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FRANCE-LIBAN - Mobilité et flexibilité, des atouts de taille pour les étudiants Le système universitaire européen, une mise en place lente

Mise en place depuis le début de l’année universitaire par l’USJ, la réforme européenne de l’enseignement universitaire n’a pas manqué de soulever diverses interrogations de la part des universités du Liban, partenaires de la France. Délaisser le système annuel jugé trop sélectif, pour adopter le système de crédits transférables ECTS, certes plus souple pour les étudiants, mais exigeant un remaniement en profondeur de nombreux cursus, n’est pas chose aisée. D’autant plus que ce système délivrant licence, master et doctorat en 3, 5 et 8 ans reste encore difficilement applicable à de nombreuses facultés, notamment les facultés de médecine, de génie et de droit. C’est dans le but d’identifier les difficultés d’application de ce sytème au Liban et d’y trouver des solutions à partir de l’expérience française que l’ambassade de France a organisé à l’ESA un colloque sur le thème « La France et le Liban dans l’espace européen de l’enseignement supérieur ». C’est l’ambassadeur de France, Philippe Lecourtier, qui a prononcé le mot d’ouverture, soulignant non seulement la vitalité de la relation culturelle entre la France et le Liban, mais aussi la très grande qualité du réseau universitaire libanais, fondé sur une tradition d’excellence dans les formations académiques dispensées. Expliquant la construction de l’espace européen de l’enseignement supérieur, M. Lecourtier a précisé qu’il est issu d’un processus intergouvernemental. « Lancé par quatre pays européens, dont la France, il a pris naissance à Paris, à l’Université de la Sorbonne en 1998, et regroupe désormais 36 États de l’Europe élargie. » L’ancrage du Liban à l’Europe Quant aux objectifs fondamentaux d’une telle construction, ils consistent à faire du continent européen (et des institutions qui auront choisi ce système) « un vaste espace facilitant la mobilité des étudiants et des universitaires, mais aussi à lui donner une lisiblité et un pouvoir d’attraction à l’échelle mondiale ». Qu’elle soit déjà en cours au Liban ou simplement envisagée, l’ambassadeur se déclare conscient des multiples interrogations soulevées par cette réforme. Des interrogations auxquelles pourraient répondre l’échange d’expérience et de bonnes pratiques, mais aussi l’exposé des difficultés rencontrées par les présidents d’université en France et des stratégies qu’ils ont déployées pour les résoudre. « Au-delà du domaine strictement universitaire se profile une dimension plus politique, poursuit M. Lecourtier, celle de l’ancrage du Liban et, plus largement, du monde arabe à l’Europe. » « Je voudrais délivrer un message clair à nos partenaires libanais, conclut-il. Qu’ils sachent pouvoir compter sur la France pour les épauler et les accompagner dans la mise en œuvre d’une réforme qui peut leur ouvrir la voie à un partenariat avec l’ensemble du continent européen. » À son tour, Patrick Renauld, chef de la délégation de l’Union européenne au Liban, a mis l’accent sur l’augmentation spectaculaire de la demande d’enseignement international découlant de la globalisation des économies et favorisant la mobilité naturelle des personnes et des étudiants. Mais il a déploré les freins limitant cette mobilité. Des freins tant politiques que socio-économiques, linguistiques ou techniques. « Et pourtant, estime-t-il, l’Union européenne, dont le principe fondateur est la liberté de circulation, se devait de favoriser la liberté des universitaires à étudier où ils le désiraient afin d’acquérir, voire de compléter leurs expériences. » Et d’évoquer les nombreux programmes européens, dont le plus connu est Erasmus, qui ont déjà permis à plus d’un million d’étudiants d’aller perfectionner leur formation dans l’université d’un autre pays. Licence à Paris, doctorat à Beyrouth Quant aux programmes Tempus et Erasmus Mundus, ils sont ouverts aux universités et aux étudiants libanais. Le programme Tempus, dont le budget 2003-2004 pour le Liban est de 3 millions d’euros, permet de financer des projets européens communs, des mesures structurelles et/ou complémentaires, et des bourses individuelles, alors que le programme Erasmus Mundus ouvre l’opportunité aux étudiants et aux universitaires du monde entier de suivre des études de troisième cycle dans les universités européennes, tout en encourageant la mobilité des étudiants et des universitaires européens vers des pays tiers. Et M. Renauld de conclure en rappelant l’ambition de l’Union européenne de l’internationalisation de l’enseignement supérieur. « Pour nous, dit-il, le cursus idéal sera de commencer sa licence à Paris, la poursuivre à Londres, faire un master aux Pays-Bas et un doctorat à Beyrouth. » Représentant le ministre de l’Enseignement supérieur, Samir el-Jisr, le directeur général de l’enseignement supérieur, Ahmed Jammal, a évoqué le défi que constitue l’adoption du système européen pour l’enseignement supérieur au Liban. Un défi d’excellence, marqué par l’expérience européenne et plus particulièrement française. Et d’indiquer les premières initiatives de réforme et de réorganisation entreprises par certaines universités, qui mettent en place des programmes de collaboration et de jumelage avec des universités étrangères, dans un souci de perfection et de reconnaissance de leurs diplômes. La construction de l’espace européen d’enseignement supérieur a constitué l’un des thèmes principaux de ce colloque. « Il était important d’avoir une seule entité sur le plan européen », indique Éric Froment, président de l’Association européenne de l’université, regroupant 646 à travers 45 pays, ajoutant que ce processus est un engagement intergouvernemental qui ne relève pas de l’Union européenne. Un processus qui est fondé sur les deux niveaux de licence et master en 3 et 5 ans, qui implique la comparabilité des diplômes, qui favorise le système de crédits, qui permet une plus grande mobilité des étudiants entre les pays et les universités, ainsi qu’une formation tout au long de la vie. « Certes, observe M. Froment, de nombreux problèmes se posent en France comme en Europe. » En effet, la durée des cursus dans certaines facultés, notamment dans les grandes écoles, est difficilement compatible avec le système de crédits européen. Par ailleurs, se posent encore des problèmes d’évaluation, de reconnaissance des diplômes, de liaison avec l’espace européen de la recherche, alors que l’espace européen souffre encore du manque d’une politique des langues. « C’est un processus qui prend de l’ampleur, mais qui a besoin de temps pour se mettre en place », dit-il. À son tour, Pascal Level, président de l’Université de Valenciennes et du Hainaut-Cambrésis et troisième vice-président de la Conférence des présidents d’université, a souligné l’important soutien des universités européennes et des associations d’étudiants à la construction de l’espace européen d’enseignement supérieur, précisant qu’il permet une plus grande mobilité des étudiants mais aussi une importante flexibilité de leur parcours. « Tout étudiant bachelier a sa place dans ce système universitaire, alors que dans le système annuel traditionnel, l’échec répété était chose courante », précise-t-il, expliquant que les crédits acquis sont capitalisables à vie. Aussi, une licence comprend 180 crédits et peut se faire en trois ans ou même plus, selon le rythme de chaque étudiant. « De même, ajoute-t-il, non seulement les stages, les projets personnels et les mémoires sont autant d’acquis, mais aussi l’investissement citoyen, le sport et les activités personnelles. » À l’heure où l’USJ a adopté le système de crédits européen et que d’autres universités envisagent de l’adopter, les problèmes demeurent nombreux au Liban pour une mise en place plus large du système ECTS. « Dans un pays où l’enseignement n’est pas homogène, car différents systèmes anglophones ou francophones sont adoptés, les étudiants ne peuvent bénéficier d’aucune mobilité d’une université à une autre », déplore Ahmed Jammal. Par ailleurs, les parcours sont différents, notamment pour des formations comme la médecine ou le génie, alors que peu d’universités adoptent effectivement le système de la licence en trois ans, conformément au système européen. « Aussi, précise-t-il, l’Université libanaise, qui regroupe 70 000 étudiants représentant plus de la moitié des étudiants libanais, ne délivre pas de licence, mais une maîtrise au terme de 4 années d’études. » Et d’insister sur la nécessité de restructurer l’enseignement supérieur et de converger vers un système commun à tous les établissements universitaires. Certes, les difficultés sont nombreuses, mais plusieurs universités francophones du pays envisagent, à l’instar de l’USJ, d’adopter le sytème européen. Un système qui leur permet non seulement d’évoluer conformément aux normes européennes, mais surtout de consolider les différents partenariats libano-européens. Anne-Marie EL-HAGE
Mise en place depuis le début de l’année universitaire par l’USJ, la réforme européenne de l’enseignement universitaire n’a pas manqué de soulever diverses interrogations de la part des universités du Liban, partenaires de la France. Délaisser le système annuel jugé trop sélectif, pour adopter le système de crédits transférables ECTS, certes plus souple pour les...