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Actualités - OPINION

Grosse fatigue

Qu’ils arrêtent bon sang ! Qu’ils cessent d’empoisonner toutes les journées dont le bon Dieu nous crédite. Qu’ils taisent leurs sarcasmes, leurs insinuations fielleuses, cette horrible diarrhée verbale dans laquelle ils se complaisent et dont les relents nous font vomir. Qu’ils s’arrangent pour déverser leur haine à huis clos, leurs frustrations en tête à tête, qu’ils se jettent à la figure les insultes qu’ils n’ont pas encore osé proférer. Mais de grâce, qu’ils ne nous mêlent plus à leurs frasques, qu’ils ne nous prennent plus à témoin dans des affaires qui sentent, à mille lieues, le roussi ou le fric juteux. En un mot comme en cent : basta ! Les Libanais sont fatigués du cirque qui leur est servi à longueur de journée, de la médiatisation outrancière de conflits strictement personnels étiquetés « priorité nationale ». Le cellulaire grésille et c’est le pays tout entier qui vit une crise existentielle, l’électricité est en manque de parrains, en panne de liquidités, en panne tout court et la charge est aussitôt sonnée : malversations, clientélisme, gaspillage de deniers publics, tout y passe. Des invectives, des accusations à satiété, mais de solutions, point. Et le plus beau c’est que toutes ces croisades, ces guéguerres sournoises sont menées au nom du peuple et de ses intérêts supérieurs ! Une « bataille d’Hernani » qui vole bien bas et qui achève de saigner à blanc une population exsangue. De conseils des ministres en réunions parlementaires, le scénario est le même, le déballage idem. Les acteurs changent, le discours, lui, ne diffère pas. Prenez votre courage à deux mains et vissez-vous à votre fauteuil aujourd’hui devant la télé. Place de l’Étoile comme place du Musée, la défense du citoyen et du consommateur dégénérera immanquablement en une guérilla exaltée, filmée sous toutes les coutures. Entre pros et antis, les rares voix sincères qui pourraient se frayer un chemin se dilueront forcément dans la cacophonie générale. *** « Les griefs et antipathies personnelles au sein de l’État sont tels que tout espoir de déblocage semble impossible. Résultat : toutes les instances de la République travaillent au ralenti, certaines même sont quasiment paralysées. Seule la gestion syrienne de la crise, exercée presque à chaque heure de la journée, empêche l’édifice de voler en éclats. » Ces propos, plus réalistes qu’alarmistes, sont ceux d’un diplomate en poste à Beyrouth très au fait des méandres de la politique libanaise. Soumise à de fortes pressions externes, confrontée, sans préavis, à la résurgence de la contestation kurde, la Syrie ne peut permettre une implosion de la carte libanaise. Les impératifs régionaux doivent prévaloir et la décision du Hezbollah de placer ses forces à la disposition du Hamas, aussitôt dénoncée par Israël, crée une situation d’urgence dont devrait tenir compte le pouvoir. Or, celui-ci reste englué dans ses obsessions endémiques, ses querelles venimeuses, sourd aux avertissements qui émanent de toutes parts. Quant aux « conseils fraternels » syriens, ils ont tout juste réussi à préserver une cohabitation forcée, imposant à l’un de ronger son frein, à l’autre d’avaler des couleuvres. La « vox populi », elle, reste évidemment occultée, intérêt supérieur des États oblige ! *** Comme tous les ans, de siècle en siècle, la semaine s’ouvre sur un nouveau Chemin de Croix, le Golgotha annonçant, toutefois, la Résurrection, l’Espérance. Une espérance qui semble avoir déserté les rivages du pays du Cèdre, tant de fois cité dans la Bible. Mais à des milliers de kilomètres de là, un saint homme, à l’automne de sa vie, continue d’espérer, de croire en un Liban meilleur, « démocratique » et préservant une « saine pratique des mœurs politiques ». Il est temps que le Liban recouvre « une souveraineté complète et une liberté sans ambiguïté », vient de dire Jean-Paul II. Faut-il s’en réjouir ou en pleurer de rage et d’impuissance ? Nagib Aoun
Qu’ils arrêtent bon sang ! Qu’ils cessent d’empoisonner toutes les journées dont le bon Dieu nous crédite. Qu’ils taisent leurs sarcasmes, leurs insinuations fielleuses, cette horrible diarrhée verbale dans laquelle ils se complaisent et dont les relents nous font vomir.
Qu’ils s’arrangent pour déverser leur haine à huis clos, leurs frustrations en tête à tête,...