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DÉvelopPement administratif - Le chéhabisme revisité par les inconditionnels Talal Salman : « Un prince respectueux de ses sujets »

Il est l’un des rares hommes d’État qui continuent à faire parler de lui. Fouad Chéhab a été et reste l’incarnation même de l’État de droit, et le symbole par excellence de ce qui, désormais, est devenu un concept banalisé, à savoir la réforme administrative. Si l’on continue de soulever, à ce jour, cette question controversée, c’est bien parce que cette réforme est devenue, avec le temps, synonyme d’échec et de déception. Bien que conçue et nourrie par la pensée chéhabiste, celle-ci n’a pu se poursuivre et se déployer à travers l’histoire contemporaine du Liban, à cause de facteurs externes aussi bien qu’internes. Bien au contraire, elle a été étouffée dans son berceau une fois le général parti. C’est autour de cette réflexion que les « chéhabistes inconditionnels » ont décidé de mener le débat hier, à l’Unesco, en présence de quelques intellectuels nostalgiques de « l’âge d’or » de l’Administration libanaise.
Les intervenants évoqueront à plusieurs reprises la vision nationale et patriotique du général Chéhab, celui qui a complètement ignoré les frontières communautaires ou clientélistes. Bien au contraire, c’était ce fléau qu’il a tenté de combattre tout au long de ses années au pouvoir. « L’un de ses objectifs les plus importants était celui de rapprocher les éléments humains cloisonnés, méfiants, enfermés dans une mentalité individualiste, partisane et communautaire », dira Joseph Donato, un grand commis de l’État de l’époque chéhabiste. Résumant la pensée, l’ambition et la vision de Fouad Chéhab, il reprend une des expressions fétiches du général qui reflète le mieux sa philosophie, lorsqu’il avait dit, en 1961, à l’occasion de la fête nationale : « Nous avons obtenu l’indépendance de l’État ; il nous faut maintenant créer l’État de l’indépendance. » Reprenant la trajectoire de ce qui fut connu sous le nom d’Office de développement social (ODS), M. Donato explique comment l’ODS s’est dépensé jusque dans les régions les plus reculées du Liban, notamment parmi les clans et les tribus « qu’il fallait réconcilier ». Le PDG du quotidien as-Safir, Talal Salman, ira dans le même sens en expliquant que le général Chéhab a connu le Hermel, Deir el-Ahmar, Nabichit, Brital, autant que Jounieh, Ajaltoun, Rayfoun, Qartaba et Rassa, alors que la plupart des hommes politiques « ne connaissent que les sérails et les ambassades et, des Libanais, rien d’autre que leur voix. Quant à leurs problèmes, aspirations et revendications c’est aux autres de s’en charger car eux sont préoccupés par des choses bien plus sérieuses», a ironisé M. Salman. Le journaliste n’a pas raté une seule occasion pour lancer des piques aux responsables qui ont succédé au « prince » chéhabiste, qui, a-t-il dit, a de tout temps considéré les Libanais « comme des citoyens et non des sujets », s’intéressant de près à la situation des agriculteurs, des pauvres et à l’ambition des jeunes.
Citant les multiples fonctions de l’État-providence dont le rôle a été renfloué avec le président chéhabiste, M. Salman a affirmé que l’université à laquelle appartenait le général était celle qui octroyait des diplômes « en compétence » pour « bâtir » et non pour obtenir des diplômes « en chômage ». L’ancien ministre Georges Corm ne manque pas de rappeler que si le chéhabisme a réussi à mettre en place des projets sociaux et à réaliser des réformes, il a par ailleurs échoué à « protéger et à consolider le Liban face à l’instabilité régionale et aux maladies confessionnelles ». « L’héritage chéhabiste n’a malheureusement pas pu affronter les complots » à venir, notamment l’agression israélienne contre l’aéroport de Beyrouth en 1968, a relevé M. Corm. Les complots étaient également fomentés de l’intérieur, les forces sociales et politiques ayant « conjugué leurs efforts pour mettre en échec l’expérience chéhabiste. Ces forces incarnent l’alliance conclue entre les familles traditionnelles dont le leadership est basé sur l’exploitation de l’état psychologique, institutionnel et communautaire », a indiqué le ministre. C’était un « âge d’or » que certains n’ont d’ailleurs pas manqué de critiquer, alors que nous vivons aujourd’hui dans un « enfer financier et monétaire », a-t-il conclu.
Il est l’un des rares hommes d’État qui continuent à faire parler de lui. Fouad Chéhab a été et reste l’incarnation même de l’État de droit, et le symbole par excellence de ce qui, désormais, est devenu un concept banalisé, à savoir la réforme administrative. Si l’on continue de soulever, à ce jour, cette question controversée, c’est bien parce que cette...