Ouverture d’une légèreté de plume, comme une caresse fuyante, avec la Sonate en do majeur de Mozart. Œuvre nuancée et d’une exquise fraîcheur avec des moments oscillate entre rêverie heureuse, vivacité chargée d’espièglerie et même parfois de furtives phrases où pointe une certaine méditation frisant une vague mélancolie. Pour reprendre de plus belle, comme une source jaillissante, dans la joie, le charme et la spontanéité d’une mélodie d’une foisonnante richesse.
Pour prendre le relais, une Fantaisie en fa mineur de Schubert. Romantisme absolu avec cette narration mêlant véhémence, cris du cœur, élans passionnés, détachement et une sorte de mal-être indéfinissable, livrant ainsi, sans masque, la dualité de Schubert partagé entre révolte et résignation, entre tristesse et bonne humeur, entre sourires et larmes.
Toujours dans le sillage romantique, des Variations sur un thème de Schumann de Brahms. Pièces complexes et séduisantes dans leurs tonalités variées car elles combinent, dans un savant dosage, la poésie et la sérénité d’un musicien, originaire des bords de l’Elbe et qui émigra au Danube, à la tourmente et la folie de Schumann. Un lyrisme ample, aux couleurs chatoyantes et insaisissables, qui va par-delà une inspiration sage et rangée. Pour terminer (changement de banquette : les touches aiguës à Denervaud et les graves à Sombart), voilà le raffinement et le décontracté des Chansons sans paroles de Mendelssohn qui était d’ailleurs un pianiste remarquable. Des huit cahiers de chansons on écoute ici des pages ravissantes, conçues dans des formes d’une grande liberté. Qualité indiscutable et suprême du jeu précis et minutieux des deux artistes qui se partagent, en toute harmonie et bonheur, les touches d’un clavier transformé brusquement en une double féerie. Un public sélect et peu nombreux a longuement appplaudi les deux pianistes.
En bis, pour prolonger ce moment de bonheur et de charme, une diaphane et courte Berceuse de Fauré et un bref passage aux scintillements lumineux de Mendelssohn.
Nouvelle révérence et la scène est déserte avec les chaussons argentés de la pianiste et son écharpe en mousseline qui traîne par terre. Comme une Cendrillon qui s’est évaporée les pieds nus, tout en restant sous la coupe d’un charme indéfinissable, on écoute encore un peu le froufrou de sa robe qui glisse sur le parquet…
Edgar DAVIDIAN
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