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Actualités - OPINION

Pouvoirs - Les professionnels scrutent la trêve interprésidentielle Garder Hariri serait, ponctuellement, dans l’intérêt du régime

La séance spéciale du Conseil des ministres, ce samedi, constitue un test pour la trêve présidentielle. Qui est, comme la mer de Valéry, « toujours recommencée... » On saura, ce soir, si le débat reste sous contrôle ou s’il y a nouvelle explosion. Les chances et les risques semblent à parité égale. Car s’il est vrai que les dirigeants intéressés au premier chef ont évité de jeter de l’huile sur le feu, ces derniers jours, il est également exact que leurs lieutenants respectifs se sont déchaînés dans les médias. Entretenant la tension autour de sujets brûlants comme les expropriations à Beyrouth, les écoles publiques, le plan 2004 du Conseil du développement et de la reconstruction que Hariri parraine. Sans compter les tiraillements relatifs aux municipales, notamment dans la capitale, avec la présidentielle en filigrane ou en toile de fond. Mais au top niveau il semble que, sur de nouvelles recommandations pressantes des décideurs, on reste déterminé à calmer le jeu. Les loyalistes des deux bords soulignent en chœur, ou plutôt en refrain répété après les tuteurs, que la priorité en ces heures régionales critiques est de maintenir la stabilité politique interne. À défaut d’une union des cœurs, évidemment impossible à réaliser, c’est donc l’unité de façade autour d’un pacte de non-agression qui semble de mise. L’on est donc tacitement convenu de régler les litiges dans le cadre des institutions. Et, le cas échéant, de laisser les dossiers lourds dormir sur les étagères jusqu’à la présidentielle. Des sources informées précisent que les Syriens ont produit leur nouvel effort d’apaisement principalement mardi dernier. Ce jour-là, leur officier traitant au Liban, le chef des services de renseignements, le général Rustom Ghazalé, est entré en contact avec toutes les hautes autorités du pays. Afin de leur transmettre le souhait de Damas de voir l’armistice politique bien respecté, pour éviter des secousses préjudiciables, finalement, pour tous. C’est à la suite de ces démarches, ajoutent les mêmes sources, qu’il a été décidé de réunir le Conseil des ministres ce samedi. Pour examiner la question de la privatisation de la téléphonie mobile, après la récente ouverture de plis et à la lumière d’un rapport circonstancié du ministre qualifié, Jean-Louis Cardahi. La séance doit également se pencher, une deuxième fois (la première étant restée sans résultat) sur le plan 2004 du CDR. Pour tenter de résoudre le conflit sur les expropriations et sur les écoles publiques du secteur Verdun. D’après les professionnels, il est peu probable que les discussions de ce samedi se révèlent acerbes ou empoisonnées. Car personne ne désire indisposer les décideurs. Dans cet esprit l’on s’attend à ce que Hariri ne tente pas de traiter de la question épineuse des prérogatives qui avait donné lieu à un accrochage avec le chef de l’État lors du dernier Conseil des ministres. On sait en effet que le président Lahoud avait alors estimé nécessaire de faire une mise au point assez pointue. En réponse aux critiques qui lui avaient été adressées publiquement sur son droit de présider chaque séance du Conseil des ministres, et d’exercer un droit de regard sur l’ordre du jour. Comme ce différend porte, en fait et au fond, sur Taëf et la Constitution qui en est issue, il a été tacitement convenu de geler la discussion. Puisque, de toute évidence, il est hors de question, pour le moment, de réviser la loi fondamentale. Bien que tout le monde, ou presque, le souhaite, pour des raisons différentes et même opposées. On se range donc généralement à l’avis du patriarche Sfeir. Qui estime d’une part que la Constitution n’est pas un hochet pour qu’on l’agite et la manipule à tout bout de champ, pour un oui ou pour un non. Et qui pense, en outre, qu’avant de réformer Taëf il faut d’abord en parachever l’application. Dans une logique globale qui veut qu’avant de soutenir que les Libanais ne peuvent pas s’autogouverner, il faut leur laisser la chance de le faire. Comme ils en ont le droit. Les prosyriens, de leur côté, conviennent que l’heure n’est pas à la révision. Car tout projet dans ce sens entraînerait fatalement des empoignades acharnées, à caractère confessionnel. Des crêpages de chignon faisant voler en éclats ce minimum de stabilité qu’offre encore la scène politique libanaise. Une crise dont Damas n’entend pas s’embarrasser, car il a bien d’autres chats à fouetter, du fait notamment des pressions US et des menaces israéliennes. Selon des politiciens indépendants, si l’on y regarde bien, le régime a tout intérêt au fond à garder Hariri. Parce qu’il est toujours possible, comme on le fait d’ailleurs régulièrement, de lui faire porter le chapeau, comme on dit familièrement. De se défausser donc sur lui de la responsabilité de la crise et de la dette publique. Alors qu’on n’aurait plus de bouc émissaire commode si l’on devait nommer à sa place une personnalité plus malléable. Dont la gestion ne pourrait, en tout cas, pas réduire la pression économique et financière. Ni faire marquer des points au régime en matière de crédibilité populaire. De plus, ajoutent ces stratèges, tant que Hariri est dans les murs du pouvoir, on peut le harceler pour l’affaiblir. S’il sort et passe à l’opposition, il devient automatiquement plus combatif et plus populaire. Car il lui serait loisible de mobiliser la frange de rue qui lui est proche, comme cela avait été le cas quand il avait été évincé, de 1998 à 2000. Philippe ABI-AKL
La séance spéciale du Conseil des ministres, ce samedi, constitue un test pour la trêve présidentielle. Qui est, comme la mer de Valéry, « toujours recommencée... » On saura, ce soir, si le débat reste sous contrôle ou s’il y a nouvelle explosion. Les chances et les risques semblent à parité égale. Car s’il est vrai que les dirigeants intéressés au premier chef ont...