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Actualités - OPINION

Les opposants modérés reprennent espoir L’intérêt syrien pour la politique locale ne se dément pas

Une courtoisie admirable : nul pôle ne commente publiquement les propos d’Assad. Mais dans les salons, tout le monde ne parle que de cela. Certains mettent l’accent sur la remarque pointue du chef de l’État syrien concernant des municipales redonnant à chacun son vrai volume. D’autres sur ses serments de non-immixtion dans la présidentielle. Ou sur son rappel, en forme d’avertissement voilé (à ceux qu’il taxe d’idéalisme irréaliste), de l’influence syrienne sur la scène locale. De l’ensemble de ces propos détaillés, il ressort que Damas, tout en s’interdisant (ou en se défendant) d’imposer quoi que cela soit, est loin de se désintéresser des rapports de force locaux. C’est bien ce qui incite les formations du cru, même contestataires, à s’abstenir prudemment de réagir aux déclarations du chef de l’État syrien. D’ailleurs, des députés opposants, sans aller jusqu’à se frotter les mains, confient en privé que les positions du jeune président leur semblent courageuses, positives, avancées. Les prenant pour argent comptant, ils affirment qu’elles sont de nature à rééquilibrer, à normaliser les donnes en termes de présidentielle. Pourquoi ? Parce que d’entrée de jeu, Assad a levé une lourde équivoque. Il a en effet rectifié le tir par rapport à une précédente déclaration, dans laquelle il indiquait, au sujet de la reconduction, que toutes les éventualités restaient ouvertes. Cette fois, il s’est dit content d’être interrogé sur ce point précis, pour clarifier les choses. Et pour expliquer que ces possibilités évoquées restent entre les seules mains des Libanais. Qu’eux seuls décideront s’ils veulent ou non de la reconduction. Comme seuls désigneront, le cas échéant, leur nouveau président, choisi par consensus. Avant qu’il ne soit dissipé, le malentendu avait poussé nombre de parties à attribuer une note de haute probabilité à la reconduction. Certains s’y voyaient déjà. Et commençaient même à négocier la formation, la composition du prochain gouvernement de la deuxième ère du régime présent. On évoquait généralement une équipe restreinte. Pour éviter les axes massifs au sein du pouvoir. Et prolonger de la sorte les effets de dislocation, de réduction de volume, sinon de marginalisation, constatés au niveau des municipales. En clair, les loyalistes proches de Baabda se réjouissaient déjà de n’avoir plus à affronter au sein de l’Exécutif une coalition Berry-Hariri déterminante. Il leur faut maintenant sinon déchanter, du moins réviser leurs calculs. Et se remettre à attendre, comme tous les autres. En sachant que pour la reconduction ce n’est pas gagné, ce n’est pas du tout cuit, tant s’en faut. Car nul n’ignore que la majorité des figures composant du paysage politique libanais reste hostile à l’amendement de la Constitution et souhaite que le principe de l’alternance démocratique joue, pour une fois, à fond. Dans cet esprit, les opposants cités estiment qu’il faut pousser à la roue, pour donner plus de corps, plus de consistance à l’engagement de désengagement syrien. Par des concertations intérieures montrant qu’en effet les Libanais laissés à eux-mêmes peuvent s’entendre. Et parvenir sans problème à ce consensus électoral présidentiel évoqué par Assad. Ils estiment que cela est très possible. Pourquoi ? Parce qu’aujourd’hui, à leur avis, personne ne peut être contre cette aspiration naturelle, légitime, à l’autonomie de décision que défendent, pour le Liban, la France et l’Amérique. Que personne non plus n’est viscéralement hostile à la Syrie en tant que telle. Donc qu’il est facile de trouver un président qui ne constitue un défi ni pour les Occidentaux ni pour les Syriens. Et qui ait à cœur, en priorité, l’intérêt bien compris de sa propre nation. Retour à l’épisode intercalé relatif à la reconduction. Selon des sources proches de Damas, la direction syrienne a été fortement agacée par le comportement de certains de ses alliés libanais. Qui ont exploité à fond la petite phrase assadienne antérieure sur les éventualités ouvertes. Afin de faire croire que la reconduction était déjà une décision définitive. De plus, selon ces sources, il y a eu de la part des mêmes fidèles prosyriens des abus notables, des infractions aux lois comme aux usages, faisant penser à tort à une couverture syrienne. En d’autres termes, ces agissements erronés, illicites, ont nui à la réputation et à la crédibilité morale des tuteurs. À un moment où ils sont, en tant que tuteurs, dans le collimateur des Occidentaux. D’où, sans doute, le retour en grâce de Hariri, opposé à ces comportements. Encore que cette réhabilitation doit être relativisée. Car la Syrie étant équidistante de toutes les parties, comme l’a précisé le président Assad, personne ne se voit remettre totalement carte blanche. Enfin, en ce qui concerne la présidentielle, toutes les parties locales ou presque sont d’accord pour estimer que la question ne peut être dissociée du contexte régional et international. Ce qui signifie en pratique que lorsque la Syrie annonce la normalisation, elle invite en fait l’autre grand électeur, les États-Unis, à s’entendre plutôt qu’à se disputer, sur la question. Afin d’inspirer ensemble aux Libanais le choix qu’il convient de faire. Philippe ABI-AKL
Une courtoisie admirable : nul pôle ne commente publiquement les propos d’Assad. Mais dans les salons, tout le monde ne parle que de cela. Certains mettent l’accent sur la remarque pointue du chef de l’État syrien concernant des municipales redonnant à chacun son vrai volume. D’autres sur ses serments de non-immixtion dans la présidentielle. Ou sur son rappel, en forme...