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Actualités - CHRONOLOGIE

Sur les Campus Détenus libanais en Syrie : le dossier humanitaire qui unit l’opposition

Les étudiants de l’opposition qui se mobilisent pour la libération des détenus libanais en Syrie : le fait en lui-même n’est pas neuf. En effet, le mercredi 13 décembre 2000, à Tabaris, place Gebran Tuéni, des centaines d’étudiants, particulièrement de l’Université Saint-Joseph (USJ) et de La Sagesse, avaient déjà observé un sit-in pacifique, en présence du porte-parole de Solide, Ghazi Aad, et des parents de prisonniers. Il n’y avait pas eu de répression, la manifestation s’était déroulée dans le calme, et les forces de l’ordre avaient tenu leur rôle, celui d’assurer la sécurité du mouvement de contestation sans intervenir de manière injustifiée. À l’époque, les étudiants ne s’étaient pas mobilisés sous la bannière des partis politiques, mais de manière spontanée, pour défendre une cause qu’ils jugeaient juste, pour rejeter ce qu’ils percevaient comme une violation flagrante des droits de l’homme. L’amicale du campus des sciences sociales de l’USJ avait également invité Ghazi Aad et les parents de détenus en 2001 pour évoquer cette question, au moment où personne n’osait encore le faire. Depuis, la question des détenus n’a plus quitté le cercle des revendications estudiantines. Depuis près de deux semaines, les étudiants de l’opposition ont décidé de reprendre, dans les actes, leur mouvement de solidarité avec les prisonniers en Syrie. La semaine dernière, les responsables estudiantins du campus des sciences sociales ont invité le député Farès Souhaid et M. Ghazi Aad à reparler de l’affaire des détenus en Syrie. À l’issue de la conférence, les responsables estudiantins, rue Huvelin, ont décidé de créer une caisse de soutien aux prisonniers libérés en décembre 2000, et qui, depuis, ne parviennent pas à trouver de travail. Et pour cause : considérés comme des rebuts de la société pour avoir combattu les forces syriennes au Liban, ils n’ont, dans la pratique, plus de droits civils, politiques, économiques ou sociaux. Ce qui a incité les jeunes « à vouloir prendre en charge, d’une manière ou d’une autre, les responsabilités que l’État refuse d’assumer », pour reprendre les termes d’un étudiant. Par ailleurs, mercredi, les courants de l’opposition ont pris l’initiative d’appeler à l’organisation d’un rassemblement pacifique pour remettre à l’un des représentants du Haut-Commissariat pour les droits de l’homme à l’Onu, Nabil Rawda, une pétition signée par 10 000 étudiants en faveur de la libération immédiate des Libanais détenus en Syrie, du rapatriement des corps de ceux d’entre eux qui sont décédés et de la publication, par les autorités de Damas, d’une liste de noms des personnes enlevées et capturées par les forces syriennes au Liban puis transférées en Syrie. Mais la manifestation pacifique a été sévèrement réprimée par les forces de l’ordre avant de pouvoir s’acheminer vers l’Escwa. Les services de renseignements auraient également « conseillé » à M. Rawda de rester à l’intérieur du siège de l’Escwa, selon certaines informations. Comment les responsables des quatre courants de l’opposition perçoivent-ils l’action de mercredi ? L’un des cadres estudiantins au sein du Courant patriotique libre (CPL-aouniste), Georges Sarrouh, évoque « toutes les manifestations qui ont été réprimées mercredi, aussi bien celle des parents de détenus que celle de la CGTL ». Pour lui, dans une perspective large, le constat est le même : « L’interdiction de manifester, qui est contraire au droit naturel, a été ignorée par tout le monde, aussi bien par les opposants que par les loyalistes. » Ce qui prouve, dit-il, que « cette mesure est rejetée par toutes les parties ». Par ailleurs, affirme M. Sarrouh, « la défense des libertés publiques et le respect des droits de l’homme sont au cœur de l’action menée par les courants de l’opposition ». « Nous luttons pour le respect des libertés individuelles, qui sont à la base des libertés publiques. L’un ne peut aller sans l’autre. C’est l’une des raisons pour laquelle nous réclamons, entre autres, la libération des détenus libanais en Syrie », précise-t-il. Le responsable de la section estudiantine des Forces libanaises (FL), Daniel Spiro, rappelle de son côté l’importance de la pétition pour la libération des prisonniers qui a circulé dans l’ensemble des universités. « Elle exprime la position d’une grande partie des jeunes Libanais », dit-il. Selon M. Spiro, l’image que la République a donnée d’elle-même mercredi est « l’une des plus laides de l’histoire du Liban ». « Le pouvoir opère une ségrégation entre les Libanais. Il permet les manifestations de non-Libanais et réprime les autres. Cela est révélateur de l’aspect répressif d’un pouvoir despote qui cherche à s’imposer à tout prix. D’autant plus qu’à nos yeux, ces prisonniers sont des héros », ajoute-t-il. Le responsable estudiantin au sein du Parti national libéral, Édouard Chamoun, estime pour sa part que « cette question humanitaire concerne directement les courants de l’opposition, dans la mesure où, entre 1976 et 1990, beaucoup de résistants ont été capturés ». « Par ailleurs, aucun Libanais ne devrait être jugé ou emprisonné en Syrie s’il n’a pas commis de crime sur le territoire syrien. Ces personnes ont été victimes de disparitions forcées sur le sol libanais. Si les Libanais se mettaient en tête de faire la même chose avec des nationaux syriens, quelle serait l’attitude des autorités de Damas ? » s’est-il demandé. Quant au responsable de la Base kataëb, Sami Gemayel, il estime que le mouvement de protestation, même s’il n’a pas abouti à l’Escwa, était « positif, dans la mesure où il a réuni tous les courants de l’opposition autour d’une question humanitaire d’une importance capitale ». « Nous avons organisé ensemble le rassemblement, nous avons manifesté ensemble et avons été réprimés de la même façon. La répression du pouvoir renforce notre unité », souligne M. Gemayel. « Pourquoi certains groupes ont le droit de manifester, arme à la main, pour des terroristes étrangers alors que nous n’avons même pas la possibilité de réclamer nos droits nationaux ? » s’interroge-t-il. Les quatre chefs de sections estudiantines sont par ailleurs d’accord sur le fait de poursuivre l’action pour remettre la pétition au responsable du Haut-Commissariat pour les droits de l’homme de l’Onu, Amine Madani, dès qu’il sera rentré de voyage, c’est-à-dire d’ici à dix ou douze jours. Ce qui augure probablement un nouveau rassemblement, « en présence, insistent-ils, des parents, des étudiants et de Solide ». Michel HAJJI GEORGIOU
Les étudiants de l’opposition qui se mobilisent pour la libération des détenus libanais en Syrie : le fait en lui-même n’est pas neuf. En effet, le mercredi 13 décembre 2000, à Tabaris, place Gebran Tuéni, des centaines d’étudiants, particulièrement de l’Université Saint-Joseph (USJ) et de La Sagesse, avaient déjà observé un sit-in pacifique, en présence du...