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Vie universitaire - Conférence de Ziyad Baroud à l’Institut de sciences politiques de l’USJ De la nécessité de repenser Taëf au niveau de la décentralisation

Chargé de cours à l’Université Saint-Joseph (USJ) et consultant du Pnud sur la décentralisation, M. Ziyad Baroud a jugé nécessaire de « repenser l’accord de Taëf » au niveau de la décentralisation, affirmant que le texte va plutôt dans le sens de la déconcentration. Il s’est par ailleurs demandé si « le tissu sociopolitique libanais est à même aujourd’hui de supporter une restructuration de taille, en l’absence d’un climat politique favorable ». M. Baroud a donné une conférence-débat sur le thème : « Décentralisation, les enjeux politiques d’une technique », dans le cadre des activités de la « Tribune culturelle » organisée par le bureau des étudiants de l’Institut des sciences politiques (ISP) de l’université. Cette tribune est destinée à donner tour à tour la parole à des étudiants et à des personnalités éminentes de la société civile sur des sujets politiques et civiques, dans un style académique. Des personnalités politiques et des étudiants sont ensuite invités à participer au débat qui suit l’intervention principale. La conférence-débat a été animée par notre collaborateur Michel Hajji Georgiou, en présence de plusieurs personnalités politiques, magistrats et professeurs d’université, parmi lesquels MM. Farès Souhaid, Mansour el-Bone, Camille Ziadé, Élie Karamé, Farid el-Khazen (professeur à l’AUB), Antoine Klimos, Raymond Eid, Michel Lyan, Ramzi Jreij, Massoud Achkar, Antoine Haddad (du Renouveau démocratique), ainsi que du professeur Hassane Rifaat. M. Jamil Moawad, président du bureau estudiantin de l’ISP, a présenté l’intervenant en ces termes : « Ziyad Baroud est avocat de métier, mais il fait partie de ces hommes qui se sont dédiés à l’émancipation de la société civile et à la promotion de la culture citoyenne, loin du feu des projecteurs. » Prenant la parole, M. Baroud a commencé par rendre hommage à « ceux qui continuent à perpétuer une certaine résistance culturelle, ou culture de la résistance, face à la culture de la servitude et la médiocrité galopante qui envahit le pays ». Et de poursuivre : « “Décentralisation : les enjeux politiques d’une technique”…. Là aussi, il est question, décidément, de résistance ! Mais alors d’une résistance peu louable : une résistance, en effet, à la mise en place d’un système décentralisé, de nature à permettre aux Libanais une meilleure participation à la vie publique. Pourtant, à première vue, la décentralisation n’est qu’une technique de gouvernement local ; et à ce titre, elle ne devrait pas susciter une résistance de la part de ceux qui appréhendent une politisation du local au détriment du central. Mais à l’évidence, elle n’est pas que technique, et cela justifie, peut-être partiellement, la résistance du politique qui a entravé – délibérément quelque part – son développement, au moins depuis Taëf et jusqu’à ce jour ; d’où l’importance des enjeux politiques en la matière. Ces enjeux que l’on retrouve en fait à deux niveaux : au niveau de la législation qui prévaut, la loi en vigueur (...) et au niveau de la loi à faire, à prévoir, à adopter, et je vise par là ce que l’accord de Taëf a préconisé en 1989 comme réforme en termes de décentralisation, et dont les dispositions sont restées, quatorze ans après tout comme le redéploiement de l’année syrienne, lettre morte. » M. Baroud a ensuite dénoncé la confusion qui règne entre les concepts de « déconcentration » et de « décentralisation ». « Le terme de décentralisation est assez révélateur. Il l’est peut-être davantage en langue arabe où la négation est plus prononcée. En français c’est le “dé” qui fait la différence. Au Liban aussi, il me semble, où c’est effectivement un coup de dé, une affaire laissée au hasard. Et en tout cas, les dés ne semblent pas être jetés, du moins en ce qui concerne la lege feranda, la loi à faire, à prévoir, mais pas au niveau des municipalités où les jeux sont faits », estime M. Baroud. Taëf et l’absence de volonté politique « Tous ces facteurs et d’autres aussi dénotent une tendance du pouvoir central, n’importe lequel, vers une récupération de ce potentiel humain et financier que constituent les municipalités. Décidément, le pouvoir central se méfie de la démocratie dite “des proximités”… Pour paraphraser Léon Gambetta, “la décentralisation, en parler toujours, ne la faire jamais ”. C’est de toute façon la maxime – j’allais dire “nationale” – qui a prévalu depuis l’accord de Taëf en 1989 et jusqu’à ce jour, empêchant la mise en place d’un système décentralisé en bonne et due forme qui viendrait compléter la participation locale municipale », a souligné M. Baroud, avant de procéder à l’analyse des dispositions de Taëf relatives à la décentralisation. « De ce texte, où un seul alinéa sur cinq concerne la décentralisation, tout le reste n’étant que de la déconcentration poussée », l’on dégage, selon M. Baroud, la conclusion suivante : au Liban, compte tenu du pluralisme et de l’interférence entre le découpage du territoire, la loi municipale (décentralisation) et la loi électorale, « la déconcentration poussée ne peut aller de pair avec une décentralisation poussée. Les intersections de compétence, voire les conflits positifs de compétence, risquent d’aboutir à un blocage total des institutions. D’où la difficulté de traduire en textes de loi les recommandations de Taëf, par ailleurs nécessaires, pour favoriser l’épanouissement politique, social et économique des différentes régions ». Et M. Baroud de poursuivre : « Depuis 1989, ces recommandations sont restées lettre morte. Les tentatives de réforme ont buté, à mon sens, sur deux obstacles principaux : l’absence d’une volonté politique claire, irrévocable, convaincue et convaincante, qui puisse mener ce projet de réforme en le dotant de la qualité de “prioritaire” et l’absence, jusqu’en 1998, des acteurs de la démocratie locale : les municipalités et donc l’existence d’une timidité de la revendication au niveau local et dans la société civile. » Analysant les trois projets sur la décentralisation qui ont jusque-là été avancés, M. Baroud a indiqué qu’ils « se limitent à promouvoir une déconcentration poussée mais ne constituent pas des projets de décentralisation, celle-ci étant ailleurs : dans la loi municipale, elle-même sujette à révision au Parlement ». Il a enfin posé une série de questions à débattre, mettant l’accent sur la nécessité de repenser l’accord de Taëf. La discussion a suivi entre politiques et étudiants, avec, en toile de fond, l’une des questions posées par l’intervenant : « Le tissu sociopolitique libanais est-il à même aujourd’hui de se lancer dans une restructuration de taille, en l’absence d’un climat politique favorable ? »
Chargé de cours à l’Université Saint-Joseph (USJ) et consultant du Pnud sur la décentralisation, M. Ziyad Baroud a jugé nécessaire de « repenser l’accord de Taëf » au niveau de la décentralisation, affirmant que le texte va plutôt dans le sens de la déconcentration. Il s’est par ailleurs demandé si « le tissu sociopolitique libanais est à même aujourd’hui de...