Rechercher
Rechercher

Actualités - OPINION

Vie politique Pourquoi les résultats des municipales ne refléteront en rien le rapport de forces entre loyalistes et opposants

Il est désormais acquis que les élections municipales auront lieu en temps prévu. Et que rien ne pourrait justifier un quelconque report – à part peut-être des « rebondissements » régionaux desquels le Liban n’est pas à l’abri. D’autant qu’en réalité, aussi bien les loyalistes que les opposants rivalisent quotidiennement à qui mieux proclamera sa détermination à ce que ces élections se déroulent normalement, comme si aucun d’entre eux ne voulait passer pour le responsable, ou montrer qu’il en redoute, d’une manière ou d’une autre, les résultats. Sauf que la question qui se pose d’elle-même en cas de non-report des municipales est la suivante : qui en ressortirait vainqueur ? Le pouvoir et ses hommes ? Ou l’opposition et tous ceux qui sont derrière elle ? Les observateurs politiques scrupuleux, neutres et bienveillants, estiment toutefois que les résultats des municipales ne reflètent en rien ce qu’est censé être le vrai rapport de forces entre opposants et loyalistes. Et n’annoncent aucunement, non plus, comment pourraient être les prochaines législatives. Parce que ce qui primera au printemps 2004, dans la plupart des villes et des villages, ce sera la lutte entre les familles, entre les membres de telle ou telle partie locale, entre tel ou tel courant politique, entre des jeunes, aussi... D’autant qu’une famille donnée qui appuierait en bloc un quelconque député à des législatives se diviserait sans aucun état d’âme en aficionados de différents candidats aux municipales. Et sans compter que les alliances visant à la formation des listes ne sont pas les mêmes aux deux échéances ; que les résultats des alliances au cours des municipales ont souvent de sérieuses répercussions sur les pactes que connaîtront les législatives prochaines. C’est pour cela qu’il serait particulièrement intéressant d’attendre et d’observer les pactes à venir, dans l’ensemble des régions, entre les partis et les forces politiques – notamment dans le Mont-Liban. Est-ce que les différentes composantes d’une opposition somme toute assez plurielle arriveront à s’entendre, à s’unir, face aux candidats appuyés par le régime ? Où iront-ils divisés, en rangs épars ? Est-ce que le Hezbollah et Amal formeront des listes consensuelles pour couper l’herbe sous le pied d’autres listes qui pourraient, en cas de tiraillements entre les deux formations chiites, triompher au Liban-Sud ? Est-ce que le courant du Futur sera capable de créer des listes aptes à apporter, comme en 2000, la victoire à Rafic Hariri ? Les observateurs cités plus haut disent également que si le pouvoir avait la bonne et heureuse idée de ne pas intervenir dans la formation des listes afin de privilégier ses candidats, il ne manquerait pas de le faire ensuite, auprès des membres élus, et ce dans le but de faire élire le président (du futur conseil municipal) qui lui est le plus proche. D’autant qu’il arrive souvent que des conseillers municipaux élus sur les listes de l’opposition virent au loyalisme effréné au moment de l’élection du président. À cause, justement, de l’intervention du pouvoir en place. Et dans ce cas de figure, le président élu grâce au régime présidera un conseil d’opposants, les frictions et les tiraillements paralyseront sans aucun doute le travail de la municipalité, les administrés auront droit à une démission collective, et l’on procédera à une municipale partielle... C’est un scénario qu’ont d’ailleurs déjà connu plusieurs villes, plusieurs bourgades, en raison de l’absence de toute harmonie entre président et conseillers. Ce qui a poussé bon nombre d’acteurs politiques à demander une élection du président et du vice-président du conseil municipal au suffrage direct, et non par les membres eux-mêmes, dans le but d’éviter toute immixtion et toute pression du pouvoir dans l’élection du président. Une demande appuyée par la commission parlementaire de l’Administration et de la Justice, parce qu’elle renforce la liberté de l’électeur et le respect de la démocratie. Ainsi, les prévisions évoquent une victoire de l’opposition, qui verrait un bon nombre de ses membres occuper des places au sein des futures équipes municipales. Sauf que l’on n’envisage, pour l’opposition toujours, qu’un nombre réduit de présidences au cas où le pouvoir s’arrogerait le bon plaisir d’intervenir et de faire pression, pour compenser les défaites de ses hommes au premier tour de ces élections. Voilà pourquoi les résultats de ces municipales ne révéleront pas grand-chose, ni en elles-mêmes ni pour les législatives à venir. En fait, la raison est triple. Un : les prochaines législatives obéiront à une nouvelle loi électorale, censée être juste et équilibrée, garante de la meilleure représentativité qui soit, toutes catégories et tous âges confondus. Et de facto, cette loi, le découpage à venir provoqueront de nouvelles alliances, des rapprochements inédits, dans chaque circonscription. Deux : il est peu probable que cette loi électorale nouvelle soit l’œuvre de l’actuel mandat, qui n’aura pas le temps matériel pour la rédiger et pour la faire approuver. Mais plutôt celle du prochain pouvoir, qui s’installera en principe en novembre de cette année, et dont on ne peut pas connaître, dès aujourd’hui, ni deviner, les tendances, les positions ou les préférences – proportionnelle, majoritaire, petite ou moyenne circonscription, etc. – qu’il aurait sur la couleur et la nature de cette loi électorale. Et trois : on ne sait pas non plus si le prochain pouvoir préférera garantir, pour sa toute nouvelle et toute vierge image de marque et pour sa crédibilité, des élections propres, au cours desquelles ne prévalera que la vox populi. Ou si l’identité politique du futur président de la République signifiera la victoire législative ou municipale de tous ceux appartenant au même camp que lui. Émile KHOURY

Il est désormais acquis que les élections municipales auront lieu en temps prévu. Et que rien ne pourrait justifier un quelconque report – à part peut-être des « rebondissements » régionaux desquels le Liban n’est pas à l’abri. D’autant qu’en réalité, aussi bien les loyalistes que les opposants rivalisent quotidiennement à qui mieux proclamera sa détermination...