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Droits de l’homme - Bilan-réquisitoire du rapporteur de la commission parlementaire Les détenus de Tripoli sont parqués dans une ancienne écurie

À Tripoli, comme dans le reste du pays, le paysage carcéral est si lamentable que c’est l’image même du Liban qui en est ternie. La commission des Droits de l’homme a achevé, samedi, la tournée d’inspection des prisons entamée lundi dernier, par une visite des prisons pour femmes et hommes du chef-lieu du Liban-Nord. Et une fois de plus, ses membres ont été atterrés par les conditions inhumaines dans lesquelles sont détenues – il faudrait dire parquées comme du bétail –, des centaines de personnes. La commission se réunira aujourd’hui pour établir un bilan de sa tournée et se préparer à visiter les prisons militaires, notamment la prison de Yarzé, où est détenu M. Samir Geagea. En avant-première du rapport qu’il doit établir, le rapporteur de la commission des Droits de l’homme, César Moawad, a rendu compte samedi, à la presse, des résultats de la tournée. Voici son bilan-réquisitoire : « C’est notre seconde tournée dans les prisons de Kobbé, a dit M. Moawad. Nous en avions fait une première en 2001 et il ne fait pas de doute que des améliorations ont été introduites. Dans la prison des femmes, nous avions affaire à un rez-de-chaussée ordinaire, qui s’est transformé depuis en un espace de 200 mètres carrés. C’est dire qu’il y a désormais un minimum de respect pour la dignité humaine et les droits de l’homme. Des amendements sont intervenus. Et pour commencer, il y a un atelier de couture, des sessions d’initiation à l’utilisation des ordinateurs et à l’anglais. On a en outre aménagé un parloir pour les rencontres familiales entre la mère et ses enfants. » 180 étrangères « Mais, a poursuivi le parlementaire, il est nécessaire de relever que les détenues libanaises dans cette prison sont au nombre de 30, tandis que les autres, soit 180, sont des étrangères en situation irrégulière, ou entrées clandestinement au pays, et qui attendent leur expulsion. Beaucoup d’entre elles ont purgé leur peine et végètent, dans l’espoir d’une expulsion. C’est un véritable problème et la responsabilité des agences de placement, qui exploitent ces employées comme si elles étaient de la marchandise, avant de les abandonner à leur sort, incapables de faire face aux conséquences légales de leur situation, devrait être retenue. La commission va y songer. » « En ce qui concerne la prison pour hommes, a enchaîné M. Moawad, nous avons également noté quelques améliorations dans le bâtiment, notamment au niveau des latrines, des douches et de l’eau chaude. On y a également réduit le taux d’humidité. Mais le problème, et il faut l’admettre, tient au bâtiment lui-même, une ancienne écurie vieille de 80 ans, jadis utilisée par les Français. Des aménagements y ont été faits, Dieu merci, mais c’est insuffisant. Les droits de l’homme ne sont pas respectés dans cet environnement. Nous sommes en présence de chambres de 6 mètres carrés tout au plus, où s’entassent 40 prisonniers. Quels que soient les aménagements introduits, il est impossible de respecter la dignité humaine dans ces conditions. » Aucun atelier « Par ailleurs, a poursuivi le rapporteur de la commission des Droits de l’homme, la prison ne possède aucun atelier, et aucun espace n’est prévu pour les promenades. Enfin, le niveau des prestations médicales est tel que, dans les cas de maladies simples ne nécessitant pas une hospitalisation, il est impossible d’isoler les malades pour leur permettre de se rétablir. » « Autre remarque : dans cette prison, sur 700 détenus, seuls 200 sont effectivement condamnés à des peines, tandis que les autres sont simplement arrêtés, en attendant d’être jugés. C’est absurde et inadmissible. On ne peut enfermer ensemble de grands criminels et des individus dont l’innocence pourrait être établie. Nous avons décidé de le rappeler, à la première occasion, au gouvernement. Et à ce sujet, nous ne pouvons pas nous demander ce qu’il est advenu du nouveau code de procédure pénale que le Parlement a voté voici un an et demi, et dont nous attendons toujours les décrets de mise en application. Ne pas l’appliquer nous empêchera de régler le grave problème de la surpopulation carcérale et des atteintes à la dignité de l’homme. Dans ce domaine, nous sommes décidés à interpeller le gouvernement, s’il le faut. » « Finalement, a conclu le député, c’est un problème de mentalité. Les prisons ne doivent plus être du seul ressort du ministère de l’Intérieur. Les ministères de la Justice, de la Santé et des Affaires sociales devraient avoir leur mot à dire dans leur réhabilitation. Je ne vous cache pas qu’à l’issue de notre tournée, en 2001, nous avions rédigé un rapport accablant que nous avons décidé, par la suite, de garder secret, parce que sa publication aurait terni l’image du Liban. En trois ans, un progrès sensible a été accompli, mais il reste encore beaucoup, beaucoup à faire ! »

À Tripoli, comme dans le reste du pays, le paysage carcéral est si lamentable que c’est l’image même du Liban qui en est ternie. La commission des Droits de l’homme a achevé, samedi, la tournée d’inspection des prisons entamée lundi dernier, par une visite des prisons pour femmes et hommes du chef-lieu du Liban-Nord. Et une fois de plus, ses membres ont été atterrés...