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Actualités - CHRONOLOGIE

RENCONTRE - Un parfait mélange de cultures et de talents François Lamore, un artiste double

Lamore. Ça s’écrit comme ça se prononce ; avec amour et une pointe de sensualité. Et lorsque François Lamore prononce son nom, il le fait, délicieusement, avec un accent importé – malgré lui – des États-Unis où il est né, inspiré de l’Italie de ses grands-parents et de la France de sa mère ; un pays qu’il aime et où il réside. Ajoutez à cela des yeux bleus, un regard froid et un sourire retenu, avec quelques expressions libanaises empruntées à sa femme Pauline Abdel Jalil, et vous avez devant vous un artiste riche, sur le point de s’exprimer. «Je suis né à Washington DC ; il y a vingt-trois ans que je vis en France. Je ne me sens pas du tout américain, j’ai quitté les USA en 1977, déjà profondément allergique à la politique de mon pays. » C’est ainsi que se présente François Lamore, un véritable artiste et le fruit de toutes ces cultures héritées ou choisies, de ces arts épanouis à travers le temps; un être pétri par des pays, des rencontres et surtout par une grande sensibilité, une intuition mêlée à de la spiritualité. Son langage utilise les mots et la poésie ; français ou anglais, qu’importe, pourvu qu’ils parlent des choses qui le touchent, le monde, ce monde, à son grand regret, « saturé par un esprit de consommation ». « Le problème, souligne-t-il, réside dans la difficulté, aujourd’hui, d’atteindre son public. » Son langage passe aussi par la peinture, son activité première, sa passion presque silencieuse lorsqu’il est seul devant une toile et qui se met à parler quand il trouve les couleurs, les techniques, qu’il retrouve les thèmes qui lui sont chers ; sa passion intime qui devient déclarée quand il l’étale sur des tableaux qui font parfois 4 mètres. « Je suis très autodidacte, j’ai commencé à peindre – à l’huile – lorsque j’avais 10 ans. Mes parents étaient très proches de la nature. Tous les deux avaient un œil très averti, mes premiers sujets étaient donc inspirés de la nature. » Après des études en lettres et arts plastiques aux États-Unis et en France, « pour apprendre à maîtriser des techniques que je connaissais mal », François pose ses bagages d’artiste à Aix-en-Provence, enseigne la peinture, rencontre des artistes importants, tels André Masson, Jean Hélion ou encore Diego Giacometti. Il s’essaye aux décors et costumes de ballets, Petrouchka de Stravinsky, la Symphonie fantastique de Berlioz et Midsummer Night Dream de Britten, et conçoit des fresques murales. Il expose une première fois en 1977 à Aix, puis ce sera au tour de Paris, Tokyo, Hambourg, Nice, Venise, Barcelone, Milan, Rome de le recevoir ; il écrit et édite ses poèmes, Isotopes, Sky Fang, et In Time at Nine. « L’écriture ne va pas sans la peinture, ce sont deux manières parallèles, pour moi, de m’exprimer. » Des symboles partout François Lamore a des thèmes récurrents, presque obsessionnels, mais en douceur, qui viennent hanter son esprit et son travail, et qu’il ramène de ses voyages, « des gens, des voix, des vies, des sensations ». Que ce soit un poisson vu dans un marché à Naples, une sensation éprouvée à Beyrouth – des images de mer, des bâtiments détruits, des fumeurs de narguilé – ou une prédilection ressentie à New York, « je prends ces images, je les mets dans une valise et je les réutilise après ». En 1996, François a même peint cette forte intuition, « un éléphant, symbole multiple, socle de la terre, qui tient une ville, qu’on pense indomptable, sur son dos. Autour des tours dressées, on peut voir des avions, comme des mouches qui rôdent. Dans ma tête, explique l’artiste, l’homme occidental est en train de détruire la terre. J’ai toujours pensé que le jour où il l’aura détruite, ce socle va s’effondrer et la ville va tomber ». Outre ses nombreuses expositions partout dans le monde et bientôt au Liban, et une décoration murale pour un restaurant au centre-ville de Beyrouth, François a pu, dans le cadre de la collection Duo qui met en correspondance, pendant un an, un poète et un peintre autour d’un même thème, être tour à tour l’un, puis l’autre. « J’ai illustré Les doigts de Salah Stetié, et je travaille actuellement à écrire, en parallèle aux dessins d’un peintre napolitain, Oreste Zevola, des poèmes sur Beyrouth. Beyrouth que j’adore est un prototype des villes de l’avenir, avec des problèmes très actuels et un superbe mélange de cultures, de religions et de politiques ; surtout, elle a vécu des blessures déchirantes. » Entre un Gustave Moreau et un Matisse qui l’inspirent, entre impressions du passé et prophéties, entre réactions et réflexions, « des ondes qui gèrent notre vie », François Lamore trimballe avec lui ses visions d’un monde meilleur, plein d’animaux, – le hibou, l’« oiseau du bonheur » est son ex-libris –, de nature et de silhouettes d’êtres aimés ou désirés. Et le sourire de son fils Nour Buston-Hart, surnommé « Nour de la lumière ». « J’ai l’impression de travailler très lentement. Je n’ai pas le temps de faire un dixième de ce que j’ai envie de faire » dit-il, avant de repartir à ses images qu’il n’a en fait jamais quittées. Carla HENOUD



Lamore. Ça s’écrit comme ça se prononce ; avec amour et une pointe de sensualité. Et lorsque François Lamore prononce son nom, il le fait, délicieusement, avec un accent importé – malgré lui – des États-Unis où il est né, inspiré de l’Italie de ses grands-parents et de la France de sa mère ; un pays qu’il aime et où il réside. Ajoutez à cela des yeux...