Rechercher
Rechercher

Actualités - REPORTAGE

GROS PLAN - Elle a reçu le Berlin Today Award dans le cadre des Berlinales 2004 « BerlinBeirut » : le cri d’amour de Myrna Maakaron

Myrna Maakaron a promené son nez mutin et ses boucles brunes dans plusieurs longs-métrages libanais. On retiendra surtout sa prestation dans « Il était une fois Beyrouth : histoire d’une star », de Jocelyne Saab, et « Civilisées », de Randa Chahal Sabbag. Elle a également réalisé des courts-métrages : « Conte d’adulte », primé au Festival du film de Beyrouth, et « Confusion », sélectionné pour participer à un grand nombre de festivals internationaux. Et, dernièrement, une sorte de docu-fiction subjective intitulée «Berlin Beirut », qui a reçu le Berlin Today Award, dans le cadre de la première Berlinale Talent Campus. Rencontre (par e-mail interposé) avec un jeune talent prometteur. Et gros plan sur son court-métrage, qu’elle présente comme une déclaration d’amour pour sa ville natale, Beyrouth, et l’autre, sa ville d’adoption, puisque la jeune cinéaste a épousé, il y a deux ans, un musicien allemand. Dans son essai filmique, Myrna Maakaron associe des images et des scènes tournées à Beyrouth et à Berlin. Elle fait ressortir les similitudes et les parallèles rendus évidents par le passé récent de ces deux villes, mais aussi les différences de nature éthique, religieuse et historique. Scandé au rythme des sept jours de la semaine, le film doit sa cohésion aux commentaires très personnels de la réalisatrice. Flash-back sur le début de l’aventure. Comment la Libanaise s’est-elle présentée au Campus berlinois des talents ? «Pour participer au Berlinale Talent Campus, je devais avoir fait des études de cinéma ou avoir travaillé dans un des domaines du cinéma, explique Maakaron. En plus, il fallait faire un film d’une minute, sujet au choix. J’ai réalisé un film qui s’intitule 28. En février 2003, je reçois une invitation au Talent Campus (ainsi que 470 autres réalisateurs, acteurs, producteurs, monteurs...) qui s’est déroulé, bien évidemment, à Berlin». Le Berlinale Talent Campus 2003 était le premier Campus qui se faisait dans le cadre du Festival de Berlin. « L’initiative est venue du directeur du festival, Dieter Kosslick, qui a beaucoup apporté au festival depuis sa nomination. » Le Talent Campus c’est, en fait, une semaine d’ateliers de travaux donnés par des professionnels pour les 500 participants. Durant cette semaine, un concours, le Berlin Today Award (organisé par le Medienboard Berlin Brandenburg), a été lancé et concerne tous les participants. «Il fallait écrire un court-métrage de 10 à 20 minutes représentant notre vision du Berlin d’aujourd’hui. C’etait ma première visite de la ville. Dès que le train est entré en gare et que je découvrais les rues à travers la vitre, je commençais à sentir un rapprochement avec ma ville, Beyrouth : quelques murs étaient criblés de balles. Je savais que mon film s’intitulerait BerlinBeirut. L’idée est venue tout se suite, mais a pris du temps pour être développée.La date limite pour le dépôt des scenarii était le 16 avril 2003, nous étions environ 110 participants.» En mai 2003, trois projets sont sélectionnés. Berlin Backstage, de Veronique Raymond et Stephanie Chuat (Suisse) ; Best of The Wurst, de Grace Lee (USA) et, bien sûr, BerlinBeirut de Myrna Maakaron (Liban). Chaque projet a reçu une subvention de 50 000 euros en espèces et 20 000 euros en sponsoring. Huit mois de gestation pour BerlinBeirut, dont le montage s’est achevé en décembre 2003. BerlinBeirut a reçu le premier Berlin Today Award, le 10 février 2004, pendant le Festival de Berlin et dans le cadre du deuxième Berlinale Talent Campus. « C’etait une très belle surprise pour l’équipe et pour moi. Quand mon nom a été annoncé, je n’ai plus rien entendu autour de moi, des larmes coulaient toutes seules, je ne trouvais plus les marches pour arriver sur scène. Bien sûr j’ai ressenti une immense joie. Et une jubilation non moins importante, car ce film a dû toucher les cœurs et c’est très important car ça me donne la force et la confiance de continuer à faire ce que j’aime le plus dans la vie. C’est aussi un prix pour le Liban, pour Beyrouth....» Le trophée est une véritable œuvre d’art, pèse environ 8 kilos et représente un papillon en forme d’écrin. En y ajoutant de l’eau et en le mettant au frigo, on peut en extraire de très beaux spécimens de papillons … des sculptures de glace. Cette œuvre a été créée spécialement pour le Berlin Today Award par un jeune artiste Danois, Jeppe Hein. La bicyclette bleue de Myrna Que représente ce film pour Myrna Maakaron ? « Le sujet du film est le rapport entre Berlin et Beyrouth. Le premier jet du scénario était très proche d’un documentaire classique. Et petit à petit, au fur et à mesure des réécritures, l’histoire est devenue plus personnelle. Il est devenu évident pour moi que tout le monde ne voyait pas nécessairement des similitudes entre ces deux villes. » Pour rendre le film plus accessible, la jeune cinéaste s’est présentée comme étant le lien qui rapproche, qui unit les deux capitales. Dans le court-métrage, Maakaron se promène dans les rues des deux villes. Robe couleur lilas aux manches papillonnantes, parapluie orange d’époque à la main, apparition féerique, irréelle. De temps en temps, elle trimbale une bicyclette bleue vieille de 30 ans, made in Berlin Est. Et elle raconte des histoires, des anecdotes, des souvenirs liés aux deux villes. C’est parfois drôle, parfois triste, et souvent les deux à la fois. Les thèmes abordés : la guerre, la destruction, la reconstruction du centre-ville, la séparation Est et Ouest.... Cette correspondance entre les deux villes, comment se traduit-elle dans le film, c’est-à-dire en langage cinématographique? «Berlin et Beyrouth deviennent une seule ville tout le long du film. Un seul espace. Une des raisons aussi pour laquelle le titre du film est écrit en un seul mot. Il est vrai que le tournage a eu lieu séparément dans les deux villes. Ce n’est qu’après le montage que le film a pris sa vraie forme.» On y voit par exemple l’actrice arpentant une ruelle de Beyrouth. Au tournant, on la retrouve à Berlin. Le spectateur est confus, il ne sait pas s’il est en Allemagne ou au Liban. «C’était ma façon de montrer à quel point deux villes sont similaires, jusqu’à un certain point.» Frank Maakaron a composé une musique pour chaque séquence, ainsi qu’une chanson qui s’intitule aussi BerlinBeirut. La jeune cinéaste sait que ce prix va probablement lui ouvrir plus facilement les portes des producteurs. Mais elle garde les pieds sur terre. «Tout dépend de moi finalement. Si je ne travaille pas tous les jours et si je ne trouve pas une bonne idée à développer, tout cela n’a pas de sens. Je ne me fais pas de soucis pour les subventions et le soutien extérieur, ce qui me tracasse le plus c’est de trouver une bonne idée et d’écrire une belle histoire.» Pour ce qui est de la diffusion u Liban de BerlinBeirut, Maakaron indique que le Goethe Institut serait intéressé par l’organisation de la première. Les dates n’ont pas encore été fixées. «Dans les salles de cinéma au Liban, je pense que c’est hors de question, car c’est un court-métrage de 23 minutes. Et les distributeurs libanais n’accepteront pas de le projeter avant un long-métrage américain, comme c’est souvent le cas en Europe.» Et l’on s’étonne encore pourquoi nos jeunes talents vont semer ailleurs les graines de leur génie… Maya GHANDOUR HERT

Myrna Maakaron a promené son nez mutin et ses boucles brunes dans plusieurs longs-métrages libanais. On retiendra surtout sa prestation dans « Il était une fois Beyrouth : histoire d’une star », de Jocelyne Saab, et « Civilisées », de Randa Chahal Sabbag. Elle a également réalisé des courts-métrages : « Conte d’adulte », primé au Festival du film de Beyrouth, et...