C’est à M. Pierre Farah, ancien doyen de la faculté de médecine de l’ USJ, qu’est revenu le privilège de rendre hommage au père Abou. Voici en quels termes il l’a fait :
« Pour qui essaye d’approcher le recteur Abou, le premier abord n’est pas du tout aisé : le visage fermé, la mine sévère, l’air absent ou peu attentif, la parole rare, peu discursive, la réplique cinglante à l’occasion laissent l’interlocuteur désemparé et, à proprement parler, interloqué ; mais ne vous fiez pas à cette apparence rébarbative, vous découvrirez rapidement, en vous accrochant, un homme de grande courtoisie, attentif aux problèmes qui vous préoccupent, capable de moduler ses premières conclusions et vous aurez parfois la chance de surprendre un sourire discret illuminer son visage. Vous aurez, par la suite, et avec le temps, l’occasion de découvrir que cet homme, d’apparence austère, est un homme attachant, au grand cœur, sensible aux belles choses, ne dédaignant pas tous ces menus plaisirs qu’un disciple de saint Ignace peut s’offrir, et c’est peu dire qu’il a su s’entourer, mis à part les opportuns de service, localement et par-delà les mers et les continents, d’hommes et surtout de femmes de qualité exceptionnelle qui lui sont si proches et auxquels il garde une grande fidélité.
« Le CV du père Abou force l’admiration, a poursuivi le doyen Farah, je ne saurais l’analyser ou le commenter (...). Recevant René Rémond à l’Académie française, Mme Hélène Carrère d’Encausse dit cela : “L’Université est un reflet de la société, une microsociété. Celui qui a la charge de gérer cette société miniature accomplit en dernier ressort la tâche de tout responsable politique conscient. Pour avoir compris ce défi et mesuré son ampleur, vous avez contribué à faire entrer l’Université dans une ère nouvelle”.
« Ces quelques lignes pourraient vous être adressées Monsieur le recteur. L’Université que vous avez prise en charge en 1995 à la suite du recteur Ducruet, représentait alors, au sortir d’une période de folie meurtrière, et malgré cette folie, un monument aux fondements bien établis, un roc solidement ancré dans la terre du Liban. Ce joyau, admiré et envié, vous en avez enrichi le contenu, élargi les assises et vous l’avez projeté dans l’avenir. Il brille actuellement de tout l’éclat que vous lui avez donné. »
Après avoir évoqué les réalisations du père Abou (parmi lesquels le Conseil de recherche, le Conseil stratégique, le plan USJ 2007, le 125e anniversaire de l’USJ et les bourses scolaires levées à cette occasion), le doyen Farah a parlé de sa contribution au débat national à travers les messages qu’il prononçait pour la Saint-Joseph.
« Conscient de votre responsabilité d’éducateur, vous avez voulu que l’Université, avec les moyens dont elle dispose, soit au cœur du débat démocratique (...). Vous avez été alors, Monsieur le recteur, ce témoin courageux et honnête, soucieux de sa mission pour avoir toujours osé dire ce qu’il estimait être vrai. Et pour faire suite au discours de votre prédécesseur, le recteur Ducruet (...), vous avez dénoncé tout ce qui perturbe la vie publique au Liban : vous avez dénoncé “La sacralisation de l’idéologie et les slogans qui mobilisent les affectivités autour de certaines idées et paralysent l’intelligence critique.”
« Vous n’avez pas toujours été bien compris, loin s’en faut (...), mais vous avez imposé le respect et vous avez largement contribué à ouvrir le débat national, un débat désormais irréversible pour que résonne en chacun de nous cet appel que vous lanciez lors de votre dernier discours du 19 mars : “Ne permettons pas que décline en nous le sens de liberté, ne permettons pas que s’affadisse en nous le goût de liberté, ne permettons pas que vacille en nous la flamme de liberté.” »
Le père Abou a commencé pour sa part par remercier le conseil de l’université pour cette rencontre conviviale avant de souligner que les réalisations accomplies sous son mandat ont été rendues possibles grâce à la confiance des membres de ce conseil. Mon prédécesseur, a-t-il tenu à souligner, avait déjà réhabilité les bâtiments, organisé l’administration centrale, rédigé les textes juridiques y afférents ; il restait à développer l’USJ et à lui donner une dimension internationale.
En conclusion, le père Abou a rappelé qu’il avait tenu à faire de l’université un espace de liberté et de résistance à l’oppression.
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