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Actualités - OPINION

Vie politique - La course électorale ne débuterait réellement qu’en juin La polémique Moawad-Obeid relance le débat sur la présidentielle

L’échange polémique fortement médiatisé entre le ministre des Affaires étrangères Jean Obeid et la députée Nayla Moawad a relancé hier le débat sur la présidentielle, au grand dam des milieux politiques qui cherchent à retirer ce dossier des joutes politiques, sous prétexte qu’il est trop tôt encore pour évoquer l’échéance de la présidentielle. D’autant plus que cette échéance s’impose irrémédiablement sur la scène politique, tant et si bien que les positions et les actions des responsables et des différentes parties en sont directement affectées. Ainsi, en répondant d’une manière cinglante aux propos de M. Obeid – lequel avait laissé entendre, au lendemain de l’annonce par la députée de sa candidature à la présidentielle, qu’il ne suffit pas de manifester le désir d’être candidat, mais qu’« il faut aussi en avoir les capacités » –, Nayla Moawad a-t-elle brisé le mur du silence dix mois avant l’échéance, obligeant les pôles politiques à débattre dès à présent de la question. Une manœuvre qui concorde avec le point de vue des pôles de l’opposition, notamment au sein du Rassemblement de Kornet Chehwane, selon lequel le fait de mettre continuellement sur le tapis l’échéance de la présidentielle constitue une manière de barrer la route à une prorogation ou à une reconduction de dernière minute qui clôturerait le dossier à la hussarde. En effet, le groupe de Kornet Chehwane et d’autres opposants s’étaient opposés à cette loi du silence au sujet de l’échéance constitutionnelle. Aussi avaient-ils appelé toutes les forces vives à créer une dynamique concernant la prochaine présidentielle, afin de permettre à la personnalité qui jouit des capacités nécessaires et demandées d’accéder à la présidence de la République. Une dynamique qui passe par la présentation, par les présidentiables, de leurs programmes électoraux et de leurs projets à l’opinion publique. Ce qui contribuerait selon eux à une « relibanisation » des élections. Cette campagne médiatique sur la présidentielle a coïncidé avec la session parlementaire pour l’interprétation des articles 60 et 70 de la Constitution. Une session perçue par certains politiques et certains opposants comme une manière de tâter le pouls, de sonder les opinions concernant un éventuel amendement de la Constitution. Le cas échéant, cela pourrait servir plus tard à faciliter la reconduction du mandat, poursuivent ces opposants, qui rejettent tout amendement constitutionnel en arguant du principe selon lequel l’amendement ne saurait être qu’exceptionnel : la Constitution est la loi fondamentale qui régit l’organisation des pouvoirs, il ne faudrait donc pas qu’elle soit amendée facilement comme une quelconque loi, d’où l’existence d’un mécanisme spécial pour l’amendement de la Constitution. Les milieux politiques se sont par ailleurs arrêtés sur les propos du président Bachar el-Assad au sujet de l’échéance présidentielle, qui n’ont pas fait l’unanimité au sein de la classe politique et qui ont suscité de nombreuses interprétations. Selon certains milieux, le président Assad a voulu adresser une multitude de messages à travers ses propos, notamment en direction de Washington, de Paris et du Vatican. Ainsi a-t-il affirmé que Damas ne se mêlera pas de l’échéance présidentielle sous prétexte qu’il s’agit d’une affaire interne et que la Syrie donnera son soutien au président qui fera l’unanimité parmi les Libanais. En d’autres termes, Damas n’impose aucun président ni ne fait pression pour déterminer à l’avance le cours des événements. Aussi les autorités syriennes n’encouragent-elles aucun candidat et ne plaident-elles pas en faveur de la prorogation du mandat actuel. Ce qui pousse certains analystes à penser que la Syrie veille pour l’instant à ne pas prendre de position définitive sur l’échéance présidentielle, notamment en ce qui concerne la question de la prorogation ou de la reconduction, et cherche par-dessus tout à garder la totalité de ses cartes en main. Elle laisse faire, en gardant l’échéance présidentielle dans un contexte purement libanais. C’est du moins l’avis d’un responsable, rapporté par un député : la présidentielle est une échéance interne, et les Libanais ont leur mot à dire, contrairement aux propos selon lesquels tout est imposé de l’étranger sans que les forces politiques influentes sur la scène interne, comme Bkerké par exemple, ne soient consultées. Amendements constitutionnels en perspective La joute verbale entre Nayla Moawad et Jean Obeid a donc rouvert la boîte de Pandore, à l’heure où la Syrie veille à se tenir à égale distance de toutes les parties, en prenant en considération le fait que certains développements, qui auront très probablement des incidences sur ce dossier, pourraient se produire avant la date de l’élection. Certains milieux politiques évoquent pour leur part des scénarios éventuels pour le déroulement de l’échéance, comme par exemple un panier d’amendements constitutionnels au printemps prochain, visant notamment à la réduction des mandats et des prérogatives du président de la République et du mandat du président de la Chambre. Ces amendements, qui entreraient en vigueur immédiatement après leur adoption, réduiraient le mandat du président de la République à une durée de cinq ans renouvelables une fois. Face à ces scénarios, l’opposition manifeste sa désapprobation et exprime son étonnement devant l’évocation de la question des amendements constitutionnels à la veille de la présidentielle. Les opposants s’interrogent sur la raison qui incite le débat politique à se focaliser sur l’amendement de la Constitution à chaque fois que l’échéance présidentielle approche, si ce n’est pour garantir la prorogation ou la reconduction du mandat. Certains candidats potentiels à la présidentielle jugent quant à eux le fait d’abattre leurs cartes maintenant comme prématuré, dans la mesure où la hâte fait perdre des opportunités. Aussi affirment-ils que la polémique entre M. Obeid et Mme Moawad sert en définitive d’autres candidats à la présidence. Selon eux, il est encore trop tôt pour parler de la course au fauteuil présidentiel, qui ne débutera réellement qu’en juin prochain, à l’aube de l’été. D’ici là, pensent ces candidats potentiels, la situation se sera clarifiée sur le terrain, de même que les positions des forces régionales et internationales impliquées dans le processus. Dans ce sens, précisent-ils, que le président de la République libanaise a toujours été élu par le biais d’un consensus régional et international, et qu’il en sera toujours ainsi. De l’avis d’un homme politique, l’équation sera cette année la suivante : le candidat sera choisi par les Syriens, devra bénéficier d’une acceptation des États-Unis, d’un aval chrétien et d’un appui musulman. En d’autres termes, les positions des différentes parties locales influent bel et bien sur le processus. C’est pourquoi les candidats potentiels hésitent à déterminer leurs positions. Certains d’entre eux estiment même que l’étape est délicate et pleine de dangers, dans la mesure où elle pourrait les amener à sortir de la course et à brûler leurs cartes. Aussi préfèrent-ils rester à l’écart des polémiques politiques et des dossiers chauds en attendant le moment propice, aux plans local et régional, pour agir enfin. Philippe ABI AKL

L’échange polémique fortement médiatisé entre le ministre des Affaires étrangères Jean Obeid et la députée Nayla Moawad a relancé hier le débat sur la présidentielle, au grand dam des milieux politiques qui cherchent à retirer ce dossier des joutes politiques, sous prétexte qu’il est trop tôt encore pour évoquer l’échéance de la présidentielle. D’autant plus...