étudiants des deux sexes faire des stages ou travailler dans des restaurants, des hôtels ou à l’organisation de congrès et d’expositions, en week-end ou durant leurs vacances, chose impensable il y a une dizaine d’années. Une initiative que les professionnels voient d’un bon œil, car dans les métiers du tourisme et de l’hospitalité, l’expérience est la clé de la réussite. Quant aux stages ou petits jobs, ils sont, pour les jeunes, le meilleur moyen de fourbir leurs armes, car il est indispensable de gravir les échelons par le bas. Vu l’étendue des deux filières, nous nous limiterons dans une première approche aux métiers de l’hôtellerie et de la restauration, détaillant les études y relatives au Liban ainsi que les débouchés. Les témoignages de quelques professionnels étofferont notre recherche et donneront aux jeunes une idée claire de la réalité quotidienne. Les formations purement touristiques ainsi que leurs débouchés feront l’objet d’un article ultérieur. Travailler quand les autres s’amusentLes universités s’adaptent progressivement au marché Des cursus axés davantage sur la pratique D’ici à 5 ans, les métiers de la restauration et de l’hôtellerie emploieront au Liban plus de 100 000 personnes. C’est pour répondre aux besoins de ce marché en plein essor qu’une douzaine d’universités du pays ont introduit en l’espace de 10 ans le cursus de la gestion hôtelière et du tourisme au sein de leurs facultés de gestion. D’une institution à l’autre, les appellations sont différentes. La plus récente étant l’appellation plus globale de gestion de l’hospitalité et du tourisme adoptée par les institutions anglophones, conformément aux grandes écoles internationales. Au départ purement théoriques, les études se tournent désormais vers la pratique, conformément à la demande des professionnels. Il y a tout juste dix ans, naissait le premier cursus universitaire en Hotel Management and Tourism (gestion hôtelière et tourisme ) délivré en anglais à l’Université Notre-Dame de Louaïzé (NDU). Aujourd’hui, l’institution a introduit les trois spécialités suivantes: alimentation et boisson, voyage et tourisme, ainsi que gestion et management de l’hospitalité, afin de donner aux étudiants différents débouchés possibles. Culture générale, langues étrangères, informatique, sensibilisation à l’environnement, mais surtout 74 crédits directement liés à la profession permettent l’obtention d’une licence en un minimum de trois ans et demi, avec la possibilité pour l’étudiant qui travaille de poursuivre ses études à son rythme. L’hébergement, l’accueil, la réception, la restauration, l’organisation d’événements sont enseignés au même titre que la négociation de contrats, la gestion d’un bar à boissons, la comptabilité et les finances relatives à l’hospitalité ou même le développement du tourisme. Certains cours pratiques, comme la cuisine ou la pâtisserie, sont donnés dans les laboratoires de l’établissement. « Nous donnons aux étudiants une éducation à la fois académique et professionnelle », indique le Dr Youssef Zgheib, directeur du département Hotel Management and Tourism à la NDU. « Nous recherchons l’excellence. C’est pourquoi nous exigeons d’eux des stages en milieu professionnel, tout en les encourageant à travailler durant leurs études. Il est d’ailleurs indispensable qu’ils sachent appliquer sur le terrain leurs connaissances académiques », précise-t-il. Polyvalence et stages À la Lebanese American University (LAU), trois thèmes de base ponctuent le cursus de la Hospitality and Tourism Management School, qui a ouvert ses portes en 1996 : la gestion des métiers de l’hospitalité, la gestion du tourisme ainsi que leurs aspects marketing et financier. « Nos étudiants prennent tous les crédits de la gestion générale plus ceux de leur spécialité », explique le Dr Saïd Ladki, directeur de cette faculté. « Notre objectif est de leur donner la polyvalence nécessaire afin qu’ils aient des possibilités de travail dans différents domaines », ajoute-t-il. La théorie constituant l’essentiel de la formation, les étudiants doivent accomplir des stages dans différents départements hôteliers. Stages qu’ils pratiquent généralement durant les vacances d’été, au Liban ou à l’étranger, selon leurs préférences. « Grâce aux accords que nous avons établis avec des chaînes internationales, nos étudiants ont la possibilité de faire leurs stages aux États-Unis, en Malaisie, à Dubaï ou ailleurs », précise le directeur. Pour mieux répondre aux besoins du marché et donner à ses étudiants une formation pratique, l’université entreprend de s’équiper d’une cuisine, qui devrait être fonctionnelle dès l’année prochaine. C’est en 1999 que l’École de management de tourisme et d’hôtel de l’Université de Balamand a ouvert ses portes. Accueillant principalement des étudiants de la région du Nord mais aussi des pays voisins, la faculté a mis en place un accord d’affiliation et de collaboration avec le Conrad N. Hilton College (Université de Houston, Texas). Accord basé non seulement sur le cursus universitaire, mais aussi sur les équipements. Le campus de Balamand est ainsi le seul au Liban à bénéficier d’installations complètes dans le domaine, permettant aux étudiants de s’exercer sur place aux différentes fonctions de l’hôtellerie et de la restauration. Réception, chambre d’hôtel, salle de bains, cuisine, buanderie, restaurant, mais aussi logiciel de gestion d’hôtel et de restaurant servent de laboratoire aux étudiants, leur permettant d’apprendre le métier à la base afin d’en connaître les moindres rouages. Parallèlement, le programme académique insiste autant sur la gestion hôtelière que sur celle du tourisme. « Notre force, indique le Dr Hamid el-Debs, directeur de la faculté, réside dans la formation à la fois théorique et pratique de nos élèves, qui sont opérationnels dès la fin de la première année, au terme de leur premier stage en milieu professionnel.» Et pour parfaire l’enseignement, il envisage d’introduire le français comme langue étrangère dès le début de l’année prochaine. Un DESS à l’UL C’est durant la même année que l’Université Haïgazian a introduit la gestion de l’hospitalité au sein de sa faculté de gestion et d’économie. Bénéficiant d’un accord de collaboration avec l’American Hotel and Lodging Association, l’université délivre, parallèlement aux cours de gestion, un certificat au terme de huit cours théoriques sur l’alimentation et la boisson, la réception d’hôtel ainsi que les ventes et le marketing. Le diplôme, plus spécialisé, équivalent de la licence ou BA en gestion, option gestion de l’hospitalité, est obtenu au terme de douze cours théoriques sur le management de l’hospitalité et de l’hébergement ainsi que la supervision. « Mais dès l’année prochaine, explique le Dr Fady Asraoui, doyen de la faculté de gestion, les étudiants obtiendront une licence en gestion de l’hospitalité. » La formation délivrée par l’Université Haïgazian étant purement théorique, les élèves se doivent de travailler ou de faire des stages durant l’été en milieu hôtelier. Parmi les universités anglophones figure l’Université libanaise qui délivre une licence en gestion hôtelière au sein de sa faculté de tourisme et d’hôtellerie. À titre d’exemple, langues étrangères, réception et accueil, informatique, gestion de restaurants, d’hôtels, de centres de vacances ou d’événements, nutrition, cuisine, marketing, comptabilité, ressources humaines..., pour ne citer que quelques cours, figurent dans le cursus universitaire, étalé sur quatre ans. Si la théorie occupe une place de taille dans la formation, la pratique n’est pas laissée pour compte, explique le directeur de la faculté, le Dr Jamal Awada. « En effet, précise-t-il, une cuisine équipée ainsi qu’un laboratoire informatique permettent aux étudiants de s’exercer au sein de l’institution. Mais ils doivent accomplir un stage de 4 mois par an en milieu professionnel, car l’hôtellerie est un métier qu’il faut commencer par la base. » Les étudiants désireux de poursuivre leurs études ont la possibilité de se spécialiser et d’obtenir un DESS en hôtellerie et tourisme, diplôme délivré en jumelage avec l’Université publique française de Perpignan. Les facultés francophones : un retard à rattraper Les universités francophones, elles, semblent jusque-là avoir adopté un profil bas dans le domaine. Il y a tout juste quatre ans, l’USJ a introduit, dans le cadre de l’Institut de gestion des entreprises (IGE), le management hôtelier et touristique, formation presque exclusivement théorique. « C’est la réputation de l’institution qui permettait à nos étudiants de trouver du travail au terme de leur stage », observe Philippe Fattal, directeur de l’IGE. Conscient de la nécessité de mieux répondre à la demande du marché, il entreprend actuellement, avec l’aide de Raja Nasri, coordinateur de la formation et professionnel du métier de l’hôtellerie, un remaniement global des programmes où théorie et pratique auront leur place à parts égales. « Les hôtels ont peur de ces universités qui forment des gestionnaires désireux de devenir tout de suite directeurs », remarque M. Nasri, ajoutant que le but recherché est de former des professionnels capables d’occuper des postes de responsabilité et de bâtir des projets avec succès. L’USJ entreprend d’ailleurs la construction d’une résidence qui hébergera ses hôtes et qui servira de laboratoire aux étudiants. Les études théoriques, elles, seront axées notamment sur les techniques de la restauration, l’hébergement, le service de la clientèle, la supervision, la gestion d’hôtels ou de complexes vacanciers ainsi que le développement de destinations touristiques. Quant à l’anglais, langue indispensable dans la profession, il est obligatoire, comme dans toutes les facultés de l’USJ, de nombreux étudiants apprenant par ailleurs une quatrième langue durant leurs études. De son côté, l’Université du Saint-Esprit de Kaslik (Usek) a introduit il y a à peine deux ans la gestion hôtelière comme option au sein de sa faculté de gestion. Dix matières d’hôtellerie sont enseignées en plus des matières traditionnelles de gestion, explique Michel Karam, responsable du département. La pratique faisant défaut au sein du cursus universitaire, les étudiants sont encouragés à faire des stages en milieu professionnel. Par ailleurs, l’Université de La Sagesse entreprend actuellement la mise en place d’un accord de coopération avec l’école hôtelière de Lausanne en vue de créer une école hôtelière. L’amélioration des cursus universitaires dans le domaine de la gestion hôtelière et touristique est palpable, mais elle demeure lente au gré des professionnels, qui déplorent le manque d’excellence des étudiants fraîchement diplômés. Et pourtant, à leur sortie des universités, généralement au terme d’un stage, les étudiants sont littéralement happés par les hôtels et les restaurants en quête de personnel qualifié. L’amour de la profession Elles ont étudié la gestion hôtelière dans trois universités différentes. Elles sont jeunes, fraîchement diplômées et travaillent dans différents domaines. Joanna Abou Jaoudé, Lara Touma et Patti Karam racontent les difficultés rencontrées, mais aussi les aspects positifs de leur métier. Le parcours de Joanna, issue de l’AUST, est celui de tout étudiant. Durant ses études universitaires, elle a multiplié les stages et les petits boulots, au Liban ou à l’étranger, pour acquérir la pratique nécessaire dans le métier. « Les débuts étaient durs, se souvient-elle, j’ai tout appris de A à Z. J’ai même fait un passage en cuisine et au service. » Aujourd’hui, la jeune femme a trouvé sa voie, la restauration. Elle n’a d’ailleurs eu aucun problème à trouver un emploi. Elle a même pris le temps de choisir la proposition la plus intéressante. Elle s’occupe de la vente et du contact avec la clientèle dans l’entreprise Sofil de catering, moyennant un salaire de 1 500 dollars par mois. Très épanouie dans son travail, Joanna rencontre pourtant quelques difficultés, notamment depuis son mariage. « Je travaille souvent le soir lorsqu’il y a des banquets. J’ai même travaillé la veille de Noël et durant le réveillon du Nouvel An », raconte-t-elle, ajoutant que son mari a dû se résoudre à passer ces soirées sans elle. « Ça l’embête, mais il l’accepte car il sait que j’aime mon métier. » D’ailleurs, travailler durant les fêtes est une condition préalable pour obtenir ce genre d’emplois. Le parcours de Lara, étudiante à Balamand, a été quelque peu différent. Employée durant un an par les supermarchés Spinneys où elle a acquis de l’expérience, la jeune fille a lâché son emploi pour un poste moins bien rémunéré à l’hôtel Martinez. « Je tenais à travailler dans l’hôtellerie », dit-elle. Payée quelque 400 dollars par mois pour occuper un emploi de relations publiques dans la restauration, elle n’a pas tenu le coup longtemps. « Le salaire était trop bas et je n’étais pas vraiment satisfaite. » Aujourd’hui, Lara se prépare à partir pour le Koweït où elle a le choix entre deux emplois de responsabilité au sein de chaînes internationales. « Je compte partir pour acquérir de l’expérience avant de retourner », dit-elle, ajoutant qu’elle percevra un salaire de 1000 dollars par mois. « Je suis d’ailleurs ravie de connaître d’autres gens, d’autres cultures. » Patti, étudiante à l’USJ, a préféré démarrer du bas de l’échelle dans le service des ressources humaines de l’hôtel Phoenicia Inter-Continental, plutôt que d’accepter une proposition de travail à 1000 dollars en tant qu’hôtesse d’accueil. Travaillant presque 11 heures par jour, la jeune fille évoque la pression et le stress comme étant les difficultés majeures de sa tâche. « Tout doit se faire à l’instant », dit-elle avec humour. Quant aux satisfactions, elles sont innombrables. « J’acquiers beaucoup d’expérience, je travaille au sein d’une équipe qualifiée et j’élabore ma personnalité », raconte la jeune fille. Son maigre salaire, équivalent à 550 dollars, n’est pas un handicap pour l’instant. « Certes je ne suis pas indépendante, mais j’ai d’énormes possibilités d’avancement dans cette chaîne », conclut-elle Victor Kahi n’est pas un nouveau venu dans l’hôtellerie. Diplômé de la NDU, il s’est taillé une expérience au terme de 10 ans de travail dans différents restaurants et hôtels du pays. « J’ai eu la chance de commencer à travailler durant mes études », se souvient-il. Fort de son expérience, le jeune homme s’est finalement tourné vers l’hébergement. Il est actuellement chef de réception à l’hôtel Vendôme Inter-Continental et touche un salaire d’environ 2 000 dollars par mois. Certes, tout n’est pas rose dans le métier. « Il faut accepter les horaires difficiles, oublier la vie sociale et supporter la fatigue physique, observe M. Kahi, car on travaille debout, surtout quand les autres s’amusent. Mais je suis bien dans mon métier et j’apprécie énormément le contact avec la clientèle, d’autant plus que je ne stagne pas. Je suis dans une chaîne internationale qui investit énormément sur les employés et je suis conscient que j’ai des possibilités d’avancement. » Les besoins du marché de l’hôtellerie et de la restauration en personnel sont énormes, allant du peu au plus qualifié. Des besoins qui vont s’accroître avec l’augmentation du nombre d’hôtels et de restaurants d’ici 5 ans. Encore faudrait-il que les nouvelles recrues puissent répondre à la demande. Quatre professionnels donnent leur avis sur la formation au Liban et mettent l’accent sur les difficultés du métier ainsi que les qualités requises pour percer. Pierre Achkar, président du syndicat des hôteliers, est catégorique : les hôtels et restaurants du pays ont constamment besoin d’une main-d’œuvre qualifiée dans l’ensemble de leurs départements. « Malheureusement, regrette-t-il, la qualité, le savoir-faire, le savoir-vivre et la connaissance des langues sont rares chez les jeunes qui se lancent dans la profession. Or, nous recherchons l’excellence et la sobriété et non pas des jeunes filles en minijupes, seins en l’air et cheveux frisottants. Nous recherchons des jeunes qui sont conscients qu’ils doivent commencer à zéro pour réussir. » Le problème, selon M. Achkar, est qu’ils sont mal préparés au métier et exercent peu durant leurs années d’études, car les universités manquent de laboratoires. Certes, ces institutions sont soucieuses de donner un enseignement de qualité et redoublent d’efforts, mais cela demeure insuffisant, estime-t-il, car certains enseignants n’ont pas les qualités requises et n’ont jamais voyagé pour observer l’excellence du métier à l’étranger. Quant aux stages, les étudiants les font durant l’été, en pleine saison touristique, alors que les professionnels, surchargés de travail, n’ont pas vraiment le temps de les former. Aujourd’hui, le Liban ne reçoit pas encore la clientèle européenne. Mais lorsqu’il deviendra une plaque tournante, la barre sera placée plus haut. Et l’excellence sera un must. Paul Ariss, président du syndicat des restaurateurs, déplore le manque de synchronisation entre les universités et la profession, alors que le marché de la restauration est en plein essor. Certes, les besoins en personnel sont réels, à tous les niveaux, mais c’est un personnel qualifié et efficace qui est recherché. « Or, regrette-t-il, au terme de leurs études, les jeunes universitaires n’ont pas assez d’expérience pratique, alors que la main-d’œuvre manque de bagage culturel. D’ailleurs, il n’y a que les meilleurs qui restent. » Les autres se retrouvent au chômage ou travaillent dans des restaurants de seconde catégorie. « Car, précise M. Ariss, la concurrence est forte, non seulement au Liban, mais aussi à l’étranger. » En effet, certains pays arabes préfèrent désormais la main-d’œuvre arabe ou des pays de l’Est à la main-d’œuvre libanaise, jugée trop exigeante et pas assez qualifiée. « Certes, observe M. Ariss, il est encore temps de se rattraper. » De nombreuses chaînes de restaurants libanais ouvrent leurs portes dans les pays arabes et représentent des emplois potentiels pour la jeunesse. Par ailleurs, de grands groupes s’installent au Liban et sont prêts à engager les jeunes. Mais ceux-ci doivent être conscients que la restauration est un métier à part entière et qu’elle exige la qualité à tous les niveaux : diplôme, training, présentation, hygiène, culture, langues, ainsi qu’un savoir-faire avec la clientèle. Nouhad Dammous, rédacteur en chef de la revue Hospitality News et partenaire dans la société Hospitality Services, déplore la baisse de qualité des formations aux métiers de l’hôtellerie et de la restauration, qui n’ont pas suivi l’évolution requise. « Une formation se doit non seulement de délivrer un diplôme, mais surtout de répondre aux besoins du marché », estime-t-il. Or de nombreux étudiants, une fois embauchés, changent aussitôt de métier, car ils ont été mal préparés. Ils espéraient une évolution rapide, des postes de gestion et n’arrivent pas à accepter le fait que, dans ce métier, il faut gravir les échelons progressivement, mais aussi travailler le week-end et les jours fériés. « Et pourtant, remarque M. Dammous, les besoins sont énormes, tant dans les postes de base que dans les emplois de responsabilité. » Les universités et les écoles d’hôtellerie ont aujourd’hui un rôle de taille à jouer. Elles ont la responsabilité d’expliquer aux élèves les exigences du métier, leur donner la pratique nécessaire pour leur permettre d’intégrer rapidement la profession, mais aussi délivrer un enseignement de qualité. « L’idéal, conclut M. Dammous, est de proposer aux étudiants des stages avant qu’ils n’entament leurs études. Ils ont aussi la possibilité de travailler tout en poursuivant leurs études. » Pascal Gauvin, directeur d’opérations de la chaîne d’hôtels Inter-Continental au Liban, qui emploie près de 2000 personnes, est moins critique que les professionnels libanais. Dans ce marché en pleine ascension, un diplôme de qualité des grandes écoles suisses est certes un atout de taille pour l’étudiant. « Mais faire ses études au Liban n’est absolument pas un handicap, insiste-t-il. Car l’essentiel pour les nouveaux venus dans le métier est de faire leurs preuves. C’est d’ailleurs la bonne attitude qui fait la différence dans le recrutement. » « Certaines qualités sont néanmoins essentielles pour réussir dans la profession, ajoute-t-il : la passion du métier, la persévérance, l’humilité, la créativité, la joie de vivre et le désir d’être au service de la clientèle. » D’ailleurs, le client rencontre plus d’employés que de directeurs et c’est à eux qu’il s’adresse directement. Le peuple libanais est d’ailleurs fait pour cette profession, estime M. Gauvin, évoquant la légendaire hospitalité libanaise. Les étudiants doivent toutefois réaliser qu’un professionnel de l’hôtellerie travaille lorsque les autres s’amusent. Quant à l’avancement, il est lent mais sûr, car il est indispensable de commencer par le bas de l’échelle. En effet, rares sont les directeurs qui n’ont pas commencé par les emplois de base. « J’ai moi-même été serveur avant de gravir les échelons », raconte-t-il à ce propos. Quant à la formation des universitaires, M. Gauvin répond qu’elle ne représente pas un problème de taille dans la grande chaîne qu’il dirige, car la formation des nouveaux venus est assurée, un plan de carrière étant même établi à leur intention. L’ITFL, un symbole d’excellence Près de 52 écoles hôtelières libanaises enseignent actuellement les métiers de base de l’hôtellerie, délivrant un brevet, un bac technique ou un diplôme de technicien supérieur. Malheureusement, nombreuses sont celles qui jettent sur le marché des étudiants mal préparés au métier. Les bonnes écoles sont rares et tentent tant bien que mal de préparer les élèves aux métiers de cuisinier, de pâtissier, de serveur, de maître d’hôtel, de femme de chambre, etc. Parmi les écoles et instituts appréciés dans la profession, l’École hôtelière de Dekwaneh, l’École hôtelière de Kafa’at et l’Institut technique franco libanais (ITFL). La particularité de l’ITFL est de permettre aux jeunes filles de milieux défavorisés d’acquérir de l’indépendance. Délivrant notamment des formations en hébergement et en service de salle, moyennant des scolarités modiques, l’ITFL prépare ses élèves aux examens officiels libanais (BT et TS), tout en leur délivrant le Cap français. Aujourd’hui, l’institut a fait ses preuves et les grands hôtels se disputent les jeunes filles qui en sortent car elles bénéficient d’une excellente formation théorique et pratique. Grimpant les échelons, elles peuvent même occuper certains postes de responsabilité. « Le problème, déplore Arlette Jreissati, directrice de l’institut, est la réticence des jeunes Libanaises à travailler comme femmes de chambres. » PAGE RÉALISÉE PAR Anne-Marie EL-HAGE


Hôtellerie, restauration, accueil, tourisme, clubs de loisirs, organisation de foires ou d’événements... que de débouchés au Liban et dans toute la région pour les formations dites d’hospitalité, en cette période de boom touristique. À titre d’exemple, le Liban a franchi en 2003 la barre du million de visiteurs, dont la grande majorité provient des pays arabes. Un...