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éclairage Samaha rend les USA responsables de l’interception du convoi américain par le Hezbollah Beyrouth veut minimiser l’incident et Washington cache son jeu

Entre Beyrouth et Washington, la balle est désormais au centre. En attendant de plus amples explications que pourrait donner Jean Obeid au cours de la conférence de presse qu’il tiendra ce matin au palais Bustros. En attendant aussi, peut-être, une éventuelle réaction américaine aux propos tenus par Michel Samaha samedi, en sa qualité de ministre des Affaires étrangères par intérim. Il n’empêche, trois jours après l’incident qui a opposé des diplomates américains à deux membres du Hezbollah – qui avaient intercepté le convoi US près de la frontière libano-israélienne, l’obligeant à rebrousser chemin –, les zones d’ombre restent nombreuses, très floues, même si Beyrouth a clairement rendu Washington responsable de cette interception. Et le futur proche des relations libano-américaines pas vraiment rose.
Première question : est-ce que le Liban a besoin, aujourd’hui, d’une (nouvelle) tension – peut-être même une crise – avec les États-Unis, et peut-il, si oui, se la permettre ? Sachant que Washington a effectivement protesté, et d’une façon officielle, auprès des autorités libanaises – le département d’État allant même jusqu’à exiger des garanties : que les mesures nécessaires soient prises afin que cet incident ne se répète plus – et que l’ambassadeur US, Vincent Battle, s’est rendu avant-hier à Baabda où il a officiellement effectué un tour d’horizon de la situation locale et régionale avec le chef de l’État.
Michel Samaha a reproché aux Américains de ne pas avoir « coordonné » leur changement d’itinéraire avec les autorités libanaises, de ne pas avoir demandé la permission de dévier de leur trajectoire initiale – à propos de laquelle ils avaient averti Beyrouth. Sauf qu’une source diplomatique près l’ambassade US avait affirmé à L’Orient-Le Jour (voir notre édition du samedi 18 octobre) que « l’armée libanaise était au courant de l’itinéraire du convoi (US) depuis deux jours ». De quel itinéraire s’agit-il donc ? De l’initial, ayant pour but Naqoura, ou de celui qui a été la cause de l’interception, avec comme destination finale la colline de Labbouné, où se trouve un poste armé du Hezbollah, considéré comme « un point stratégique particulièrement sensible » ?
Quoi qu’il en soit, et même si un convoi diplomatique étranger n’a pas, selon les us en vigueur, à aviser les autorités locales d’un quelconque déplacement – et si cela se fait, dans n’importe quel pays du monde, c’est « par courtoisie » –, les Libanais sont effectivement en droit de se demander (comme le député hezbollahi Abdallah Cassir) ce qui a bien pu motiver cette volonté américaine de visiter une zone militaire. Des sources diplomatiques beyrouthines assurent que les cadres de l’ambassade US souhaitaient montrer ce coin de la ligne bleue à quelques-uns de leurs collègues venus des États-Unis. Sauf que les relations entre Washington et le Hezbollah, soutenu inconditionnellement par Damas, étant ce qu’elles sont (le parti intégriste figure en bonne place sur la liste noire US), n’importe quelle autre réaction de la formation de Hassan Nasrallah aurait été pour le moins stupéfiante.
C’est justement là que le bât blesse. Par la bouche de son ministre des AE par intérim, Beyrouth a admis « la souveraineté de l’État au Liban-Sud », tout en soulignant que « cela ne veut pas dire que l’on ne coordonne pas avec la Résistance ou que l’on ne prend pas des mesures visant à maîtriser toute violation » dans ce secteur. De quoi y perdre son latin. D’autant plus que le Liban a de plus en plus de mal à expliquer à la communauté internationale comme à l’opinion publique libanaise pourquoi l’armée ne s’est toujours pas déployée le long de la frontière israélienne. De plus en plus de mal à expliquer le fait que les dirigeants libanais répétent tous les jours leur attachement inconditionnel à la légalité internationale et aux résolutions de l’Onu tout en refusant d’appliquer celle relative à ce déploiement. De plus en plus de mal à expliquer pourquoi la branche militaire du Hezbollah – qui a joué, certes, un rôle important dans la déroute israélienne en l’an 2000 – n’a toujours pas été démilitarisée, à l’instar des autres milices libanaises ?
Des sources diplomatiques assurent que Beyrouth veut minimiser l’incident, jugé isolé. Qu’il n’est pas nécessaire d’en faire un plat, surtout que Washington n’avait pas bronché lorsqu’un convoi US s’était fait caillasser, il y a quelque temps, dans la Békaa. Reste à savoir si cette volonté de dédramatisation est la même du côté américain, au lendemain du vote par la Chambre des représentants US du Syria Accountability Act, et des menaces d’Ariel Sharon contre la Syrie. Et si les exigences US ne vont pas aller crescendo. Est-ce que le convoi US aurait modifié sa trajectoire si l’armée libanaise avait été présente le long de la ligne bleue ?

Ziyad MAKHOUL
Entre Beyrouth et Washington, la balle est désormais au centre. En attendant de plus amples explications que pourrait donner Jean Obeid au cours de la conférence de presse qu’il tiendra ce matin au palais Bustros. En attendant aussi, peut-être, une éventuelle réaction américaine aux propos tenus par Michel Samaha samedi, en sa qualité de ministre des Affaires étrangères par...