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Actualités - REPORTAGE

TRAFIC - Des installations entièrement informatisées, mais des files d’attente interminables Au centre de contrôle mécanique de Hadeth, la grogne des mécontents

«Le taux d’émission de CO de ma voiture était de 6 il y a quelques heures », s’exclame une automobiliste mécontente. « Au second passage de ma voiture, voilà qu’il est de 9 ! » « Pourquoi ne surveillent-ils pas les permis accordés aux garagistes avant de nous demander des comptes sur la moindre imperfection de nos voitures ? » se demande un autre citoyen qui attend (pas très) patiemment son tour pour obtenir un ticket pour le passage de sa voiture au contrôle. Il suffit de passer quelques moments au centre de contrôle mécanique de Hadeth pour écouter des plaintes diverses des automobilistes, dont rares sont satisfaits de cette mesure qui vise à améliorer l’état des voitures circulant dans le pays. Incompréhension, indignation envers les critères trop élevés exigés par l’État, manque de confiance dans le système... Toutefois, malgré la horde des boudeurs, les chiffres officiels obtenus auprès du ministère de l’Intérieur indiquent que 70% des voitures passent le test au premier passage. Quand on emprunte le très petit virage qui mène vers le centre de contrôle mécanique de Hadeth (tenu par une compagnie privée, la société FAL), à partir de ce qu’on appelle « la vieille route de Saïda », on trouve un centre moderne. Un grand parking qui sépare deux bâtiments, l’un comportant le centre de remise des résultats, l’autre le centre d’accueil, les garages proprement dits et l’administration : il n’en fallait pas moins pour absorber le considérable parc automobile de la capitale et de ses environs. Tout, sur les lieux du contrôle, est informatisé. Les voitures attendent en file indienne et passent les unes après les autres (quatre en même temps sur chaque file). En tout, quelque 88 voitures peuvent être contrôlées de manière simultanée si toutes les files sont ouvertes, ce qui n’est pas toujours le cas. Mais les qualités du lieu n’empêchent pas les mines allongées et les regards mécontents de nombre d’automobilistes rencontrés sur place. Non seulement certains sont mécontents de constater que leur voiture a besoin de réparations avant qu’ils ne puissent payer leur taxe, mais l’attente est généralement longue au guichet d’accueil où il faut payer son ticket d’entrée. Les automobilistes interrogés ont affirmé avoir passé au moins une demi-heure pour obtenir leur ticket sur l’un des trois guichets ouverts. L’attente est particulièrement pénible le matin, les gens étant habitués à entreprendre leurs formalités tôt, oubliant probablement que le centre est également ouvert dans l’après-midi. La procédure de contrôle mécanique est la suivante : après avoir obtenu son ticket, la personne se dirige en voiture vers les files d’attente. Une fois arrivé au hangar de contrôle, l’automobiliste cède son véhicule à un employé qui se charge de lui faire passer les quatre étapes entièrement informatisées où sont testés les roues, les détails de la carrosserie, le moteur, les émissions... Le conducteur du véhicule doit ensuite attendre durant quelques minutes le résultat du test, qu’il va retirer à un second guichet, sur une fiche informatique. Si la voiture ne présente aucun problème, son propriétaire n’a plus qu’à payer sa taxe mécanique à la banque, en présentant le document obtenu au centre. Dans le cas contraire, la liste des imperfections à réparer est indiquée sur la fiche. Le conducteur doit alors emmener sa voiture à un garage mécanique de son choix pour la réparer, et la soumettre de nouveau à un test au centre de contrôle mécanique dans un délai de trente jours à partir du premier passage. Selon les informations du ministère de l’Intérieur, rares sont les véhicules qui requièrent plus de deux passages au centre. Une taxe mécanique moins chère ? Sur place, à entendre les plaintes des mécontents, on a peine à croire que seules 30% des voitures sont déclarées imparfaites au premier passage. Beaucoup de personnes rencontrées avaient des réparations mineures à effectuer, comme cet automobiliste auquel on a demandé de changer le phare parce que sa couleur ne correspondait pas aux normes (?). Certains avaient cependant une liste de lacunes à combler. « Cela fait des heures que je m’occupe de cette formalité », s’exclame un automobiliste. « Après le premier passage, j’ai été effectuer les réparations demandées, mais ça ne va toujours pas. Je dois encore m’éterniser dans cette liste d’attente pour obtenir un ticket pour mon second passage. » Comme beaucoup d’autres personnes, le point qui le tracasse le plus a rapport avec les émissions de monoxyde de carbone (CO) de sa voiture, bien supérieures à la normale. « Il n’y a pas de garage au Liban capable de mesurer les émissions et de diagnostiquer ce genre de problèmes », affirme-t-il. Une autre automobiliste, dont le taux d’émission de sa voiture s’est révélé plus élevé au second passage qu’au premier (« parce que votre voiture a beaucoup roulé entre-temps », lui a-t-on dit), s’indigne : « Je ne sais pas où aller. » Interrogé sur ce point, Georges Soulage, chargé de communication au ministère de l’Intérieur, assure que, « dans ces cas, il faut changer de garagiste tout simplement ». Il est convaincu que « le contrôle mécanique permettra désormais aux automobilistes de faire la différence entre les garagistes compétents et les charlatans ». Encore faut-il, comme le fait remarquer un automobiliste rencontré au centre, que « le ministère fasse un contrôle sur les permis accordés aux garages mécaniques » ! Mais à part les mécontents, les déboussolés et les philosophes (« Que pouvons-nous faire ? »), il y a aussi des personnes satisfaites qui n’ont pas d’objection contre le système. Un automobiliste dont la voiture a passé le test raconte qu’il s’est tout simplement « informé des critères exigés dans les médias », et s’est assuré que sa voiture était irréprochable. Outre les critiques formulées contre la file d’attente au guichet d’accueil, certains ont fait remarquer que les files d’entrée au hangar n’étaient pas toutes ouvertes, ce qui retardait les automobilistes. Un seul conducteur s’est indigné du fait que « le test de contrôle mécanique, pourtant obligatoire, est payant ». « Pourquoi cette entreprise est-elle confiée à une seule société privée dont profitent certainement des personnes haut placées dans l’État ? » souligne-t-il, sans préciser qui il visait. Pour ce qui est du test payant, M. Soulage indique que la société privée a un contrat de BOT avec l’État et que, de toute façon, « la taxe mécanique en elle-même reviendra moins cher aux automobilistes cette année, tel qu’il a été décidé dans le cadre du budget ». Quelles que soient les critiques, il ne faut pas perdre de vue que le contrôle mécanique est une nécessité pour améliorer les conditions du trafic sur les routes. Mais les critères exigés ne sont-ils pas trop pointus après des années d’absentéisme de l’État dans ce domaine ? Sans compter que l’état général des routes (qui est de la responsabilité du gouvernement) n’aide pas particulièrement les automobilistes à garder leurs véhicules en bon état. Rien que sur la route menant au centre de contrôle mécanique de Hadeth, comble de l’ironie, les trous pourraient vous endommager la voiture juste avant qu’elle ne passe le test sur ordinateur... Comme quoi la vision globale des problèmes n’est toujours pas le fort de notre État. Suzanne BAAKLINI Les critères exigés Les critères que doit obligatoirement remplir la voiture pour passer le test du contrôle mécanique ont à voir avec l’immatriculation, l’état des freins, la direction, la visibilité (les vitres, les miroirs...), les phares, les pneus et la tenue de route, la carrosserie, l’intérieur de la voiture (sièges, ceintures de sécurité...), les éléments du moteur, les taux d’émission de polluants. Détails importants – Toute voiture dont la date de production est antérieure à 2001 (celles produites en 2001 incluses) doit être soumise au contrôle obligatoire cette année. – Les véhicules roulant à l’essence ne sont soumis qu’à un seul contrôle mécanique par an, ceux qui fonctionnent au mazout à deux. – Le propriétaire de la voiture n’est pas obligé de se présenter personnellement au centre de contrôle mécanique, un tiers peut le remplacer. – Toute personne se présentant au contrôle mécanique doit payer l’équivalent de 13 dollars en livres libanaises pour les voitures de tourisme et les motos, et l’équivalent de 35 dollars pour les véhicules de plus de 3,5 tonnes. – On peut effectuer le test de contrôle mécanique dans n’importe lequel des quatres centres, dans quelque région que soit enregistrée la voiture. – Il est possible de se présenter au centre de contrôle mécanique avant le délai fixé par le calendrier.
«Le taux d’émission de CO de ma voiture était de 6 il y a quelques heures », s’exclame une automobiliste mécontente. « Au second passage de ma voiture, voilà qu’il est de 9 ! » « Pourquoi ne surveillent-ils pas les permis accordés aux garagistes avant de nous demander des comptes sur la moindre imperfection de nos voitures ? » se demande un autre citoyen qui attend...