Rechercher
Rechercher

Actualités

Justice - Un an après l’assassinat du militant FL, l’enquête piétine Les indices négligés du dossier Ramzi Irani

Un an après l’enlèvement et l’assassinat du militant FL, Ramzi Irani, aucune piste susceptible de mener aux personnes impliquées dans l’affaire n’a été trouvée. Ingénieur chez Total, Ramzi Irani avait été enlevé en plein jour le 7 mai 2002 en sortant de son bureau dans le secteur Clemenceau. Il avait été retrouvé, abattu de deux balles à la poitrine, dans le coffre de sa voiture, au lieudit Caracas, quatorze jours plus tard.
Le dossier qui avait fait beaucoup de bruit l’année dernière a rejoint, jusqu’à nouvel ordre, la liste des enquêtes qui n’ont pas abouti. La famille du disparu, notamment son épouse Jessie et son frère Nabil, qui souhaitent qu’on puisse lever un jour le voile sur les mystères de l’enlèvement et de l’assassinat de l’ingénieur, s’interrogent sur la destruction de certains indices.
Et pourtant la famille préfère ne plus parler de cette enquête qui piétine ou encore de ces indices détruits « probablement par mégarde ». En un an, la profonde tristesse des Irani s’est mêlée à un immense sentiment d’amertume. Las d’avoir entendu des promesses, qui dès l’enlèvement de Ramzi Irani n’ont pas été tenues, ils préfèrent « croire en la justice divine » espérant toutefois que celle des hommes puisse mener à une quelconque piste... D’ailleurs, c’est pour laisser libre cours à l’enquête, qu’ils n’évoquent que brièvement les indices en question.
Ainsi, au cours de la soirée du 20 mai 2002, date à laquelle le cadavre de l’ingénieur a été trouvé, Jessie se rappelle avoir reçu un appel de la morgue de l’AUH. Ses interlocuteurs lui demandaient si elle voulait récupérer les chaussures et les vêtements de son mari que les policiers n’avaient pas récupéré.
La famille raconte aussi que « la relique de la sainte Croix que Ramzi portait au cou a été trempée dans le formol avant qu’elle ne soit transmise au laboratoire pour analyse ».
Nabil se demande pourquoi un périmètre de sécurité n’avait pas été dressé autour de la Polo de Ramzi et relève qu’en « cassant la vitre du véhicule, les forces de l’ordre avaient probablement effacé beaucoup de traces que les assassins, qui avaient conduit la voiture jusqu’au secteur Caracas, auraient laissées ».
En outre, la voiture a, de toute évidence, été vidée de son contenu, papiers, dossiers, disquettes, voire de petites images de saints. Pourtant, des objets (disquette d’ordinateur, carte de crédit, chéquier) apparaissent clairement sur les photos prises sur place par quelques photographes de presse, le jour de la découverte du corps.
Nabil et Jessie se demandent encore où sont passées la chemise du militant et la montre qu’il portait au poignet. Jessie parle d’un cheveu autre que celui de la victime que les enquêteurs avaient trouvé dans le véhicule. « J’ai proposé que des prélèvements ADN soient effectués sur ma chevelure et celle de ma fille, mais plus personne ne m’en a parlé. »
Jessie évoque également les deux semaines où elle espérait retrouver son mari vivant. « Il semble que j’étais la seule à avoir interrogé les gens sur les circonstances de l’enlèvement », dit-elle, expliquant que quelques jours après l’enlèvement de Ramzi, elle s’était rendue dans le secteur Clemenceau à la recherche de témoins. « Selon leurs dires, j’étais la seule à poser des questions à ce sujet », dit-elle.
Elle souligne qu’il y avait un certain manque de coordination entre les différents services. « Quand la voiture de Ramzi avait été retrouvée vers 17 heures, j’étais au Palais de justice pour les besoins de l’enquête et apparemment quelques responsables ignoraient ce fait. Ce n’est que quand je suis rentrée à la maison, vers 19 heures que j’ai appris la nouvelle », dit-elle.
Jessie évoque les inconnus qui avaient rodé autour de sa maison, située non loin de l’ambassade des États-Unis. À plusieurs reprises, ils avaient posé des questions au sujet des Irani, notamment leurs allées et venues, au concierge de l’immeuble.
Ramzi Irani, qui a occupé durant dix ans un poste d’ingénieur chez Total, n’a jamais porté des armes. Depuis 1994, il était responsable de la section estudiantine des FL à l’Université libanaise. Selon certains de ses amis, le jeune homme est qualifié, même après son assassinat, « d’agitateur politique » par les autorités.
Comme tous les militants des groupes de l’opposition, il était surveillé. Et son épouse se souvient qu’il avait alerté les services de renseignements au sujet des véhicules qui rôdaient autour de son domicile quelques semaines avant sa disparition, le 7 mai 2002. Deux jours plus tard, les amis de l’ingénieur avaient tenté de le joindre en composant son numéro de téléphone mobile. Le téléphone avait sonné, pour redevenir des jours durant hors réseau.
« Le 19 mai, 24 heures avant la découverte macabre, nous avions composé le numéro. Le téléphone avait inlassablement sonné sans réponse », se souvient Jessie Irani, qui rappelle avec le frère de la victime des faits et des informations publiés par les journaux, un an plus tôt.
Quatre jours avant la découverte du véhicule de Irani, ses amis avaient reçu des coups de fil anonymes, indiquant que la voiture du disparu se trouvait dans le secteur Caracas (au même endroit où le cadavre avait été retrouvé). Ce jour-là, les amis avaient alerté les gendarmes qui avaient fouillé en vain tout le secteur.
Quand la voiture de Irani a été retrouvée, elle ne portait pas les traces de pluie tombée trois jours plus tôt sur Beyrouth. Au contraire, elle était couverte d’une épaisse couche de poussière, ce qui laisse supposer qu’elle avait été cachée dans un parking souterrain. Les sources proches de l’enquête avaient estimé que la voiture n’était pas restée stationnée plus de 48 heures dans le secteur Caracas.
Le 20 mai 2002, deux événements sécuritaires avaient secoué Beyrouth : l’attentat à la bombe perpétré contre Jihad Ahmed Gibril l’avant-midi. Et vers 17 heures, la découverte du corps décomposé de Ramzi Irani, recroquevillé dans le petit coffre de la Golf Polo noire.
Ramzi Irani, 36 ans, était père de deux enfants, Yasmina, six ans, et Jad, trois ans et demi. Il n’avait pas de dettes ou d’autres problèmes personnels. Sa famille, qui n’a toujours pas appris à apprivoiser le vide créé par sa mort, et qui avait fait l’année dernière, durant quatorze jours, le tour des responsables pour le retrouver, souhaite que l’on identifie « tous ceux qui sont impliqués » dans le crime. Jusqu’à présent, l’enquête n’a mené à aucune piste.
Patricia KHODER
Un an après l’enlèvement et l’assassinat du militant FL, Ramzi Irani, aucune piste susceptible de mener aux personnes impliquées dans l’affaire n’a été trouvée. Ingénieur chez Total, Ramzi Irani avait été enlevé en plein jour le 7 mai 2002 en sortant de son bureau dans le secteur Clemenceau. Il avait été retrouvé, abattu de deux balles à la poitrine, dans le...