Rechercher
Rechercher

Actualités

LITTÉRATURE Churchill a reçu le prix Nobel de littérature par défaut

Des archives de l’Académie suédoise qui viennent d’être rendues publiques montrent qu’en 1953, les académiciens ont préféré attribuer le prix de littérature à Winston Churchill, plutôt que de ne pas l’attribuer du tout, faute de candidats jugés dignes de la récompense. Le Premier ministre britannique, qui fut sans aucun doute l’un des hommes politiques les plus éminents du XXe siècle, fut également un écrivain prolifique, mais son nom parmi les happy few nobélisés pour leurs écrits ne cesse de surprendre. L’Académie suédoise n’était pas vraiment convaincue par ses qualités littéraires quand elle lui a attribué le prix. Mais elle a finalement conclu que les autres lauréats possibles étaient des écrivains moins convaincants encore. Le nom de Churchill a refait son apparition à la dernière minute, quand le jury a dû se rendre à l’évidence: les trois écrivains encore en lice parmi les 25 qui avaient été retenus cette année-là n’étaient pas dignes d’être nobélisés. Les trois auteurs en question étaient le poète américain Robert Frost, le romancier et poète britannique Walter de la Mare et l’Islandais Halldor Laxness. Ils avaient déjà battu leurs 22 rivaux, au nombre desquels figuraient l’Américain Ernest Hemingway, le Britannique Graham Greene, l’Espagnol Juan Ramon Jiménez et les Français Jules Romains et Julien Benda. «En ce qui concerne les trois candidats que le comité a recommandés à l’académie, il me semble, après y avoir regardé de plus près, qu’il est douteux qu’ils répondent complètement et sans aucun doute aux exigences de la récompense», a alors écrit à ses pairs Anders Oesterling, le secrétaire perpétuel de l’Académie suédoise. Ce perfide document avait été soigneusement classé et rangé dans une chemise en carton déposée dans les caves de la prestigieuse institution. Dans la mesure où l’académie voulait absolument éviter de ne pas attribuer de prix, M. Oesterling a suggéré qu’il était «réaliste de considérer à nouveau la nomination déjà répétée de Winston Churchill». Le nom du Premier ministre britannique avait déjà été avancé en 1946 par un académicien pour ses travaux historiques et biographiques, comme Savrola, Marlborough, Mes jeunes années et La crise mondiale. Il l’a été régulièrement les années suivantes. Mais quand le comité Nobel, un petit groupe d’académiciens chargés de sélectionner des noms, avait demandé une revue de l’œuvre du grand homme en 1946, le secrétaire perpétuel d’alors, Per Hallstroem, n’avait pas été tendre. De Savrola, une œuvre de jeunesse: «Vous n’avez pas besoin d’en lire long pour en découvrir le vide.» Et s’il concède quelques qualités à Mes jeunes années, il juge que La crise mondiale, un ouvrage sur la Première Guerre mondiale, est un pur livre d’histoire. Seule Marlborough, la biographie en quatre tomes que Churchill a consacrée à son ancêtre, trouvait grâce à ses yeux. Deux ans plus tard, un autre académicien, l’historien Nils Ahnlund, était plus complaisant. Pour lui, La crise mondiale est si bien écrite que Churchill donne à ses lecteurs l’impression d’avoir vécu eux-mêmes les événements. «Ce qui crée une telle impression est incontestablement de la littérature.» En outre, M. Ahnlund a pris en compte les discours du Premier ministre, qui, avec le reste de l’œuvre, en faisaient selon lui un lauréat fort acceptable. Mais cinq années sont encore passées avant que son nom ne ressurgisse au dernier moment. Des académiciens avaient en outre fait part de leurs réserves, craignant que l’attribution du Nobel de littérature à un homme d’État en activité ne soit interprétée comme un geste politique. Le 15 octobre 1953, Sir Winston Leonard Spencer Churchill a décroché le prix «pour sa maîtrise des descriptions historiques et biographiques ainsi que pour ses brillantes qualités oratoires dans la défense des grandes valeurs de l’humanité». Parmi les auteurs qu’il a battus, Ernest Hemingway a reçu le prix l’année suivante, Halldor Laxness en 1955 et Juan Ramon Jiménez en 1956.
Des archives de l’Académie suédoise qui viennent d’être rendues publiques montrent qu’en 1953, les académiciens ont préféré attribuer le prix de littérature à Winston Churchill, plutôt que de ne pas l’attribuer du tout, faute de candidats jugés dignes de la récompense. Le Premier ministre britannique, qui fut sans aucun doute l’un des hommes politiques les plus éminents...