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MUSIQUE - L’Orchestre symphonique national libanais et le pianiste Rosenkranz à l’église Saint-Joseph des pères jésuites Maestria et blues à l’américaine

Fidèle à ses rendez-vous, à son image de marque, et en collaboration avec l’ambassade des États-Unis, l’Orchestre symphonique national libanais placé en cette fin de semaine sous la houlette de Wojcieh Czepiel, offrait aux très nombreux mélomanes libanais (et étrangers) venus se retrouver à l’église Saint-Joseph des pères jésuites un programme somptueux et « ciblé ». En «guest star », un pianiste haut de gamme, Thomas Rosenkranz, dont les performances au Lincoln Center, à l’Université de Columbia et à l’Espace symphonique de New-York (comme au Japon et à travers tous les États-Unis) furent plébiscitées par le public et la critique. Au menu donc sous maestria américaine, surtout en première partie, deux éminents compositeurs du Nouveau Monde, Bernstein et Gershwin, et en seconde partie, une symphonie du plus cosmopolite des compositeurs russes, Piotr Illitch Tchaïkovsky.
Brillante ouverture avec le Candide de Leonard Bernstein, figure de proue et légende de la musique américaine, et illustre défenseur de la musique contemporaine. Premières mesures toutes en fanfare dans un ruissellement des cuivres pour ce pot-pourri musical « voltairien ». Hommage au personnage — né de l’imaginaire du virulent résident de Ferney avec en prime une idée-phare « jouissive » de la vie. D’où ce mélange joyeux et bref de phrases éclatantes de vitalité et se bousculant comme les fêtards d’un carnaval endiablé. Avec un fugitif duo d’amants qui nous rappelle les tendres moments de West Side Story.
Le plat de résistance est sans nul doute réservé à cet superbe, immortel chef-d’œuvre et célèbre Rhapsody in Blue de George Gershwin, où piano et orchestre ont des échanges saisissants. Tout en relevant la virtuosité absolue des soli pour clavier dans une partition qui garde sans fléchir un remarquable tonus de coupe classique avec des éclats jazzy comme des feux rougeoyants au cœur d’un lyrisme torrentiel. Merveilleuse interprétation de Thomas Rosenkrantz qui a mis le feu aux voûtes et rosaces d’une église pleine à craquer et où toute l’audience était d’un recueillement plus que religieux. Éblouissante prestation qui a permis un vibrant rappel où le pianiste, champion des touches d’ivoire et d’une redoutable technique, a joué une improvisation de son cru. Sur quelques notes levantines, égrénées en « takasims » effleurées avec légèreté, suit une variation grandiloquente sur l’hymne national américain avec accords rachmaninoviens et arpège lisztien…
Après l’entracte, changement d’atmosphère, de ton et d’horizon avec la Symphonie n°4 en fa mineur de Tchaïkovsky. Dédié à Mme de Meck, cet opus, qu’on entend le plus souvent en concert, débute par une introduction qui contient en germe le sens profond de l’œuvre de celui dont les souffrances secrètes et révélées ont nourri toute son inspiration, riche et variée. Le motif principal, à travers cor et basson, évoque le destin.
Quatre mouvements pour traduire toutes les contradictions, les paradoxes, les frustrations, les aspirations, les espoirs et surtout les désespoirs d’un artiste en constante tourmente. Impétueux et apaisé est ce premier moderato pourtant plus porté au cri du cœur qu’au silence résigné. Comme un rai de lumière, chaleureux et tendre est l’andantino. Remarquable le scherzo (un chef-d’œuvre de musique pure) avec pizzicato ostinato dominant l’ensemble de la narration. Moins torturé et proche des images simples (tirées d’une vieille chanson populaire russe) est le dernier mouvement qui se termine toutefois en une apothéose sonore groupant, dans un déchaînement final, tous les déchirements, les revendications et credo d’une existence menacée par le vide et l’isolement.
Standing ovation pour un concert qui ne craint guère d’affronter des partitions de grandes difficultés techniques et dont l’Orchestre symphonique national libanais, rôdé aujourd’hui par ses multiples et régulières prestations, triomphe en toute humilité.

Edgar DAVIDIAN
Fidèle à ses rendez-vous, à son image de marque, et en collaboration avec l’ambassade des États-Unis, l’Orchestre symphonique national libanais placé en cette fin de semaine sous la houlette de Wojcieh Czepiel, offrait aux très nombreux mélomanes libanais (et étrangers) venus se retrouver à l’église Saint-Joseph des pères jésuites un programme somptueux et « ciblé...