Rechercher
Rechercher

Actualités - OPINION

Cellulaire - Une page de la petite histoire de la téléphonie mobile au Liban est tournée Les Allemands optent pour Cellis ; LibanCell aux Koweïtiens

Le suspense aura duré plusieurs mois. De très longs mois, marqués par des guerres verbales, des manœuvres et des tiraillements qui ont ébranlé, à plus d’une reprise, l’appareil de l’Exécutif. Le suspense a pris fin hier – du moins pour cette phase de la privatisation de la téléphonie mobile – avec l’annonce officielle de la décision prise par la société allemande Detecon de porter son choix sur le réseau Cellis pour la gestion du cellulaire pour le compte de l’État, sur une période de quatre ans. Conséquence immédiate et automatique de la décision allemande, c’est la société koweïtienne MTC qui prendra en charge la gestion du réseau LibanCell (toujours pour le compte de l’État et sur une période de quatre ans) du fait qu’elle a été classée deuxième (derrière Detecon) dans l’adjudication relative au réseau LibanCell. Du coup, la société française Orange, filiale de France Telecom (classée deuxième, derrière Detecon, dans l’adjudication relative au réseau Cellis) a été écartée. Les Français étaient présents sur le marché libanais de la téléphonie mobile depuis la mise en service du cellulaire au Liban, en 1994. La société FTML, qui exploitait et gérait Cellis, était détenue à 67 % par France Telecom. Le résultat annoncé hier a été accueilli avec surprise et stupéfaction par une large fraction de l’opinion publique. Les milieux locaux s’attendaient en effet (solidarité européenne oblige) à une sorte de « gentleman’s agreement » franco-allemand au terme duquel Detecon opterait pour le réseau de LibanCell afin de permettre à Orange de prendre en charge la gestion du réseau Cellis. Conformément au cahier des charges, c’est la société ayant présenté le chiffre le plus bas pour chacun des deux réseaux qui devait choisir elle-même lequel des deux réseaux elle désirerait gérer. La décision de la société allemande (arrivée en tête de chacune des deux adjudications) déterminait ainsi le choix du second opérateur. La grande question qui se pose au stade actuel est de savoir pour quelles raisons la solidarité européenne, et plus particulièrement les relations privilégiées entre la France et l’Allemagne, n’a pas joué dans le choix de Detecon (cette dernière est une filiale de la société allemande T Systems, laquelle est une filiale de Deutsche Telekom, et elle est associée à 49 %, dans le cadre d’un consortium, aux deux groupes saoudiens FAL et DETASAD). Interrogé hier soir par L’Orient-Le Jour sur les raisons du choix de Detecon, le vice-président de la société allemande, Dirk Munning (qui a été reçu par le ministre des Télécommunications, Jean-Louis Cardahi), a affirmé que la décision de Detecon a été motivée exclusivement par des considérations d’ordre commercial et technique (voir par ailleurs). Il reste qu’en coulisses, certains hauts responsables, ainsi d’ailleurs que de nombreux Libanais, espéraient quand même que les autorités françaises et allemandes concernées entreprendraient des contacts discrets pour partager le marché entre les sociétés Orange et Detecon. Ce souhait était motivé non pas par un manque de confiance quelconque envers la compagnie koweïtienne (qui possède toute l’expérience et les qualifications requises pour gérer le réseau), mais plutôt par une volonté de consolider et d’affermir l’ouverture du Liban en direction de l’Europe. Confier la gestion de l’ensemble du réseau cellulaire à deux sociétés européennes aurait, certes, rendu l’exploitation du réseau plus cohérente, mais cela aurait surtout constitué un « message fort » de la part du Liban au niveau de son ancrage à l’Europe, d’autant que le pays est lié à l’UE par un accord d’association s’inscrivant dans le cadre du partenariat euroméditerranéen. Des sources dignes de foi indiquent dans ce cadre que la société Detecon a pris sa décision concernant le choix du réseau qu’elle désirerait gérer dès le 1er avril. Le ministre des Télécoms avait été aussitôt informé de ce choix, mais il aurait demandé expressément à la société allemande de ne pas rendre publique sa décision et de laisser passer un délai de quelques jours avant de révéler son choix. Ce laps de temps (de près d’une semaine) aurait pu être mis à profit par les Français pour entreprendre les démarches nécessaires auprès des responsables allemands afin de permettre à Orange de se qualifier pour la gestion de Cellis. À l’évidence, rien n’a été fait à cet égard, entendu que le ministre des Télécoms ne pouvait nullement prendre une quelconque initiative sur ce plan. Maintenant que les dés sont jetés, une étape de transition qui s’étalera sur tout le mois de mai est prévue afin que FTML et LibanCell passent la main aux nouveaux opérateurs. Ces derniers devraient donc être opérationnels d’ici au début du mois de juin. Dans la pratique, quel sera l’impact direct sur les abonnés ? M. Cardahi espère, à court terme, obtenir de la part du Conseil des ministres une décision visant à baisser le coût des communications et des factures. Pour le ministre des Télécoms, il est en effet normal et légitime que les utilisateurs puissent bénéficier de l’économie que l’État enregistrera au niveau de la gestion du réseau du fait de la dernière adjudication. M. Cardahi a déjà saisi le Conseil des ministres d’une proposition en ce sens. Quant à l’affiliation des abonnés à l’un ou l’autre des deux réseaux, elle ne changera pas au cours des prochains mois. Interrogé à ce sujet par L’Orient-Le Jour, M. Cardahi a indiqué que le ministère prépare actuellement un nouveau plan de numérotation des lignes téléphoniques, fixes et cellulaires, afin de mettre en service des numéros à huit chiffres. Ce plan sera prêt à la fin de l’année. C’est alors que les abonnés pourront – sans avoir à supporter des frais supplémentaires – changer d’opérateur et choisir l’un ou l’autre des deux réseaux, suivant leur préférence. Une page est donc tournée dans la tumultueuse petite histoire de la téléphonie mobile au Liban. Mais M. Cardahi n’en est pas pour autant au bout de ses peines. Car plusieurs étapes doivent encore être franchies pour mettre sur les rails le difficile processus de privatisation du cellulaire et de l’ensemble du secteur des télécommunications dans le pays. Reste à espérer que les petites manœuvres politiciennes n’entraveront pas et ne retarderont pas, une fois de plus, la tâche qui reste à accomplir dans ce domaine. Michel TOUMA
Le suspense aura duré plusieurs mois. De très longs mois, marqués par des guerres verbales, des manœuvres et des tiraillements qui ont ébranlé, à plus d’une reprise, l’appareil de l’Exécutif. Le suspense a pris fin hier – du moins pour cette phase de la privatisation de la téléphonie mobile – avec l’annonce officielle de la décision prise par la société...