Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIE

CRISE RÉGIONALE - Les échéances de mai, importantes pour les pays arabes Obeid peaufine ses dossiers pour les réunions d’Euromed et du Caire

De Damas à Amman, en passant par Ryad, la situation régionale est inquiétante. Ce n’est pas au ministère des Affaires étrangères que l’on dirait le contraire. D’un service à l’autre, tout le monde est mobilisé pour suivre les derniers développements, recevoir et envoyer des rapports, et les transmettre à qui de droit. Le ministre lui-même, M. Jean Obeid, est entré ainsi en contact avec son homologue syrien, Farouk el-Chareh, mardi soir, pour s’informer de ce qui se passe dans la capitale syrienne. Apparemment, tout y est rentré rapidement dans l’ordre et les deux hommes sont en contact permanent, surtout à une étape aussi mouvementée. Ils doivent d’ailleurs se rencontrer le 4 mai, dans le cadre de la réunion d’Euromed qui doit se tenir en Irlande. Au ministère des Affaires étrangères, les derniers incidents de Mazzeh sont pris très au sérieux. Si, pour l’instant, les seuls éléments connus sont ceux qui ont été rapportés par les sources syriennes officielles, les sources informées au ministère écartent l’hypothèse qu’il s’agirait d’un coup monté pour permettre d’importantes rafles et affirment que, depuis quelque temps, la plupart des États de la région sont visés. Certains à cause de leur alignement sur la politique américaine, d’autres, aussi curieusement que cela puisse paraître, pour la raison contraire. Pourtant, les premières accusations semblent pointer du doigt el-Qaëda. Pourquoi cette organisation, si elle est réellement derrière les incidents de Mazzeh, s’en prendrait-elle à l’un des rares régimes arabes ouvertement opposés à la politique américaine dans la région ? Les sources informées au ministère rappellent aussitôt que le régime syrien est laïc et qu’il a un long contentieux avec les extrémistes musulmans depuis 1976, en passant par le début des années 80, qui avaient vu une série d’assassinats, avant que le régime ne réagisse. De plus, el-Qaëda était aussi hostile au régime de Saddam Hussein alors qu’il était pratiquement en guerre contre les Américains. Ce n’est donc pas, aux yeux des sources du ministère, cette logique-là qu’il faut rechercher dans les actes terroristes. Il faut simplement être vigilant, car, aujourd’hui, dans toute la région, divers courants luttent discrètement, chacun ayant ses propres objectifs. Par exemple, en Irak, les agents du Mossad, arrivés en force dans le pays, déploient d’importants efforts pour provoquer un conflit entre les sunnites et les chiites, alors que les erreurs américaines unifient au contraire la population contre les troupes de la coalition. Des échanges animés sous les voûtes du palais Bustros Les départements concernés au ministère des Affaires étrangères sont obligés de s’intéresser à l’ensemble de la situation régionale. Mais c’est surtout le conflit israélo-palestinien, en raison notamment du problème de l’implantation des réfugiés dans les pays d’accueil, qui reste leur principal souci. Le haut plafond du palais Bustros retentit encore des échanges souvent animés entre les ambassadeurs des pays occidentaux et leurs interlocuteurs libanais, qui défendent sans relâche le point de vue du Liban et des Arabes en général. Lorsque, par exemple, l’ambassadeur des États-Unis, M. Vincent Battle, demande pourquoi le Liban abrite des leaders palestiniens et les autorise à tenir des meetings et à prononcer des discours menaçants, la réponse libanaise fuse : le président du bureau politique du Hamas, Khaled Mechaal, était il y a quelques jours à Amman, pourquoi les États-Unis ne protestent que lorsqu’il est à Beyrouth, voire à Damas ? De plus, pourquoi un dialogue est-il autorisé entre les représentants de l’Autorité palestinienne et ceux du Hamas en Cisjordanie, afin de rechercher une trêve, alors qu’il est interdit au Liban, où la trêve existe déjà ? Les Libanais ont même été jusqu’à demander à l’ambassadeur américain s’il souhaitait qu’ils mènent une nouvelle guerre contre les camps palestiniens pour satisfaire leurs exigences… Les Libanais n’ont pas non plus ménagé leurs critiques à l’égard du président Bush, lorsqu’il a appuyé le plan du Premier ministre israélien Ariel Sharon. Bien que les échanges ont eu lieu entre diplomates, au palais Bustros, si les expressions utilisées étaient aimables, le contenu l’était beaucoup moins. Selon les sources du ministère, M. Jean Obeid aurait été très ferme, rappelant à M. Battle que son président a annulé tout ce que son père avait fait. La fameuse équation « la terre contre la paix », adoptée à la conférence de Madrid en 1991, est devenue caduque, car non seulement il n’est plus question de rendre la terre, mais de plus la paix est totalement remise en question. Le refus du droit au retour, une question cruciale pour le Liban Toujours selon la même source, M. Obeid aurait déclaré à son interlocuteur américain, que les Israéliens sont les derniers à pouvoir donner des leçons en matière de violence. Leur histoire en est pétrie et ce sont eux qui, les premiers, ont donné l’exemple des actes désespérés, avec le suicide collectif de Massada et les propos célèbres de Samson : « Que le temple s’effondre sur moi et sur mes ennemis. » Et puis, quand on rend la vie pire que la mort, comment ne pas s’attendre à des actes de violence désespérés ? Il ne s’agit certes pas pour le ministère de défendre les opérations-suicide, mais de tenter de comprendre la situation. Lorsque les Américains acceptent le plan de Sharon qui fait du futur État palestinien une grille de mots croisés, comment s’étonner que les Palestiniens réagissent avec violence ? Enfin, lorsque George Bush annonce qu’il faut oublier le droit au retour des Palestiniens, ne doit-il pas s’attendre à de vives réactions dans le monde arabe ? Le Liban, en tout cas, compte soulever cette affaire devant toutes les instances auxquelles il aura accès. Le ministre Jean Obeid a préparé un dossier à cet effet qu’il exposera lors de la rencontre d’Euromed. Au cours de la précédente réunion du genre, il avait été d’ailleurs le seul à répondre aux allégations israéliennes, du fait même que son intervention avait été prévue en dernier. Bien entendu, il n’y avait pas eu, entre les délégations libanaise et israélienne, d’échanges directs, mais par le biais de la présidence. La prochaine réunion s’annonce donc animée. Ensuite, le ministre Obeid se rendra au Caire pour la réunion des ministres arabes des Affaires étrangères, qui se tiendra au siège de la Ligue arabe. Cette réunion doit préparer le sommet qui doit se tenir le 22 mai à Tunis. Même si la plupart des instances concernées ne croient pas beaucoup à la tenue de ce sommet, à cause des problèmes internes à chaque pays, le ministère des Affaires étrangères fera son devoir et préparera ses dossiers. Dans l’espoir de pouvoir en débattre pour parvenir à un minimum de consensus arabe. D’ailleurs, avec humour, M. Jean Obeid qualifie son ministère de « bastion de la résistance politique ». Si défendre la cause libanaise, par ces temps mouvementés, peut paraître difficile, ni le ministre ni son équipe ne sont découragés. La région vit une époque trouble, mais passionnante, et il faut du souffle pour tenir le coup. Il faut surtout ne pas hésiter à entreprendre les contacts nécessaires. Et le ministre Jean Obeid ne chôme pas. Il passera pratiquement le mois de mai à l’étranger et il se rendra ensuite en juin en Iran. Loin de la cacophonie interne. Scarlett HADDAD

De Damas à Amman, en passant par Ryad, la situation régionale est inquiétante. Ce n’est pas au ministère des Affaires étrangères que l’on dirait le contraire. D’un service à l’autre, tout le monde est mobilisé pour suivre les derniers développements, recevoir et envoyer des rapports, et les transmettre à qui de droit. Le ministre lui-même, M. Jean Obeid, est entré...