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ÉCOLES CATHOLIQUES - Pour le nouveau secrétaire, une solution semble se profiler à l’horizon Plus de 40 milliards de livres libanaises consacrées aux aides à la scolarité, l’année dernière (photos)

Continuer à faire des écoles catholiques des institutions actives au service de tous les Libanais, préserver la solidarité de l’école catholique face aux défis quotidiens, éduquer les futurs citoyens à vivre leur chrétienté et à croire au Liban comme message, dans un esprit de convivialité, mais aussi s’adapter à la mondialisation, tels sont les principaux objectifs que s’est fixé le nouveau secrétaire général des écoles catholiques, le père Marouan Tabet, en cette période de rentrée scolaire. Une rentrée morose, marquée par l’aggravation de la crise économique, l’augmentation du taux des écolages impayés qui a atteint 18 % des scolarités pour l’année 2002 - 2003, et la défection de plus de 5 % des élèves des écoles catholiques vers d’autres secteurs éducatifs. Mais une solution semble pointer à l’horizon…
D’une année à l’autre, le taux des scolarités impayées augmente inexorablement et s’accumule, mettant en péril l’ensemble de l’enseignement privé. « Rien qu’au niveau des écoles catholiques, qui accueillent le quart des enfants scolarisés, soit 200 000 élèves dans l’ensemble du pays, les dettes des parents d’élèves ont atteint 18 % des écolages pour l’année scolaire 2002-2003, alors que pour l’année 2001 - 2002, elles représentaient déjà 12 % des scolarités », explique le père Marouan Tabet, secrétaire général des écoles catholiques depuis février 2003. Mais ce dernier refuse de donner des chiffres plus précis. « Cela pourrait porter atteinte à nos institutions », dit-il sans plus.

Défection de 5 % des élèves
Répondant à l’appel du pape les invitant à venir en aide aux parents d’élèves qui souffrent de la crise économique, les écoles catholiques augmentent les aides scolaires et montrent plus d’indulgence à l’égard des familles ayant accumulé des dettes à l’égard des établissements scolaires. Au lieu de consacrer à ces aides 5 % de leur budget annuel, comme alloué par l’État, elles leur consacrent désormais 20 à 25 % de leur budget, si ce n’est plus. Aides qui se traduisent par des réductions ou des bourses scolaires, accordées aux parents d’élèves les plus démunis. « À titre d’exemple, 250 écoles catholiques (sur 350) ont accordé pour l’année scolaire 2002 - 2003, un montant d’aides supérieur à 40 milliards de livres libanaises », observe le père Marouan Tabet, ajoutant que ce montant s’est élevé à plus de 30 milliards de livres libanaises durant l’année précédente.
Malgré cette initiative adoptée par l’ensemble des écoles catholiques, accompagnée de la création de caisses d’entraide, souvent financées par d’anciens élèves bien nantis, « cette institution a constaté la défection de 5 % de ses élèves », observe le père Marouan Tabet, sans toutefois préciser si ces élèves rejoignent les bancs de l’école publique ou ceux d’autres écoles privées moins prestigieuses ou tout simplement moins chères.
Mais comment les écoles catholiques doivent-elles faire face à cette crise économique qui les mine et menace leur structure, à l’instar de l’ensemble de l’enseignement privé du pays ? Le défi est de taille et la situation grave, mais pas désespérée. Car le secrétariat se fait fort de trouver des solutions radicales au problème économique de l’école catholique. Cependant, le père Tabet ne peut s’empêcher de montrer du doigt le gouvernement, « seul responsable de cette crise », selon ses propos, et « qui se doit de venir en aide aux institutions privées, comme cela se fait dans tous les pays évolués ». D’autant plus que celles-ci ont assuré la relève du gouvernement pendant de longues années, ayant été les seules institutions à ne pas avoir été déplacées durant la guerre. « Nous n’avons aucun contact à ce niveau avec le ministère de l’Éducation, déplore le prélat, mais nous sommes prêts à discuter des modalités de collaboration si le gouvernement décide de prendre ses responsabilités et de soutenir l’enseignement privé ».
Malgré la morosité ambiante et les importants déficits qu’accusent la majorité des écoles catholiques, une solution semblerait se profiler à l’horizon. Mais le nouveau secrétaire général des écoles catholiques n’en dit pas plus. Du moins pas pour le moment. Il déclare simplement qu’il dévoilera son projet en temps voulu et très bientôt.

Mondialisation et convivialité : deux défis de taille
Le défi de la mondialisation est par ailleurs un autre problème auquel doivent faire face non seulement les écoles catholiques, mais toutes les écoles du pays. « Nos établissements, note le père Tabet, ont le devoir de préparer l’élève à vivre et à s’adapter à ce mouvement mondial incontournable, à ce monde médiatisé où règnent jeux électroniques, téléphones cellulaires, ordinateurs et autres nouvelles technologies. Ils ont la responsabilité de préparer l’élève à effectuer son choix, moralement, spirituellement et culturellement. Ils ne doivent pas éduquer l’élève dans l’ignorance de ce monde ni le pousser à s’en éloigner. Malheureusement, regrette-t-il, les élèves des écoles catholiques vivent dans une sorte de village fermé, à l’écart de ce monde qu’ils côtoient par ailleurs quotidiennement ».
L’éducation des élèves à la convivialité, dans un pays tiraillé par le fondamentalisme, est le troisième défi de l’école catholique. « Car il est essentiel de ressouder le tissu national », estime le père Marouan Tabet. Et d’expliquer que le secrétariat des écoles catholiques a encouragé, l’année passée, la mise en place de projets pilotes entre certaines écoles catholiques et des établissements appartenant à d’autres communautés religieuses. Projets qui ont donné la possibilité aux élèves de différentes confessions de se rencontrer plusieurs fois au cours de l’année scolaire, de se connaître et de mieux se comprendre.
La réussite de ce projet pilote a encouragé davantage d’établissements catholiques et non catholiques à envisager, au cours de cette année scolaire, des rencontres entre élèves de différentes confessions. De même, elle a facilité les réunions entre les responsables des différentes institutions.

Aller de l’avant malgré
la crise
Veiller à la réussite de ce processus, aider la jeunesse libanaise à s’intégrer dans son pays, l’éduquer à la citoyenneté, à la liberté, au respect de l’autre, favoriser l’éveil national tout en séparant l’éducation de la politique, mais aussi véhiculer les valeurs chrétiennes comme l’amour, la charité, la tolérance et la vérité, l’école catholique a du pain sur la planche. Un processus qui est d’autant plus important que près du quart des élèves des écoles catholiques ne sont pas chrétiens. « Respecter leur religion, mais aussi veiller à ce que ces élèves d’autres confessions reçoivent une éducation sans discrimination, tout en les aidant à persévérer dans leur confession est aussi primordial que celui d’éduquer les élèves chrétiens à vivre leur chrétienté », poursuit le père Tabet.
« Dans cet esprit de convivialité, où les élèves découvrent les différentes religions et peuvent en intérioriser les différences, il devient plus facile de trouver des échelles de valeurs communes », renchérit-il.
Ce défi que s’est fixé l’école catholique n’est-il pas utopique ? « Si on ne rêve pas, rétorque le père Marouan Tabet, on n’y arrivera jamais. Il est indispensable de placer la barre bien haut et de travailler de manière assidue à atteindre cet objectif ».
L’optimisme du père Marouan Tabet est rassurant. Certes, la crise que les écoles catholiques traversent est grave, et il est dommage que certains parents aient dû retirer leurs enfants des écoles catholiques faute d’avoir pu respecter leurs engagements envers celles-ci, mais les listes d’attente pour l’inscription de nouveaux élèves sont longues et nombreux sont les établissements qui se voient contraints de refuser des élèves faute de places disponibles. D’ailleurs, les institutions n’ont pas arrêté d’aller de l’avant afin de développer leurs équipements et leurs installations. Il faut persévérer afin d’être toujours à la hauteur, conclut le père Marouan Tabet, (en attendant cette solution radicale promise), sinon comment le système pourrait-il continuer ?
Qui est le père Marouan Tabet ?
Né à Bhamdoun, le père Marouan Tabet appartient à la congrégation des missionnaires libanais maronites. Ce simple prêtre, c’est ainsi qu’il se qualifie, est issu d’une famille modeste et rechigne à parler de lui-même. Après avoir obtenu 3 licences au Liban, il s’est rendu aux États-Unis où il a passé de nombreuses années. Actuellement détenteur de deux maîtrises en organisation scolaire et en philosophie politique, le père Marouan Tabet a aussi obtenu un doctorat en gestion scolaire. Son sujet de thèse a concerné le rôle des directeurs des écoles catholiques dans le Liban d’après-guerre. Élu en novembre 2002 comme secrétaire général des écoles catholiques, le père Marouan Tabet a occupé ses fonctions en février 2003, succédant ainsi à Mgr Camille Zeidan.
Anne-Marie EL-HAGE
Continuer à faire des écoles catholiques des institutions actives au service de tous les Libanais, préserver la solidarité de l’école catholique face aux défis quotidiens, éduquer les futurs citoyens à vivre leur chrétienté et à croire au Liban comme message, dans un esprit de convivialité, mais aussi s’adapter à la mondialisation, tels sont les principaux objectifs...