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L’ancien secrétaire d’État adjoint porte un regard averti sur la situation dans la région Murphy à « L’Orient-Le Jour » : Pas de retrait syrien du Liban avant la présidentielle

New York, de notre correspondante aux Nations unies, Sylviane ZEHIL L’ancien secrétaire d’État adjoint américain, Richard Murphy, fait partie du prestigieux Council on Foreign Relations. Et dans ce cadre, il a multiplié ses voyages au Moyen-Orient dans le but de « mieux comprendre les développements de la région ». En décembre dernier, il effectue un voyage aux Philippines pour l’Institute of Peace. Il fait une halte en Syrie, au Liban, en Arabie saoudite et à Bahreïn, une semaine avant la signature par le président George W. Bush du « Syria Accountability Act and the Lebanese Sovereignty Act (SALSA) » voté par le Congrès américain. Lors d’une interview accordée à New York à L’Orient-Le Jour, M. Murphy livre ses impressions à cet égard ainsi que sur d’autres sujets tels que l’Irak et la situation dans la région du Moyen-Orient. « Le “Syria Accountability Act” est, bien sûr, un moyen de pression sur Damas et un message musclé envoyé par Washington pour mieux marquer son mécontentement vis-vis de la Syrie », confie l’ancien ambassadeur des États-Unis en Syrie. Quel est donc son véritable impact ? « Il est difficile de le dire, réplique-t-il. Le sénateur Richard Lugar, à la tête du Senate Foreign Relations Committee, a amendé la loi donnant la possibilité au président d’appliquer ou non les sanctions contre Damas. Aucune sanction n’a été encore prise. » Quant aux implications sur le Liban, M. Murphy « n’en voit aucune de manière immédiate ». « La position américaine, précise-t-il, reste inchangée. Elle a été répétée à maintes reprises : le Liban ne devrait pas être un champ de bataille pour les forces étrangères qui doivent se retirer du pays. Nous avions l’habitude de dire, dans les années 80, toutes les forces étrangères, les Israéliens et les Syriens. Après les fortes réactions exprimées lors de la guerre d’Irak, Colin Powell a haussé le ton, parlant d’“occupation du Liban”, un langage dur rarement tenu par un secrétaire d’État. Cette énième “invitation” adressée aux Syriens de se retirer du Liban n’a pas eu d’effets. L’armée syrienne a réduit, cependant, le nombre de ses effectifs à 17 000 hommes. Les Syriens ont toujours dit qu’ils quitteraient le Liban à la demande des Libanais, a-t-il poursuivi, mais l’attitude de ces derniers reste mitigée. Certains voudraient le départ immédiat de la Syrie, d’autres évoquent la menace de la reprise des combats interlibanais. Personnellement, je ne pense pas que l’armée syrienne partira avant l’élection présidentielle libanaise », confie-t-il. « La Syrie intéressée par des discussions de paix » L’attitude de la Syrie vis-à-vis des États-Unis a-t-elle changé ? « Il y a ceux qui pensent que la guerre en Irak et la volonté des États-Unis d’utiliser la force ont poussé la Libye à abandonner son programme d’armes nucléaires, l’Iran à ouvrir son programme atomique aux inspecteurs, et la Syrie à être très intéressée par des discussions de paix avec Israël. C’est une manière pour l’Administration US de mettre en valeur le “côté positif” de son intervention militaire en Irak. L’Administration a peut-être enregistré quelques succès, mais dans le cas précis de la Libye, Tripoli et les Américains avaient commencé des négociations secrètes durant le mandat Clinton, dans les années 90. » Dans une interview accordée au New York Times en décembre dernier, le président syrien s’est dit prêt à reprendre les pourparlers entre son pays et Israël. Le rapprochement entre la Syrie et la Turquie s’inscrit-il dans cet esprit ? Pour M. Murphy, « c’est un processus diplomatique entamé depuis des années ». Les deux pays ont un « intérêt commun » à améliorer des relations connues pour être tendues depuis des décades surtout au sujet du PKK et d’Öçalan « qui vivait ouvertement à Damas ». Pour certains, ajoute M. Murphy, cette première visite du président Assad en Turquie apparaît comme une volonté d’améliorer ses relations avec un pays ami des États-Unis et d’Israël. « Avec la présence américaine en Irak, indique-t-il, la Syrie s’est sentie entourée de pays proaméricains. » La Turquie, amie d’Israël et des États-Unis, jouera-t-elle le rôle d’intermédiaire pour la reprise des négociations de paix syro-israéliennes ? « Si le président Bachar cherche un intermédiaire avec Israël, il se tournera normalement vers Washington, grand supporter d’Israël qui ne semble pas intéressé pour le moment à reprendre les négociations de paix », précise-t-il. Avec la volonté américaine d’instaurer la démocratie au Moyen-Orient, va-t-on vers un nouvel ordre régional ? « Les néoconservateurs ont toujours pensé que l’Administration américaine, qu’elle soit démocrate ou républicaine, n’a pas réussi à soutenir fermement les grands principes américains de démocratie, répond M. Murphy. Nous avons pu faire face aux Soviétiques en Europe de l’Est, aux communistes chinois, et agir en Amérique latine, avec peu de succès, mais n’avons rien fait au Moyen-Orient. Certains vont jusqu’à dire que si la démocratie avait été appliquée dans cette région, la tragédie du 11 septembre n’aurait pas eu lieu. Car cette tragédie est le fruit de la frustration, du désespoir, de la désillusion, du chômage d’une population croissante dont le niveau de vie est au plus bas. La rhétorique antérieure à la guerre d’Irak est fondée sur la possibilité de transformer le Moyen-Orient en une région démocratique. L’Irak deviendra un modèle pour les pays de la région. La guerre de 2003 sera la clé d’un nouvel ordre politique, économique et social du Moyen-Orient. » Quel rôle pour les Nations unies ? « Les Nations unies, qui ont été bafouées pendant cette guerre, joueront certainement un rôle comme le témoigne la présence de Paul Bremer et des dirigeants irakiens à New York en janvier dernier. L’Onu n’apporte pas uniquement une assistance technique en matière d’élections, mais donne une légitimité. Nous nous dirigeons dans une même direction pour jouer ensemble un rôle. »
New York, de notre correspondante aux Nations unies, Sylviane ZEHIL
L’ancien secrétaire d’État adjoint américain, Richard Murphy, fait partie du prestigieux Council on Foreign Relations. Et dans ce cadre, il a multiplié ses voyages au Moyen-Orient dans le but de « mieux comprendre les développements de la région ». En décembre dernier, il effectue un voyage aux...