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Actualités - CHRONOLOGIE

FESTIVAL DE BAALBECK - Un grand moment de jazz dans le temple de Bacchus Le quintette de Jackie McLean : l’essentiel d’une aura (photo)

Jackie McLean a traversé, durant sa carrière de saxophoniste alto, trois fois le Styx sans y rester sur la rive fatale de l’oubli. Une première fois, à cause de sa prédilection pour les drogues, au début des années 60. Une deuxième fois, à peine quelques années plus tard, à cause d’un passage en prison. Une troisième fois, enfin, comme tous ses autres congénères, à cause de l’immense dépression du jazz comme on l’entendait jusqu’en 1969, qui s’est vu remplacer par un brassage de funk, de rock et de reggae. Malgré tous ces avatars, le musicien est revenu, avec plus de force encore, sur le devant de la scène dès le début des années 90, si bien que la lune de miel a pu reprendre avec le label Blue Note (pour lequel il a enregistré 21 albums, dont un bon quart est de l’ordre de la référence, entre 1959 et 1967), en 1996, avec Hat Trick, suivi de Fire and Love (1997) et, dernièrement, de Nature Boy (2000). Dans la période de creux, durant laquelle il a produit de nombreux albums, mais de moindre qualité, il s’est entièrement consacré à poursuivre l’œuvre du fondateur de Blue Note, Alfred Lion, à savoir promouvoir le jazz afro-américain, à l’université de Hartford, comme à travers l’Artists Collective, une association fondée en 1970. C’est donc un Jackie McLean marqué par les épreuves de la vie et par l’âge (72 ans) que le public du Festival de Baalbeck a découvert vendredi dernier, entouré de son fils René, saxophoniste ténor et flûtiste, du bassiste Nat Reeves et de deux virtuoses, à savoir le batteur Eric McPherson et le pianiste Alan Jay Palmer. Jeu fascinant et trop long entracte L’artiste, qui n’a jamais été un fan des apnées interminables de solos, l’a été d’autant moins qu’il est tout simplement fatigué. Mais son jeu, et c’est cela qui a littéralement galvanisé les auditeurs, du moins ceux qui étaient là pour le jazz, n’a pas pris une ride, bien au contraire. L’aisance du virtuose, patiemment tamisée par des centaines de concerts et par la fréquentation incessante, entre 1940 et 1965, des grands créateurs du jazz américain, donne aux sonorités de son instrument une qualité, une clarté et une audace tout simplement fascinantes. Sa réactivation de la seule reprise du concert, à savoir Round Midnight, est de l’ordre du génie – ce qui est bien avec les légendes, c’est que les superlatifs ne sont jamais de trop, ni le plaisir à les employer. Le lien étroit qui lie le fils au père est émouvant. Sur scène, grosso modo, René dirige tandis que Jackie joue, ne se souciant plus du reste et n’ayant plus à offrir à son ensemble musical que l’essentiel : son aura. Deux « sets » de 40 minutes, évidemment trop courts, et un rappel, voilà l’apparition libanaise de Jackie McLean, qui se serait bien passé d’un entracte d’une demi-heure, pourtant annoncé de 20 minutes. Une trop longue interruption pour un homme qui n’a plus l’allant de ses jeunes années. Il fera d’ailleurs à son public, qui a réclamé un autre rappel, un geste poli mais sans équivoque : finita la musica. Un grand moment de jazz, histoire de se souvenir de quel terreau viennent les successeurs de la grande époque du be-bop. Diala GEMAYEL
Jackie McLean a traversé, durant sa carrière de saxophoniste alto, trois fois le Styx sans y rester sur la rive fatale de l’oubli. Une première fois, à cause de sa prédilection pour les drogues, au début des années 60. Une deuxième fois, à peine quelques années plus tard, à cause d’un passage en prison. Une troisième fois, enfin, comme tous ses autres congénères, à...